Intervention de Françoise Dumas

Réunion du mardi 12 février 2019 à 16h35
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Dumas, rapporteure :

Il n'a échappé à personne, au sein de cette commission, que la Défense fait désormais partie des principales priorités de l'Union européenne. Alors que notre environnement stratégique s'est considérablement dégradé depuis quelques années, il faut se féliciter que l'Europe, par les multiples initiatives qu'elle a lancées depuis deux ans, ait ainsi pris la mesure des menaces qui pèsent sur elle et de l'attente de protection des citoyens européens. Ces initiatives visent, pour l'essentiel, à renforcer les capacités militaires européennes par un soutien à la coopération entre les États membres sur des projets communs, notamment en matière d'armement. C'est-à-dire qu'elles impliquent l'industrie européenne de défense et qu'elles constituent, pour celle-ci, un enjeu majeur. Toutefois, avant de les analyser plus précisément, il nous a semblé nécessaire de présenter rapidement l'industrie européenne de défense.

Le secteur de la défense est un secteur économique très important en Europe. Il représente environ 100 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel et 1,4 million d'emplois directs et indirects. Rien qu'en France, il s'agit de 400 000 emplois, souvent hautement qualifiés. Ce secteur repose sur quelques très grandes entreprises issues de regroupements nationaux etou européens, comme BAE systems, Airbus, Leonardo, MBDA ou encore Thales, autour desquelles s'organise un tissu industriel très dense de PME. Ce secteur présente un certain nombre de particularités, liées à ce qu'il produit : des armes, ce qui en fait un secteur économique à part. C'est ainsi que, dans ce secteur, la demande émane exclusivement des États qui, de ce fait, encadrent strictement l'activité des entreprises de défense et ce, à tous les niveaux :

– compte tenu des montants en jeu, les financements sont pour l'essentiel publics, en particulier pour la recherche et le développement ;

– les programmes d'armement sont supervisés de manière étroite par le ministère de la Défense et l'État-major ; l'État définit le cahier des charges des programmes militaires et participe, au côté des entreprises retenues, au développement et à la recherche ;

– les armements sont exportés après autorisation et vendus à l'étranger dans le cadre d'appels d'offres publics ou de négociations d'État à État.

Compte tenu de l'implication de l'État et du très long terme des programmes d'armement, des relations très étroites lient l'État et ses entreprises de Défense nationale, reflet de l'importance stratégique de celles-ci. C'est parce que l'industrie de défense est une industrie stratégique qu'elle a, pendant des décennies, été préservée des règles européennes. En effet, dès le traité de Rome, elle a été exemptée des règles du marché intérieur, les seules directives applicables visant à renforcer la concurrence dans les marchés publics de défense, ayant été adoptées en 2009 sous contrainte de la Cour européenne de justice. Elles sont, d'une manière générale, très mal appliquées par les États membres qui ont utilisé tous les moyens possibles pour préserver bien évidemment leurs entreprises nationales de la concurrence. Contrepartie de cette exemption, le budget européen n'a jamais été utilisé pour soutenir l'industrie de défense, alors qu'il a soutenu toutes les autres industries européennes. De ce point de vue, il y avait, jusqu'à une période récente, un véritable « tabou » au niveau européen qui interdisait, sur la base d'une interprétation extensive de l'article 41 paragraphe 2 du traité de Lisbonne, tout financement européen aux entreprises de défense.

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