J'avoue que cet amendement de suppression de l'article 1er me surprend. J'y vois quelques contradictions avec les travaux que nous avons pu mener ensemble dans le cadre de la commission d'enquête sur l'alimentation industrielle.
Parmi les propositions que vous aviez formulées, la proposition n° 13 visait précisément à réduire le nombre des additifs dans l'alimentation industrielle pour tendre vers cette liste raccourcie comprenant les seuls additifs autorisés dans l'alimentation biologique. La proposition n° 14 tendait même à instaurer une limitation quantitative du nombre d'additifs utilisables dans un même produit alimentaire, pour éviter les cocktails de dix, de quinze, voire de trente additifs dans un seul produit.
Cela étant, ainsi que je l'indique dans mon rapport, de nombreux arguments plaident fortement en ce sens.
En premier lieu, il y a les arguments de santé publique. Nous avons tous fait le constat de l'intérêt majeur qu'il y a à réduire ce nombre d'additifs, selon les travaux scientifiques qui sont unanimes. Madame Crouzet, vous avez, comme moi, assisté aux auditions des scientifiques et vous savez à quel point cela est crucial.
Ensuite, les arguments technologiques : l'industrie agroalimentaire qui produit sous le label bio démontre que, malgré cette réduction, on arrive à produire des aliments. Rappelons que, sur la grande majorité des additifs aujourd'hui autorisés, certains n'ont pas d'utilité technologique avérée. En fait, on arrive à produire des choses tout à fait transformées ou ultra-transformées avec une cinquantaine d'additifs. C'est déjà largement suffisant.
Par ailleurs, l'intérêt pour le consommateur est également réduit : les exhausteurs de goût, les édulcorants – qui sont susceptibles d'avoir aussi une action perturbatrice sur les récepteurs gustatifs du cerveau, et donc de tromper nos instincts – pour ne pas parler des additifs les plus controversés pour leur dangerosité, servent surtout à masquer les défauts des ingrédients. Ils tendent à tromper le consommateur sur la qualité de ce qu'il mange. Voilà pourquoi il me semble important de réduire de façon drastique le nombre de ces additifs.
Certes, je conçois que ma proposition est peut-être un petit peu plus radicale que celle du rapport de la commission d'enquête. Pour autant, il me semble qu'on gagnerait, au regard du consensus sur les constats, à l'amender plutôt qu'à la rayer d'un trait plume. D'autant que l'argument des risques contentieux européens que vous avancez peut sans doute se discuter. Le règlement européen pose en effet les principes de sûreté pour le consommateur, de réponse aux besoins technologiques ou d'intérêt pour le consommateur, qui ne doit pas être induit en erreur. Autant d'arguments solides au regard du droit européen.