Les amendements de suppression se suivent et se ressemblent, et j'avoue que je suis de plus en plus perplexe.
Vous proposez de supprimer le quatrième article de la proposition de loi, en vous appuyant sur des arguments qui me paraissent erronés, puisque, contrairement à ce que vous écrivez dans votre exposé des motifs, l'éducation à l'alimentation n'est en rien obligatoire.
Si elle est inscrite dans le code de l'éducation, il s'agit d'un enseignement sans horaire défini, qui relève des activités périscolaires. L'article L. 312-17-3 indique en effet qu' « une information et une éducation à l'alimentation et à la lutte contre le gaspillage alimentaire [...] sont dispensées dans les établissements d'enseignement scolaire, dans le cadre des enseignements ou du projet éducatif territorial mentionné à l'article L. 551-1 du présent code », celui-ci définissant les activités périscolaires.
Il revient donc aux écoles, aux collèges, aux lycées et aux équipes éducatives de déterminer la place qui y est consacrée. Concrètement, cela dépend des comités d'éducation, qui y consacrent des temps extrêmement variés, le plus souvent, uniquement en sixième et en cinquième. Malgré l'importance cruciale qui lui est reconnue par tous, cette éducation reste donc aujourd'hui encore très lacunaire.
Pour ne citer qu'eux, la représentante de la Direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) l'avait admis sans difficultés devant notre commission d'enquête, et notre collègue Guillaume Garot, président du Conseil national de l'alimentation (CNA) et ancien ministre de l'agriculture, avait été particulièrement sévère à ce sujet. C'est pourquoi le HCSP recommande de mettre en oeuvre de nouvelles actions, après avoir constaté l'insuffisance du dispositif actuel.
Je tiens d'ailleurs à votre disposition, madame Brocard, les propos que vous avez vous-même tenus lors de la réunion finale de notre commission d'enquête, au cours de laquelle vous aviez voté le rapport et les propositions. Je vous cite : « En tant que mère de trois enfants, je suis bien placée pour savoir que l'intégration de l'éducation au bien-manger dans l'enseignement scolaire dépend du bon vouloir des enseignants. »
Vous comprendrez donc mon étonnement, aujourd'hui devant un changement d'attitude et d'analyse qui me paraît purement de circonstance. J'espère sincèrement qu'il ne correspond pas à ce que vous pensez réellement, et regrette que nous ne puissions nous entendre pour servir l'intérêt général, celui de nos enfants – des vôtres en particulier. Une approche transversale de l'éducation à l'alimentation est évidemment idéale, et c'est précisément toute l'ambition de l'article 4.
Permettez-moi enfin d'ajouter que la communauté scientifique ne partage pas votre avis. Je vous invite, si vous avez encore besoin d'être convaincue que la nutrition est un sujet qu'il faut aborder dans le cadre de la scolarité, à rencontrer le professeur Hercberg à ce sujet.
Et puisque c'est sans doute l'une des dernières occasion que j'ai de m'exprimer ce matin, je tiens à redire mon dépit face à nos discussions – ou plutôt à notre absence de discussion – sur des sujets qui suscitent pourtant de notre part un constat unanime.
Avis défavorable.