Intervention de Paul Molac

Réunion du mercredi 13 février 2019 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Parlons-en, monsieur Questel !

Introduire une dose de démocratie directe dans notre démocratie représentative me semble être une nécessité. Force est de reconnaître que notre démocratie va mal. On laisse en quelque sorte au peuple le droit de choisir ses élites par le vote, mais ensuite on considère qu'il ne devrait pas s'exprimer. Notre démocratie connaît des ratés. Le peuple nous reproche quelquefois d'être une aristocratie qui ne l'écoute pas, qui ne fait pas attention à lui. Il y a une exigence énorme de sa part. C'est pour cette raison que nous devrions élargir les possibilités d'organiser des référendums. Un certain nombre de pays le font : en Suisse, par exemple, la pratique est tout à fait courante, et même quand vous ne résidez pas dans le pays, vous recevez le matériel électoral vous permettant de voter. Cela fonctionne plutôt bien. C'est donc une chose à laquelle nous devrions réfléchir.

Le principe me paraît clair : nous devons aller vers plus de démocratie directe. Une fois qu'on a dit cela, encore faut-il trouver le moyen adéquat et définir la procédure. C'est là que les choses se gâtent quelque peu – je pense en particulier au seuil nécessaire pour provoquer le référendum : faut-il l'établir à 2 % ou à 5 % du corps électoral ? Un seuil à 2 % me paraîtrait trop bas. Par ailleurs – c'est un point dont on n'a pas encore parlé –, quel pourcentage de votants faut-il retenir pour valider le référendum ? En Italie, si moins de 50 % du corps électoral s'exprime, le référendum est purement et simplement annulé. La proposition de loi ne donne pas de précisions sur ce point.

Autre question : quels sont les sujets qui pourront être soumis à référendum ? La démocratie, c'est effectivement le vote, mais c'est aussi un ensemble de règles, comme le respect des droits de l'Homme et de la séparation des pouvoirs. Ne convient-il donc pas de poser des garde-fous ?

En ce qui concerne le référendum révocatoire, je suis relativement dubitatif. La proposition qui nous est faite consiste à rendre possible, à mi-mandat, l'organisation d'un référendum révocatoire. Si la procédure était étendue, nous serions en campagne électorale permanente, ce qui poserait problème – sans parler du fait que, en général, quand nous élisons quelqu'un, c'est pour une durée précise. La révocation devrait donc être limitée à des cas très particuliers et liée à des faits clairement établis ; elle ne saurait reposer sur des interprétations. Je pense en particulier à certaines pétitions réclamant la révocation d'Emmanuel Macron pour haute trahison : il ne faut quand même pas exagérer ! Il doit y avoir des limites.

Le référendum constituant pourrait être une bonne idée, car on voit bien que la Constitution de la Ve République est à bout de souffle. Elle n'a pas permis de rénover la vie politique, ayant été faite pour un homme dont l'histoire était très particulière – qui ne sera plus celle d'aucun président – et qui lui conférait sa légitimité.

Le référendum d'initiative citoyenne, enfin, doit pouvoir avoir lieu à différents échelons : au niveau de la commune, éventuellement de la communauté de communes, du département et de la région. En effet, c'est là quelque chose d'important : les citoyens doivent pouvoir s'exprimer sur tel ou tel point au niveau local.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons que cette proposition de loi puisse être examinée. Nous voulons avancer vers quelque chose qui me semble tout à fait légitime, à savoir que le peuple puisse, dans un certain nombre de cas, prendre lui-même les décisions. Il ne faut pas caricaturer le peuple ni penser qu'il est forcément rétrograde. J'avais l'impression, au sujet du mariage pour tous, que nous avions une majorité dans la population et que ceux qui s'y opposaient ne constituaient qu'une minorité. Le peuple peut avoir un sens politique. Lors de la Révolution française, les élites ont commis la même erreur que nous : elles pensaient avoir raison et se sont heurtées au peuple. En Bretagne, cela a conduit à la Chouannerie, alors que les paysans, au départ, étaient favorables à la Révolution. Attention : le peuple est intelligent, il est capable de voter et d'aller dans le bon sens.

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