Monsieur le rapporteur, je partage votre avis sur la nécessité d'une clarification sur les différents espaces concernés. En raison de la faible culture géographique dans les médias et sur la scène publique en général, on mélange souvent l'espace périurbain et des espaces beaucoup plus éloignés des villes. L'espace périurbain se situe à l'intérieur des aires urbaines. C'est une partie relativement moins dense, de l'ordre de 100 à 500 habitants au kilomètre carré, qui représente 25 % de la population. Au-delà, il y a d'abord une zone grise dénommée « espaces multipolarisés », car polarisée par plus d'une agglomération, puis ce qu'on pourrait éventuellement encore appeler le rural, avec les communes isolées, qui représente 4 % de la population. Autant c'est dans le périurbain qu'il y a le moins de pauvres, autant la pauvreté remonte dans les aires les plus éloignées des villes. On y trouve de faibles revenus et de faibles taux d'emploi. Ce sont souvent des gens qui ont renoncé au marché de l'emploi, parce qu'ils ont été chômeurs de longue durée, qui pratiquent des échanges non monétaires avec le milieu local et qui ont une faible charge foncière du fait de la disponibilité de logements issus de la ruralité.
Si l'on veut réintégrer le transport individuel à la mobilité publique dans le périurbain, la problématique du dernier kilomètre est très intéressante. On peut inciter les gens à utiliser davantage les transports publics jusqu'au bout du réseau, mais à condition de leur proposer un type de mobilité leur offrant le confort du véhicule privé tout en les intégrant dans un système où il y a un peu moins de production de véhicules, moins de voirie, donc une économie d'espace profitable. Il faudrait donc beaucoup de véhicules faisant relativement peu de kilomètres, et très disponibles, en tenant compte de la pendularité, tandis que, dans les communes isolées, on a globalement moins de mobilité pendulaire et besoin de moins de véhicules mais pour plus de kilomètres.
Il faut réfléchir de façon plus analytique, en associant la dimension proprement technique de l'espace. La densité et l'existence de centralité sont des paramètres essentiels. Le mouvement des gilets jaunes est très politique. Il rassemble des gens de ces deux aires, très différents par certains aspects mais qui se rejoignent sur d'autres. On retrouve ce qu'on a pu voir en matière de cartographie des mouvements populistes, dans toute l'Europe et même dans tout l'Occident. On doit aussi travailler sur des modèles politiques individualisés. C'est dans la rencontre entre les contraintes techniques et les attentes sociopolitiques qu'il faut proposer des politiques publiques précises, qui ne se trompent pas de cible, faute de quoi nous perdrons notre temps et notre argent.