Mon interrogation porte sur la Convention européenne des droits de l'homme et la Cour européenne des droits de l'homme. Vous évoquiez tout à l'heure les racines gaullistes de votre engagement dans la vie publique ; je rappelle que ni le général de Gaulle ni Georges Pompidou n'ont cru devoir ratifier le texte de la Convention européenne des droits de l'homme qui avait été signée en 1950. Ensuite, on a assisté au cours des dernières décennies au renforcement progressif de la Convention et de la Cour dans l'ordre juridique interne français. Pendant l'intérim d'Alain Poher, en 1974, on engage la ratification de la Convention. En 1981, François Mitterrand étant Président de la République, la France reconnaît le droit de recours individuel devant la Cour européenne des droits de l'homme. En 1996, alors que vous êtes Premier ministre, la France ratifie le protocole n° 11 relatif aux mécanismes de contrôle. En 2018 enfin, l'actuelle majorité ratifie le protocole n° 16 qui donne aux trois cours suprêmes françaises, le Conseil constitutionnel, le Conseil d'État et la Cour de cassation, chacune dans son domaine, la faculté de poser des questions préjudicielles devant la Cour européenne des droits de l'homme.
Vous serez probablement membre du Conseil constitutionnel dans quelques jours. Avant que l'obligation de réserve attachée à cette fonction ne vous empêche de dire votre opinion, il nous intéresserait de la connaître. Estimez-vous opportun et nécessaire que le Conseil constitutionnel sollicite l'avis de la Cour européenne, et selon quels critères ? Si nous pouvons comprendre que la Convention européenne des droits de l'homme et ce mécanisme existent, tous les patriotes et tous les républicains comprendraient mal que le Conseil constitutionnel devînt quasiment une juridiction subordonnée à la Cour européenne des droits de l'homme. Cette inquiétude justifie ma question.