Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du mercredi 20 février 2019 à 9h30
Commission des affaires économiques

Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances :

Je vous remercie, Monsieur le président, cher Roland Lescure, Mesdames et Messieurs les députés, de m'accueillir ce matin pour échanger sur notre industrie, son avenir et ses grands défis. Je concentrerai mon propos sur l'industrie – sujet qui m'a été confié dans le domaine de la reconquête industrielle –, même si je suis également mobilisée sur les questions relatives au commerce et à l'artisanat.

Nous traversons une période de doutes, non pas sur les résultats économiques immédiats, puisqu'ils sont à leur meilleur niveau depuis une décennie, avec une croissance supérieure à la moyenne des taux de croissance des dix dernières années, et un chômage qui est passé sous la barre des 9 % pour la première fois depuis dix ans. La France est, aujourd'hui, le second pays le plus attractif d'Europe pour les investissements directs étrangers. Non, nous doutons de l'adaptation de notre modèle économique, construit au sortir de la Seconde Guerre mondiale, aux mutations que nous vivons depuis trente ans.

Nous subissons également l'impact de choix erronés qui ont été faits : le choix d'une France sans usines, dont l'économie reposerait uniquement sur le secteur tertiaire ; le choix de laisser se concentrer l'innovation dans les services et dans les métropoles ; le choix d'augmenter la dépense publique sans être capables de répondre à l'appauvrissement des territoires désindustrialisés.

Ces choix, nous en payons collectivement le prix aujourd'hui : un sentiment de déclassement, des fractures territoriales profondes et un chômage de masse. Si le sentiment de déclassement et les fractures territoriales ne sont pas l'apanage de la France – il suffit de regarder ce qui se passe aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Italie et même en Allemagne –, la question du chômage de masse est spécifique à la France et mérite d'être traitée.

La conviction du Gouvernement est claire : il n'y aura pas d'économie forte sans secteurs productifs forts. Or la réindustrialisation de la France apparaît comme une réponse efficace aux maux que traverse notre société. Pourquoi ? Parce que l'industrie crée de la prospérité, des emplois durables et mieux payés. Je vous rappelle, en effet, qu'un emploi industriel est payé en moyenne 20 % de plus qu'un emploi « moyen » – si cette notion existe. Cet écart a augmenté ces dernières années, puisqu'il n'était que de 14 % il y a huit ans.

L'industrie crée des emplois stables, malgré ce que prétendent les médias, qui ne parlent que des sites en difficulté. En réalité, l'industrie a un besoin de main-d'oeuvre criant. Pour chaque emploi créé dans l'industrie, trois ou quatre emplois sont induits – sous forme de sous-traitance ou de services.

Par ailleurs, l'industrie est en capacité de résorber la fracture territoriale, puisque 70 % des emplois industriels sont aujourd'hui situés en dehors des grandes agglomérations ; 70 % des investissements directs étrangers dans l'industrie ont lieu en dehors des métropoles, alors que – et cela est logique – 95 % des investissements directs étrangers dans les services s'opèrent dans les métropoles.

L'industrie est, par ailleurs, à même de définir les solutions les plus appropriées pour la transition écologique et énergétique. Les savoir-faire français, dans des domaines complexes comme la chimie, la plasturgie, la gestion des déchets ou la mobilité, sont parmi les meilleurs au monde et doivent nous permettre de développer des process et des produits adaptés à la transition écologique et énergétique. Opposer écologie et économie est donc finalement assez vain, puisque c'est cette innovation qui va nous permettre de passer le cap.

Les émissions françaises de gaz à effet de serre ont baissé de 20 % entre 1995 et 2015, notamment grâce à l'efficacité énergétique de notre industrie. Le paradoxe est que notre empreinte carbone a augmenté de 11 % du fait des importations.

Enfin, l'industrie est nécessaire à une souveraineté à laquelle les Français aspirent ; une souveraineté technologique, d'abord, puisque l'industrie concentre l'essentiel de la recherche-développement privée, mais aussi une souveraineté économique, car seule une augmentation significative de notre production industrielle améliorera durablement notre balance commerciale et nous permettra de moins dépendre des pays étrangers.

L'industrie est donc clairement une réponse à ces défis clés, encore faut-il savoir dans quelle direction nous souhaitons aller. Pour mieux comprendre où nous devons mener notre industrie, regardons d'où nous venons. Depuis 2000, la France s'est désindustrialisée. Nous avons perdu un million d'emplois industriel, nos entreprises ont lentement perdu des parts de marché à l'international et sur notre territoire.

Depuis vingt ans, nous avons perdu en compétitivité, essentiellement en raison du coût du travail, bien supérieur aux autres pays européens. De sorte que les grands groupes français ont installé leurs sites de production hors de France, même si certains y ont laissé les activités à haute valeur ajoutée, telles que le design des produits ou la recherche-développement – peut-être devrions-nous examiner le lien qui peut exister avec le crédit d'impôt recherche (CIR) ?

En revanche, nos petites et moyennes entreprises (PME) et nos entreprises de taille intermédiaire (ETI) ont rarement les capacités humaines et financières pour délocaliser leurs productions. Elles ont donc subi le coût du travail toujours plus bas de l'Allemagne, de l'Italie et de l'Espagne, perdu des parts de marché et fermé des sites.

Cet appauvrissement de notre appareil productif a conduit les investisseurs à se désintéresser de la France, non seulement parce que nous étions moins compétitifs, mais aussi parce que nos réglementations paraissaient plus complexes – notre marché du travail était perçu comme extrêmement rigide et notre fiscalité défavorable, par comparaison avec d'autres pays européens.

Depuis 2017, la France est sortie de ce cercle vicieux. La reprise industrielle est réelle. En effet, en 2017 et 2018, l'emploi industriel s'est redressé alors qu'il déclinait depuis plus de quinze ans. Nous comptons davantage d'ouvertures d'usines que de fermetures. L'attractivité du territoire, pour les investissements industriels, s'est affirmée : Toyota investit 300 millions d'euros à Maubeuge, et Daimler 500 millions à Hambach pour son premier véhicule électrique. AstraZeneca et General Mills ont également investi plusieurs dizaines de millions d'euros sur notre territoire.

La France attire les investisseurs et les industriels, et en particulier les industriels innovants ; c'est un signe de la qualité du « site France » aux yeux de nos partenaires étrangers.

Cependant, cette reprise industrielle est fragile. Le combat qui reste à mener pour que la France redevienne une puissance industrielle, prospère et exportatrice, est entier. Si nous voulons réussir ce combat, nous devons nous concentrer sur plusieurs éléments.

D'abord, nous devons améliorer notre compétitivité coût, notamment en matière de coût du travail. Les chiffres sont extrêmement parlants, en particulier dans le domaine industriel, où les salaires sont, non pas proches du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), mais bien plus élevés. De sorte les industriels ne bénéficient pas du dispositif de baisse de charges sociales pour une grande partie de leurs salariés.

Ensuite, il nous faut aider les entreprises à construire des avantages compétitifs hors coût, en permettant aux entreprises d'innover et en les accompagnant dans la montée en gamme ou sur des produits différenciés – beaucoup d'entreprises françaises ont ce savoir-faire.

Il nous faut également donner de la stabilité, de la prévisibilité à nos entreprises. Il y a en effet rien de pire, pour un chef d'entreprise qui construit son plan sur cinq ans, que de devoir sans cesse s'adapter aux nouvelles législations.

Il nous faut, enfin, inscrire notre vision industrielle dans l'ensemble de nos politiques nationales – éducation et formation, aménagement du territoire, énergie, santé, transports, environnement… – mais aussi articuler notre intervention avec les régions qui, depuis la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi dite « NOTRe »), disposent de compétences économiques et sont donc des partenaires incontournables en matière de développement économique – et pour aller chercher du soutien au niveau européen. Nous organisons, M. Bruno Le Maire et moi-même, des réunions régulières avec les présidents de conseil régional pour débattre de ce sujet.

Enfin, il nous faut articuler notre vision industrielle avec celle de l'Europe. Nous sommes, en effet, dans une compétition mondiale et dans un marché unique – extrêmement précieux. L'enjeu est de construire, avec les autres pays membres de l'Union européenne et la Commission européenne, une politique industrielle reposant notamment sur la question de la concurrence équitable – le fameux level playing field –, non seulement entre les États membres de l'Union européenne, mais surtout avec les autres grands pays, tels que la Chine.

Pour réussir ce combat de la reconquête industrielle, nous proposons un plan d'actions qui repose sur deux axes. Premièrement, nous travaillons d'abord par filière. Ce travail partenarial entre le Gouvernement et les industriels a été relancé par le Conseil national de l'industrie (CNI). Dix-huit filières sont aujourd'hui labellisées, nous contractualisons avec chacune d'elle des actions en matière de formation, d'innovation, d'accélération de la croissance des PME et d'exportations.

Nous proposons, par territoire, une solution agile, le dispositif « Territoires d'industrie ». Le 22 novembre dernier, le Premier ministre a dévoilé le nom des 124 territoires retenus, et nous sommes en train d'en labelliser d'autres – des porteurs de projets nous ayant présenté des projets très dynamiques. Il s'agit d'un dispositif piloté par les régions, et pour lequel l'État joue le rôle de facilitateur et d'apporteur d'expertise et de financement.

L'objectif est de rassembler tous les ingrédients de la compétitivité – la formation, l'innovation, l'immobilier, l'investissement, le très haut débit – et de s'adapter à la spécificité de chaque territoire d'industrie. Les contractualisations État-région sont en cours, avec l'objectif d'aboutir d'ici à l'été.

Si chaque filière et territoire a des besoins spécifiques, les défis auxquels notre industrie doit faire face sont en réalité communs. J'en vois cinq.

Le premier est le défi de la compétitivité coût ; la clé de l'attractivité. C'est la raison pour laquelle, nous menons, depuis vingt mois, le politique la plus ambitieuse de ces vingt dernières années pour restaurer cette compétitivité coût. Nous avons baissé les charges des entreprises en transformant le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse de charges pérenne afin d'alléger le coût du travail. Aujourd'hui, le coût du travail en France est, en moyenne, légèrement inférieur à celui de l'Allemagne – il lui est toutefois supérieur pour les salaires au-delà de deux fois le SMIC, en raison des taux de cotisations patronales plus élevés.

Voici deux chiffres : en France, le taux de cotisation est de 36 %, contre 19 % en Allemagne, au niveau de deux fois le SMIC, et de 42 % contre 19 % au niveau de trois fois le SMIC. Or les emplois industriels coûtent, pour la plupart d'entre eux, bien plus que deux fois le SMIC – je pense aux fonctions d'opérateur spécialisé, de conducteur de ligne, de technicien de maintenance, etc. Les industriels se rattrapent avec le CIR pour trouver, pour la partie recherche-développement, des ingénieurs qui sont finalement très compétitifs.

Nous avons annoncé une baisse du taux de l'impôt sur les sociétés à 25 % en 2022, ce qui correspond à la moyenne européenne. Il ne s'agit pas de faire du dumping fiscal, mais de se rapprocher de la moyenne européenne et d'envoyer un bon signal aux investisseurs étrangers.

Nous avons également allégé la fiscalité du capital pour que nos entreprises investissent davantage dans l'innovation. Nous allons lever, grâce au projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE), une série d'obstacles financiers, administratifs et culturels qui empêchent nos entreprises de croître. Nous avons seulement 260 ETI industrielles – chiffre qui démontre bien la force de ce blocage français –, en majorité dans des activités de service, contre 4 000 en Allemagne. Elles sont si peu nombreuses que nous pourrions les traiter individuellement.

Le rétablissement de la compétitivité coût passe aussi par la modernisation de notre appareil de production, qui accuse aujourd'hui un retard significatif en termes de numérisation et de robotisation. Nous disposons de dix-neuf robots pour mille salariés en France, contre vingt en Italie et trente-quatre en Allemagne. Nous numérisons trop lentement. Nous devons moderniser notre appareil productif.

C'est la raison pour laquelle nous avons lancé un plan pour l'industrie du futur, l'Alliance industrie du futur (AIF), doté de 500 millions d'euros, au travers d'un sur-amortissement pour les investissements dans les technologies de l'industrie du futur, pendant deux ans, mais aussi de l'accompagnement individuel de 10 000 PME vers l'industrie du futur. Les deux éléments sont essentiels, l'enjeu étant d'abord, pour les entrepreneurs, de définir leur production et leur ligne de production dans une vision « industrie du futur », avant d'investir. Or nous retrouvons bien, dans ce plan, ces deux éléments : accompagnement des PME, d'une part, et soutien financier, d'autre part.

Le deuxième défi de la reconquête industrielle est l'innovation. Innover, investir dans les technologies créatrices de croissance tombe sous le sens.

Si, face aux programmes d'investissement massif en recherche-développement des pays étrangers – Chine, États-Unis –, nous n'investissons pas massivement dans les nouvelles technologies, notre industrie sera distancée.

Aussi avons-nous sanctuarisé le CIR à hauteur de 6 à 7 milliards d'euros par an, pour faire de nos ingénieurs français les ingénieurs les plus compétitifs d'Europe. C'est pourquoi, nous souhaitons que chaque filière du CNI se saisisse d'un projet ambitieux en matière d'innovation afin de relever le défi de la transition écologique et énergétique. Par exemple, dans le contrat de la filière navale un défi doit être relevé sur la propulsion propre ; ou encore, dans le contrat de la filière chimie, celui de la décarbonation de la chaleur dans les procédés. Chaque contrat de filière contient un ou deux sujets d'innovation sur lesquels nous concentrons la recherche-développement, et qui représentent l'industrie du futur.

C'est la raison pour laquelle, nous avons créé un fonds pour l'innovation de rupture, doté de 10 milliards d'euros. Le rendement annuel de ce fonds, 250 millions d'euros, financera les défis industriels de demain, comme l'intelligence artificielle, la mobilité, la santé et la cybersécurité. Trois réflexions sont menées, en matière d'intelligence artificiel, de diagnostic médical et d'audit des algorithmes, et un projet est en cours sur le stockage d'énergie. Nous imaginons bien tout le bénéfice potentiel de ces investissements.

Nous renforçons également notre soutien aux start-up industrielles, par la mise en oeuvre d'un plan « Deep Tech », opéré par BPIfrance, à partir de 2019. Toutes les start-up ne font pas uniquement des applications et du codage, certaines développent du process industriel. Ces process appellent des financements plus importants, puisqu'il faut développer des lignes de production. De sorte que l'accompagnement en financement est plus lourd. C'est tout l'enjeu de ce plan.

Mais tout cela n'aurait pas de sens si nous ne protégeons pas ces savoir-faire en innovation que nous créons sur le territoire, pour affirmer notre souveraineté technologique. C'est la raison pour laquelle, nous renforçons le dispositif de contrôle des investissements étrangers en France, dans la loi PACTE, et réfléchissons avec BPIfrance à la façon de créer un fonds capable d'intervenir dans les entreprises à forte valeur ajoutée sur les territoires, afin de stabiliser leurs actionnariats.

Le troisième défi de la reconquête industrielle est celui des compétences. Nous pouvons multiplier les grands discours volontaristes sur la reconquête industrielle, si les industries ont du mal à recruter, si elles n'arrivent pas à trouver en France les compétences dont elles ont besoin, tous les discours resteront lettre morte. Or aujourd'hui, 50 000 emplois industriels sont immédiatement disponibles et n'ont pas de candidats. Et même si les compétences existaient, les industriels auraient besoin, non pas de 50 000 personnes, mais de 100 000, voire 200 000 personnes. Un recrutement avec, à la clé, des parts de marché et des commandes additionnelles. Ces besoins de compétences se situent à tous les niveaux de formation. Car si les industriels ont besoin d'ingénieurs et de data scientists, ils ont également besoin de techniciens spécialisés, d'opérateurs qualifiés, de chaudronniers, de soudeurs, d'électrotechniciens, de spécialistes de la maintenance, etc. C'est un terrain de jeu extraordinaire.

Nous devons agir sur ces métiers maintenant. Nos usines doivent avoir accès à ces compétences aussi vite que possible. C'est tout le sens de la réforme de la formation professionnelle, menée en 2018 par Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail, et qui vise à confier aux entreprises et aux branches le soin de définir leurs besoins en compétences pour ensuite mettre en place les formations correspondantes.

Le défi des compétences, c'est également attirer les jeunes vers l'industrie, car l'image qu'ils en ont ne correspond pas nécessairement à la réalité. Pour eux, l'industrie garde son image du passé : des usines qui crachent de la fumée, des conditions de travail pénibles, des métiers peu valorisés, peu rémunérés. Or les métiers de l'industrie sont des métiers d'avenir, mieux rémunérés que les métiers de service, et les besoins sont réels.

Pour changer cette image, nous avons voulu faire de 2019, la grande année de l'industrie. Nous parlerons toute l'année, et dans toutes les villes de France, d'industrie, et notamment dans les agglomérations de taille moyenne. Telle est l'idée du « French Fab Tour » : se rendre dans 60 villes moyennes pour entrer en contact avec les collégiens et les lycéens, afin de nourrir leur imaginaire avant qu'ils choisissent leur orientation, ainsi qu'avec les étudiants qui ont, peut-être, besoin de se représenter concrètement ce que sont les métiers de l'industrie. Ce dispositif vise également à faciliter les contacts entre demandeurs d'emploi et entreprises qui recrutent.

D'ailleurs, il serait intéressant, en tant de députés, que vous vous investissiez, en accompagnement le French Fab Tour, et en étant présents durant la semaine nationale de l'industrie, à l'occasion de laquelle des entreprises ouvrent leurs usines aux collégiens, aux lycéens et au grand public. Il est important que vous vous investissiez durant cette semaine-là et que vous portiez haut les couleurs de l'industrie dans vos territoires.

Quatrième défi : mettre au service de l'industrie l'ensemble de nos politiques publiques. Je vais vous donner quelques exemples, mais cette approche peut être largement déclinée.

Si nous voulons que l'industrie s'implante dans tous les territoires de France, avec les mêmes atouts en région parisienne qu'en Bretagne ou dans la Drôme, nous devons lui donner les moyens de s'implanter. La couverture réseau numérique, par exemple, est impérative. Le plan très haut débit permettra d'apporter un haut débit de qualité pour tous, avec fin 2020, et un très haut débit, avant fin 2022. C'est l'objectif du New Deal mobile que nous sommes en train de déployer avec les opérateurs, en 4G.

Nous allons, dans le même temps, mettre en place une feuille de route 5G ambitieuse pour attribuer les fréquences en 2020. La 5G répond à des objectifs différents de la 4G. Elle est destinée, non pas au grand public, mais à des usages industriels et à des endroits où les communications sont denses ; l'objectif de couverture n'est donc pas de 100 %. En profiteront les usages les plus importants, en matière industrielle.

Par exemple, la 5G permettra de réaliser des opérations chirurgicales à distance avec des robots. Elle pourrait permettre, si nous retenons cette technique, de faire évoluer le véhicule autonome. Elle permettra aussi de faire tourner des usines entièrement robotisées. Des usages industriels, donc, extrêmement intéressants, innovants et qui représentent probablement les emplois de demain.

Autre levier : notre commande publique, dont l'impact économique est très important sur notre territoire, 200 milliards d'euros, et sur nos entreprises. Les achats publics constituent un levier de croissance et d'innovation pour de nombreuses PME. Nous avons donc assoupli les règles de la commande publique pour que les PME y accèdent plus facilement. En augmentant les taux d'avance versés par l'État, en supprimant dans le projet de loi PACTE les ordres de service à zéro euro, ou encore en simplifiant l'accès aux achats innovants.

Enfin, cinquième défi : le défi européen. La France dispose d'atouts majeurs, de grandes entreprises, de grandes universités et d'infrastructures compétitives. Mais soyons lucides, face à la Chine conquérante ou aux États-Unis, l'industrie française, seule, ne fera pas le poids. Nous devons nous unir au niveau européen pour développer les technologies clés de demain. La question de fond est simple : voulons-nous que nos batteries de véhicules électriques, qui représentent de manière durable 35 % de leur valeur, soient européennes ou chinoises ?

Nous devons construire de véritables filières industrielles européennes pour les technologies de rupture ; c'est une question de souveraineté future. Et c'est tout le sens du projet que nous poussons avec l'Allemagne pour développer un consortium européen de batteries de nouvelle génération.

Nous devons également renforcer la prise en compte de l'industrie dans l'ensemble de nos politiques européennes : marché intérieur – accéder au marché intérieur devrait avoir un prix –, politique commerciale, marchés publics, transport, énergie et environnement.

Ces outils doivent être utilisés comme des moyens permettant de renforcer la puissance industrielle européenne. C'est le sens de la « déclaration des amis de l'industrie » du 18 décembre dernier. Les représentants de vingt pays, parmi lesquels onze ministres, ont signé à Paris un appel pour que la prochaine Commission européenne fasse de l'industrie une prorité de son mandat, afin de restaurer la souveraineté économique européenne. C'était également le sens de la déclaration commune de MM. Bruno Le Maire et Peter Altmaier, hier, à Berlin, qui appelle à une nouvelle politique industrielle européenne.

Tels sont les quelques messages que je souhaitais vous délivrer avant de répondre à vos questions. Nous savons d'où nous venons, le chemin qui nous reste à parcourir, et nous connaissons les défis décisifs de notre industrie qui doivent nous permettre de restaurer croissance, prospérité et souveraineté. Je suis certaine que nous arriverons, ensemble, à trouver les solutions les plus efficaces pour faire réussir notre industrie, créer de l'emploi et faire réussir la France.

Je vous remercie.

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