Lors de l'examen de la loi « ÉGALIM », nous avons eu de longs débats sur la question de l'éthique et de la réciprocité des échanges commerciaux. Notre discussion a essentiellement porté sur les produits alimentaires que nous importons et sur les règles sanitaires qui encadrent leur production : nous craignons en effet que les accords commerciaux conclus avec le Canada et avec le Mercosur n'introduisent en France des produits ne répondant pas aux mêmes normes de production que les nôtres – et ce sont les consommateurs les plus précaires qui risquent d'y être exposés.
Nous en sommes venus à nous interroger sur les produits que nous exportons, alors même que leur utilisation est interdite chez nous, et c'est évidemment la question des pesticides qui s'est trouvée au coeur de nos débats. Avec M. Guillaume Garot et d'autres collègues, nous avons eu l'audace de déposer un amendement qui prévoit qu'un produit ayant été interdit par les réglementations européennes pour des raisons sanitaires et environnementales ne peut pas être exporté. Nous considérons en effet que ce qui n'est pas bon pour nous n'est pas bon non plus pour les autres. Au cours de nos débats, nous avons été amenés à préciser les choses : il se peut en effet qu'un produit qui n'a pas fait l'objet d'une autorisation au niveau européen soit néanmoins utile à l'autre bout du monde, ou simplement sur l'autre rive de la Méditerranée, parce qu'il correspond à des besoins différents ou à un climat spécifique. Nous avons donc restreint l'interdiction aux produits ayant déjà fait l'objet d'une interdiction en Europe – il nous semble en effet que les raisons justifiant une telle interdiction sont universelles.
Pour être clair, nous n'excluons pas qu'un produit qui n'a pas fait l'objet d'une autorisation puisse être utile à Madagascar ; en revanche, s'il a été interdit en France, nous pensons qu'il sera également néfaste à Madagascar. Nous avons dessiné une trajectoire : j'avais proposé une interdiction à l'horizon 2020, mais M. Matthieu Orphelin et la majorité ont proposé de repousser cette date à 2023 ou 2025. Le Sénat a par ailleurs décidé de prendre en compte une question qui ne nous paraît pas négligeable : celle des salariés qui, en France, travaillent dans les usines fabriquant ces produits. Dans le processus de transition écologique, il y aura des gagnants et des perdants, et notre travail à tous, c'est de construire un monde viable, tout en tenant compte de la vie des gens qui travaillent. Pour ce faire, nous devons imaginer ce que l'on appelle un plan de conversion industrielle : nous devons renoncer à certaines productions, parce qu'elles sont nocives, et en favoriser d'autres. Et nous devons organiser les transitions de l'une à l'autre. L'amendement de M. Matthieu Orphelin me semble sage : il paraît effectivement difficile d'atteindre notre but dès 2020, mais c'est tout à fait envisageable en 2023 ou 2025.
Vous avez indiqué, Madame la présidente, que nous pouvions avoir une sorte de discussion générale sur les sujets importants.