Je vais commencer par répondre à la dernière question. Je remercie tout d'abord Lénaïck Adam d'avoir élargi le point de vue à l'exploitation aurifère, qui existe déjà en Guyane, sous une forme plutôt artisanale, avec seulement quelques PME. L'exploitation de l'or n'est nulle part sans impact sur l'environnement. Parmi les différentes techniques, aucune n'est neutre. Nous ne faisons pas partie de ceux qui voudraient opposer telle technique à telle autre voire s'opposer à toute exploitation aurifère. Il faut regarder les réalités en face. Le projet « Montagne d'or » fait l'objet de contestations. Il y a eu beaucoup de tensions, lorsque le débat public a eu lieu, après que la Commission nationale du débat public a été mandatée.
Le Président de la République s'est exprimé sur ce sujet à deux reprises, depuis son élection. Il a posé des conditions à la réalisation du projet : l'exemplarité environnementale ; l'approbation démocratique ; un bénéfice économique et social pour la population guyanaise. C'est bien à l'aune de ces trois critères que le Gouvernement et moi-même pourrons prendre une position.
Je sais, depuis ma première interview en tant que ministre, que nous sommes sommés de prendre position pour ou contre le projet – comme dans beaucoup de débats, me direz-vous, si ce n'est que celui-ci a pris une dimension symbolique extrêmement forte. Une proposition de résolution visant à l'interdiction générale de l'utilisation des technologies à base de cyanure dans l'industrie minière, initiative parlementaire à laquelle vous répondiez, me semble-t-il, dans votre intervention, monsieur le député, doit être examinée à l'Assemblée nationale le 7 février. Le Gouvernement sera conduit à se prononcer.
À ce stade, je peux d'ores et déjà vous dire que considérer que le seul danger ou le seul risque – la direction générale de la prévention des risques (DGPR) est rattachée à mon ministère – concernerait le cyanure relève d'une vision très partielle. Le mercure, utilisé depuis très longtemps dans l'exploitation aurifère, présente autant de dangers. Cela étant, le débat parlementaire aura lieu et nous prendrons une position selon les trois critères précédemment évoqués.
Avant que je ne sois nommé ministre, mon prédécesseur avait demandé au ministère de l'économie et des finances qu'une mission réalise un rapport sur ce sujet. Les conclusions pointent les possibles bénéfices économiques pour le territoire, mais aussi les risques environnementaux réels, qu'il ne faut pas nier, mais regarder de près. Comme vous le savez sans doute, il existe des risques de ruptures des digues retenant les déchets cyanurés. La pluviométrie élevée de la région risque de provoquer des coulées de boue. La terre risque d'être lessivée et acidifiée. Il faut avoir en tête ces risques environnementaux majeurs.
Concernant les objectifs d'utilisation des énergies renouvelables, madame Trastour-Isnart, vous savez que la loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit une programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) sur une période de dix ans, après une première PPE transitoire afin que cette stratégie soit désormais calée sur le rythme des mandats politiques – ce qui est une bonne chose sur le plan démocratique. Il a également été prévu une PPE propre à chaque territoire d'outre-mer. De fait, ces PPE spécifiques sont légèrement décalées dans le temps. La première vague vient tout juste d'être adoptée et les territoires d'outre-mer enclenchent actuellement le processus de révision, alors que le Gouvernement a achevé ce travail en ce qui concerne l'Hexagone. La Réunion, la Guadeloupe, la Guyane et Mayotte ont débuté la révision de leurs PPE pour les périodes 2019-2023 puis 2024-2028. Des objectifs chiffrés seront bel et bien prévus : La Réunion devra passer à 67 % d'énergies renouvelables électriques contre 37 % aujourd'hui, la Guyane à 85 % au lieu de 64 %, Mayotte à 40 % au lieu de 5 %, la Guadeloupe à 66 % au lieu de 18 % et la Martinique à 56 % au lieu de 6 %. Ces objectifs seront naturellement déclinés mode par mode.
J'en viens à la demande de représentation des outre-mer des trois bassins océaniques au conseil d'administration de l'Office français de la biodiversité. Dans l'état actuel du texte, il est réservé au minimum un siège dans le premier collège aux outre-mer et un autre dans le deuxième ou le troisième collège. Il me semble possible d'affiner cette rédaction pour aller jusqu'à trois représentants, monsieur Girard, ce qui permettrait d'offrir une garantie de représentation des outre-mer dans les trois collèges. Nous avons déjà entamé le débat sur cette question avant même la discussion générale sur le texte, dès la motion de procédure défendue en séance publique par M. Saddier.
D'autre part, nous sommes tout à fait favorables aux synergies avec les territoires et pays voisins, même si l'expérience montre que ce n'est pas toujours simple – ne serait-ce que parce que ce qui semble voisin est parfois lointain. On peut en effet explorer les capacités de travail commun dans les Caraïbes, par exemple, ou encore en Guyane, le seul territoire ultramarin non insulaire. Cela étant, je le répète : ce n'est pas simple – de même qu'au sein de l'Union européenne, où les pays sont pourtant reliés entre eux par leurs réseaux, chaque pays est attaché à développer sa propre stratégie et la coordination voire la convergence sont difficiles. Je m'y emploie avec l'Allemagne, la Belgique, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni ou encore l'Irlande, mais la réalité est très complexe. Chacun considère du fait de son histoire qu'il s'agit d'une question de souveraineté, et développe ses propres voies. C'est pourquoi il faut avant tout utiliser et valoriser nos ressources et trouver des solutions adaptées à chaque territoire. La même solution ne pourra pas valoir partout. La transition énergétique, c'est la diversification de nos sources d'approvisionnement. Cela vaut dans l'Hexagone comme outre-mer.