Intervention de Pierre Pouëssel

Réunion du jeudi 21 février 2019 à 14h00
Commission d'enquête sur la lutte contre les groupuscules d'extrême droite en france

Pierre Pouëssel, préfet de l'Hérault :

Je vais commencer par un bref exposé, si vous le permettez, avant de répondre à toutes les questions que vous me poserez.

Je voudrais, d'abord, rappeler les principes qui guident mon action dans le cadre de la lutte contre les groupuscules extrémistes, puis je brosserai un panorama des groupuscules d'extrême droite dans le département de l'Hérault.

Les principes sont simples. Il y en a deux. Le premier est celui de la neutralité et de l'impartialité de l'État dans la lutte contre les groupuscules qui ne respectent pas les principes démocratiques, à l'extrême droite comme à l'extrême gauche, qui prônent en particulier le racisme et l'antisémitisme et encouragent le recours à la violence. Le second principe est celui de légalité. Dans la lutte contre les groupuscules extrémistes, ce sont plus particulièrement les dispositions de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure qui constituent les principaux éléments de la boussole de mon action.

Dans l'Hérault, l'extrême droite s'exprime dans le cadre de diverses formations groupusculaires concurrentes, en proie à des querelles incessantes de personnes, parfois sur fond de différences idéologiques. Ces microstructures ont des durées de vie très limitées, car elles ne disposent pas de ressources financières suffisantes, en raison du faible nombre de leurs adhérents. À ce jour – et je pourrai vous donner une liste – on recense huit formations de ce type dans le département, dont une qui a disparu et qui, comme le Président de la République l'a annoncé hier dans un discours prononcé lors du dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), devrait faire l'objet d'une dissolution, à savoir Combat 18.

J'en viens aux principaux groupes qui se signalent dans l'Hérault. On en compte trois, pour l'essentiel.

Il y a notamment une structure familiale, la Ligue du Midi, qui est implantée aux confins du Gard et de l'Hérault, au château d'Isis, dans une petite commune, et qui compte une quarantaine d'adhérents. On y cultive de père en fils les valeurs de l'extrême droite, avec ses cinquante nuances, à commencer par le maréchalisme, l'Organisation de l'armée secrète (OAS) ou encore l'Œuvre française, du côté du père, Richard Roudier, qui est né en 1948. Les deux fils, pour leur part, ont adhéré à la fin des années 1990 au mouvement d'ultradroite Unité radicale, groupuscule qui a été dissous à la suite de la tentative d'attentat commise par Maxime Brunerie contre le Président de la République le 14 juillet 2002. La femme de Richard Roudier est, elle aussi, très adepte de Charles Maurras et de l'Action française.

Un autre groupuscule, Génération identitaire, qui est, lui, connu au niveau national, aurait une quarantaine de membres actifs dans le département, selon nos estimations.

À cela s'ajoute un groupe de rock identitaire, les Brigandes, à propos duquel vous venez d'apporter un certain nombre de précisions, madame la présidente, et qui réunit une vingtaine d'adultes et une douzaine d'enfants autour d'une sorte de gourou exalté et complotiste.

Véhiculant une idéologie xénophobe et raciste, ces trois groupes pratiquent davantage les coups d'éclat que les coups de poing – même si l'on pourra revenir sur les incidents qui se sont produits dans la nuit du 22 au 23 mars dernier à la faculté de droit de Montpellier – et ils ne remplissent manifestement pas, en particulier la Ligue du Midi, tous les critères qui pourraient justifier leur dissolution en application de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure.

Aujourd'hui, ces groupes ne me posent pas de vrais problèmes d'ordre public, à la différence des groupuscules d'extrême gauche qui sont très actifs à Montpellier. Ces derniers se sont illustrés par une extrême violence le 14 avril dernier, avec 200 « Black Blocs » qui ont préfiguré la manifestation parisienne du 1er mai et qui, de samedi en samedi, sont en tête des Gilets jaunes pour affronter les forces de l'ordre.

Voilà ce que je voulais dire à titre liminaire. Je suis prêt à répondre à toutes vos questions.

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