Intervention de Ludovic Pajot

Séance en hémicycle du lundi 11 mars 2019 à 21h30
Agence nationale de la cohésion des territoires — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLudovic Pajot :

Dans des territoires qui, comme le mien, sont fortement touché par la fracture numérique, vous pouvez imaginer la difficulté que cela représente pour certains habitants qui, dès lors, se tournent vers les élus pour les aider. Je pourrais ainsi multiplier les exemples.

Ce cas illustre à lui seul la problématique que nous sommes amenés à évoquer aujourd'hui. Dans de nombreux endroits de France, les territoires sont morcelés, et bien souvent abandonnés. La belle vision de l'aménagement du territoire qui a pendant longtemps inspiré nos politiques publiques semble avoir disparu. Et comme pour beaucoup d'autres phénomènes dont on ne perçoit pas sur le moment les bienfaits, c'est maintenant que nous réalisons à quel point cette vision est nécessaire, indispensable.

Dans ce contexte, la création d'une Agence nationale pour la cohésion des territoires est plutôt accueillie positivement. Si cette nouvelle agence a vocation à opérer sur l'ensemble du territoire français, il nous paraît fondamental qu'elle déploie prioritairement son action vers les territoires qui en ont le plus besoin. Nous ne pouvons donc qu'approuver l'amendement qui tend à préciser que les zones visées en priorité sont celles connaissant de fortes difficultés sociales. En revanche, si cela revient dans les faits à ne prendre en considération que certaines banlieues, nous ne pouvons valider une telle orientation.

Ces banlieues, pudiquement appelées « quartiers », devenues bien souvent de véritables zones de non-France, gangrenées par les trafics en tous genres et dans lesquelles les forces de l'ordre et de sécurité ne peuvent plus se rendre, sont en effet loin d'être les seuls territoires frappés par la misère sociale. Pourtant – doit-on le rappeler ? – , des milliards d'euros y ont été investis depuis plusieurs décennies sans le moindre résultat probant.

Dans le même temps, nos communes rurales étaient les grandes oubliées des politiques publiques, et elles continuent de subir la disparition de nombreux services publics : fermetures de classes, de bureaux de poste. Dans mon département, les déserts médicaux s'étendent ; récemment encore, des services ont été fermés à l'hôpital de Béthune-Beuvry et le dernier médecin généraliste a disparu dans une commune de ma circonscription. In fine, c'est une véritable rupture d'égalité dans l'accès au service public de la santé qui se crée.

Ce « deux poids, deux mesures » est de plus en plus insupportable pour nos compatriotes et explique sûrement en grande partie la crise de confiance que traverse actuellement notre pays.

L'utilisation par la rapporteure du terme « réparer » au sujet des collectivités locales démontre à quel point le lien de confiance entre l'État et les territoires s'est progressivement délité, détruisant ainsi le beau maillage territorial qui avait fait la force de notre nation.

Cette agence ne doit pas se transformer en un énième gadget destiné à calmer la colère légitime des élus locaux, au premier rang desquels se trouvent les maires, sans cesse dépossédés de leurs prérogatives, mais qui restent les premiers interlocuteurs des habitants. Elle doit en revanche être un outil au service d'une réelle simplification et d'une meilleure lisibilité entre les différentes agences de l'État.

En réalité, la multiplication des opérateurs multiplie également les difficultés. De même, le périmètre sans cesse élargi des agglomérations a des inconvénients majeurs. Dans ma circonscription, l'agglomération de Béthune-Bruay regroupe plus d'une centaine de communes et compte plus de 200 000 habitants. Cela pose de réelles difficultés aux élus locaux, au premier rang desquels les maires des petites communes, pour se faire entendre et signaler efficacement les situations problématiques rencontrées par leurs administrés.

Parce que l'argent reste le nerf de la guerre, le principe d'égalité doit se matérialiser également dans les dotations : un euro pour les villes, un euro pour la ruralité. Il est urgent de retrouver une véritable vision de l'aménagement de notre territoire. Représentants du peuple, soyez assurés de notre détermination à veiller à ce qu'aucun Français ne soit laissé de côté. Nous serons également vigilants quant aux moyens accordés à l'agence.

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