Je vous remercie, monsieur le ministre.
Hier, le « procès de la honte » s'est ouvert à Madrid : je veux bien sûr parler de celui des douze responsables indépendantistes catalans, notamment associatifs, qui risquent de sept à vingt-cinq ans de prison pour avoir rempli, ou simplement soutenu, le mandat qui leur a été confié de manière démocratique par le peuple, à savoir celui d'organiser un référendum d'indépendance. Ils sont jugés par l'État espagnol pour rébellion, sédition, détournement de fonds publics. Ces accusations ont été créées de toutes pièces pour justifier lesdites charges et ont été écartées par les juridictions belges, écossaises, allemandes, ainsi que par le gouvernement suisse, lorsque ces instances ont refusé d'extrader vers l'Espagne l'ex-président Puigdemont, ainsi que ses ministres en exil, sur le seul fondement de la rébellion et de la sédition, en raison de l'absence totale de violence des accusés.
Par ailleurs, rappelons que le parquet, composé de magistrats nommés sur proposition du gouvernement espagnol, fait ressembler ce procès à un procès politique, le premier de cette ampleur jamais organisé dans l'Union européenne. Que l'on soit pour ou contre l'indépendance de la Catalogne, là n'est pas la question. Il s'agit avant tout du respect des standards démocratiques d'un pays appartenant à l'Union européenne. Or force est de constater que l'Espagne les viole allègrement et que l'Union européenne détourne le regard, au rebours de ce qu'elle fait dans certains autres pays comme la Pologne ou la Hongrie.
On apprend aujourd'hui que les indépendantistes catalans qui font tenir la majorité de Pedro Sánchez au Congrès des députés viennent de voter contre le budget, car ce dernier ne veut pas dialoguer avec eux. On semble ainsi se diriger vers de nouvelles élections en Espagne, avec un super-dimanche ou superdomingo qui verrait se tenir le même jour des scrutins municipaux, régionaux et européens. L'Espagne n'en a donc pas fini avec l'instabilité liée à cette question.
Seul un processus politique que le gouvernement espagnol se refuse à envisager pourrait permettre de sortir de cette situation. La réponse est pourtant à portée de main, puisqu'il ne s'agit ni plus ni moins que d'accéder à la demande de près de 80 % des Catalans, à savoir procéder à un référendum d'autodétermination. Il s'agit d'un processus légitime. Depuis une dizaine d'années, les élections ont toujours porté des majorités indépendantistes à la tête de la Catalogne. L'autodétermination n'est pas un crime, mais un droit universel reconnu par le droit international, et au premier chef par l'ONU.
Monsieur le ministre, j'aimerais savoir si la France compte rappeler à l'Espagne la nécessité de respecter les standards démocratiques européens en matière de droits et libertés fondamentales, et si elle compte appeler à une solution politique sans laquelle nous pouvons craindre que notre voisin espagnol ne s'enfonce durablement dans l'instabilité.