Intervention de Daniel Fasquelle

Séance en hémicycle du vendredi 15 mars 2019 à 21h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 61

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

Nous arrivons ici à un point dur du texte, l'un de ceux sur lesquels nous nous opposons.

Ce que vous proposez est, je pense, extrêmement dangereux pour les entreprises. Dès lors que vous touchez à l'article 1833 du code civil, ces dispositions s'appliqueront à toutes les entreprises du pays, quelle que soit leur taille, quel que soit leur domaine d'activité.

Vous voulez donc inscrire dans le code civil que « la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ». Mais quand pourra-t-on décider que l'entreprise a satisfait à cette obligation ? Une entreprise doit respecter le droit de l'environnement, le droit du travail… Mais, avec cette nouvelle disposition, elle devra faire plus que cela. Quand aura-t-elle fait mieux que respecter le code de l'environnement ? Quand aura-t-elle fait mieux que respecter le code du travail ? Où sera placée la limite, et comment le saura-t-on ? Je pose la question, mais je ne vois pas comment vous allez pouvoir y répondre…

Deuxième question, qui décidera si cette obligation a été respectée ? Dès lors que vous créez une obligation nouvelle – ne souriez pas, monsieur Lescure, l'affaire est sérieuse – , il faut bien, à un moment ou un autre, que son non-respect soit sanctionné. Le juge devra donc intervenir.

Monsieur Lescure, vous êtes peut-être très fort pour redresser la Caisse de dépôt et placement du Québec, mais à chacun son domaine. Pour ma part, j'ai bien réfléchi et étudié la question.

Il faudra donc qu'à un moment quelqu'un décide si l'entreprise a respecté son obligation de prendre en compte ses enjeux sociaux et environnementaux. Il s'agira nécessairement du juge, auquel vous donnerez encore un peu plus de pouvoir.

Troisième question, qui va saisir le juge ? Non seulement les parties prenantes de l'entreprise, mais aussi les personnes extérieures à l'entreprise. Ce pourrait être des associations de protection de l'environnement – on en connaît de sérieuses et de beaucoup moins sérieuses – , qui mettraient en cause toute entreprise qui n'aurait pas agi en considération des enjeux sociaux et environnementaux de son activité.

Et même s'il n'existait qu'une petite probabilité que ce que je viens d'expliquer se produise – vous ne pouvez pas l'écarter complètement – , il est criminel de vouloir faire prendre ce risque aux entreprises de notre pays.

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