Dans nombre de territoires, le sentiment d'abandon découle de l'addition des renoncements : mairies vidées de leur substance, CAF, CPAM, bureaux de postes déménagés, écoles de proximité abîmées… Souvent, la présence d'un médecin, même libéral, constituait le dernier symbole de la République. D'ailleurs, le journal Le Monde avait juxtaposé les données de démographie médicale et celles sur le vote : on constatait que partout où le déficit médical se creusait, la République reculait et ses ennemis progressaient. Il s'agit donc d'un symbole fort, que vous devez défendre et brandir à travers cette loi. D'une certaine manière, vous êtes attendus au tournant.
Nous pensons que si certaines mesures vont dans le bon sens, vous ne vous donnez pas les moyens de corriger réellement les inégalités territoriales. Je fais partie de ceux qui pensent qu'il aurait fallu territorialiser, de manière volontariste et coercitive, la présence des médecins dans les zones où l'offre de soins est actuellement insuffisante. Il faudrait avoir ce courage politique.
Je pense aussi qu'il faudrait associer plus étroitement les élus à la détermination des zones tendues. Les conseils territoriaux de santé sont informés de l'existence de telles zones, mais ne sont pas associés à leur tracé. Quant aux maires, ils sont oubliés – même si le Président de la République semble redécouvrir leur utilité.
Enfin, pour mettre tout le monde en face de ses responsabilités, il faut que nous ayons en tête que les lois qui se suivent et se ressemblent – loi Bachelot, loi Touraine… – et qui, au bout du compte, ont toutes été guidées par l'austérité, ont accéléré le déménagement de nos territoires et la fracture territoriale et sociale en matière d'accès aux soins. Les groupements hospitaliers de territoires, ces mastodontes, et les fusions d'ARS en sont la plus flagrante illustration.