Nous examinons cet après-midi une proposition de loi défendue par le groupe La République en marche, qui prend modèle sur le dispositif prévu par la loi Hamon pour les contrats d'assurance habitation ou automobile, et dont la finalité est de protéger davantage les assurés en leur donnant davantage de liberté dans le choix de leur complémentaire. Nous ne pouvons que souscrire à cette ambition, qui rejoint d'ailleurs les préoccupations des consommateurs et des assurés.
On ne devrait pas être dans l'incapacité de payer les soins nécessaires en cas de coup dur ou renoncer à des soins trop chers. C'est pourtant trop souvent le cas pour les personnes modestes. Face aux risques et aux aléas de la vie, nos concitoyens demandent davantage de protections. À cet égard, la question du reste à charge en santé et celle de la couverture des soins dont ils bénéficient constituent des enjeux essentiels.
Depuis l'origine, notamment depuis la création de la sécurité sociale, les complémentaires jouent un rôle important dans la couverture santé de nos concitoyens. L'assurance maladie obligatoire prend en charge 77 % des frais médicaux des Français ; les complémentaires santé permettent de compléter le taux de couverture de manière déterminante. Ces deux étages de prise en charge sociale additionnés permettent de couvrir aujourd'hui 95 % des assurés, soit la quasi-totalité de la population française.
La place des complémentaires dans notre système de protection sociale est donc tout à fait majeure, et il ne saurait être question de la remettre en cause ni de déprécier la qualité du service qu'elles rendent à nos concitoyens. Cette place a été encore accrue par la loi du 14 juin 2013, qui a validé l'accord national interprofessionnel de janvier 2013. En vertu de ce texte, depuis le 1er janvier 2016, l'ensemble des salariés doit être couvert par un contrat collectif.
Cette réforme a permis de compléter la couverture santé des salariés, mais elle n'a profité qu'à la classe d'âge des vingt-cinq à cinquante-neuf ans, c'est-à-dire la catégorie de la population qui est le plus souvent en bonne santé et bénéficie du meilleur niveau de vie. À titre de comparaison, les contrats individuels, qui concernent majoritairement les non-salariés – à savoir les étudiants, les fonctionnaires, les retraités et les inactifs – , prévoient le plus souvent des prises en charge moins protectrices que les contrats collectifs, notamment pour les dépassements d'honoraires.
Autrement dit, les personnes les moins bien protégées des aléas de la vie sont celles qui auraient le plus besoin de l'être. Je pense en particulier aux retraités, pour lesquels le coût de la couverture complémentaire santé est, on le sait, généralement plus élevé que pour les actifs. Il convient donc de redonner du pouvoir d'achat aux assurés.
Nous saluons la présente proposition de loi, qui vise précisément à accroître la concurrence entre organismes complémentaires, ce qui conduira à une baisse de leurs tarifs, au plus grand bénéfice des assurés et adhérents. Elle s'inscrit d'ailleurs dans le prolongement du cadre législatif existant. Depuis la loi Chatel du 28 août 2005, les assureurs et les mutuelles ont l'obligation de prévenir les souscripteurs de la possibilité de ne pas renouveler leur contrat à tacite reconduction. Ce dispositif a été complété par la loi Hamon du 17 mars 2014, qui a autorisé la résiliation des contrats d'assurance tacitement reconductibles à l'issue d'une période d'un an, sans frais ni pénalités pour l'assuré.
Dans la réalité, il est souvent malaisé pour l'assuré, qui dispose seulement d'un laps de temps restreint pour faire le tour du marché et comparer des offres difficilement lisibles, de résilier sa complémentaire. La proposition de loi donnera davantage de pouvoir au consommateur : il sera dorénavant en mesure de comparer les offres tout au long de l'année, sans être contraint par des délais trop courts, ce qui changera les règles du jeu à son bénéfice.
Dans le même temps, cette réforme suscitera une concurrence accrue entre complémentaires santé et, partant, une baisse des prix. Elle sera donc favorable au pouvoir d'achat de nos concitoyens, particulièrement à celui des plus modestes d'entre eux.
Par ailleurs, elle devrait permettre d'améliorer la gestion des complémentaires santé. Depuis 2010, les frais de gestion des complémentaires santé ont augmenté deux fois plus vite que les remboursements et prestations aux assurés, situation paradoxale décrite dans le rapport de la commission.
Le nombre d'organismes a fortement diminué depuis quelques années : depuis 2001, celui des mutuelles a été divisé par trois, et celui des institutions de prévoyance, par deux. Dans le même temps, les gains de productivité rendus possibles par les rapprochements ne se sont pas traduits par des économies en matière de frais de gestion. Il ne faudrait pas que cette évolution conduise à une détérioration de la qualité de la couverture santé des assurés. Nous devrons être particulièrement vigilants sur ce point. Le principe de base doit être que l'assuré choisit sa complémentaire santé en toute connaissance de cause.
Il aurait été sage de réaliser une étude d'impact de la mesure. Le recours à une proposition de loi vous a permis d'esquiver cette contrainte, ce qui est regrettable pour la clarté de nos débats. Il aurait également été bienvenu de demander l'avis du Conseil d'État.
À notre avis, l'amélioration de la lisibilité et de la comparabilité des garanties proposées par les complémentaires santé constitue à la fois l'enjeu majeur de la réforme et la condition de sa bonne application. Nos concitoyens ne disposent pas aujourd'hui d'outils fiables et standardisés leur permettant de comparer facilement les offres et les garanties proposées par les organismes. Cette situation est tout à fait regrettable, alors que les organismes complémentaires d'assurance maladie se sont engagés à plusieurs reprises à améliorer la transparence et la lisibilité de leurs garanties. Je pense en particulier à la déclaration commune portant engagement de bonnes pratiques sur la lisibilité des garanties des complémentaires santé, signée en octobre 2010, il y a donc près de dix ans.
Le 14 février dernier, les fédérations d'organismes complémentaires ont signé un nouveau document prévoyant une harmonisation de la présentation de leurs contrats, en vue d'une meilleure information de leurs assurés et adhérents. Cet engagement, qui va dans le bon sens, n'est pas pour autant contraignant juridiquement et ne concerne pas la totalité des acteurs du secteur.
Sur ce sujet, nous saluons l'adoption d'un amendement en commission visant à confier à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution la rédaction d'un rapport d'évaluation du respect par les complémentaires de l'engagement de lisibilité des garanties.
Je proposerai de compléter ce dispositif par deux amendements visant à inscrire une clause de revoyure assortie d'une évaluation de la réforme. Cela permettrait d'évaluer en temps réel les effets de l'application de cette proposition de loi, ce qui tiendrait lieu d'étude d'impact.
Le groupe UDI, Agir et indépendants se prononcera donc, dans sa grande majorité, en faveur de la présente proposition de loi, qui facilitera l'accès à la couverture santé pour nos compatriotes.