Depuis quatre mois et demi, notre pays est paralysé chaque samedi par des gilets jaunes qui viennent manifester à Paris, Bordeaux, Toulouse, Nice, Avignon et dans bien d'autres villes encore, comme à Laval ou à Mayenne. La violence qui émaille certaines de ces manifestations ne doit pas être confondue avec les revendications de tous ceux qui ont revêtu leur gilet jaune pour être vus et entendus, pour exister.
Leur cri de colère est avant tout l'expression d'une souffrance, celle de cette France périphérique qui se sent méprisée et exclue. Ces femmes et ces hommes meurtris qui, jusqu'à présent, s'effaçaient derrière leur pudeur et leur dignité, sont arrivés au bout de ce qu'ils pouvaient endurer. Ils veulent plus de justice sociale, plus de considération et plus de proximité. Ils veulent aussi participer davantage à la décision en ayant une plus grande capacité à exercer une influence directe sur la vie politique. Au fond, ils nous demandent aujourd'hui de faire entrer notre démocratie dans la modernité, celle du XXIe siècle.
Si le groupe Libertés et territoires souscrit à leur volonté de renforcer la démocratie directe, nous considérons que celle-ci ne doit pas porter atteinte à la démocratie représentative. L'une et l'autre doivent s'équilibrer, se compléter et se renforcer.
L'article 3 de la Constitution dispose : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. » C'est la raison pour laquelle des élections libres, régulières et pluralistes permettent aux Français de choisir leurs représentants. Toutefois, interrogeons-nous avec sincérité : quelle est cette démocratie minimale qui ne considère pas le vote blanc comme un suffrage exprimé et refuse même de le comptabiliser ?
Ce débat, qui refait surface régulièrement, est plus que jamais prégnant. Élections après élections, nous voyons l'abstention être la grande gagnante des rendez-vous électoraux, parce que les électeurs ne se retrouvent pas dans les candidats en lice et savent que leur vote blanc ne sera pas pris en compte, ce qui nourrit ressentiment et défiance. Lors de la dernière élection présidentielle, le vote blanc a rassemblé 3 millions de voix, un score particulièrement important. Avec les bulletins nuls, c'est le vote de 11 % de Français qui n'a pas été comptabilisé, alors que celui-ci avait un sens.
Quel aurait été le visage de la France aujourd'hui si leur vote avait été pris en compte ? Un visage certainement plus en adéquation avec ce que veulent nos concitoyens, un visage dans lequel ils se reconnaîtraient davantage. C'est pourquoi le groupe Libertés et territoires est favorable à la reconnaissance du vote blanc et à l'organisation de nouvelles élections quand celui-ci atteint un certain score.
Pour les députés de notre groupe, le vote blanc est un acte civique qui se distingue de l'abstention, car il permet à nos concitoyens qui ne trouvent pas d'intérêt à choisir parmi les candidats en lice d'exprimer malgré tout leur choix électoral, un choix qu'il est particulièrement légitime de prendre en considération. En filigrane se pose aussi la question du vote obligatoire. Le groupe Libertés et territoires estime que le vote obligatoire ne peut s'envisager, à plus long terme, qu'en cas de succès de la prise en compte du vote blanc.
La crise des gilets jaunes et le grand débat national qui en a découlé mettent en lumière de nombreux problèmes de fond, dont ceux de l'effectivité et de l'efficacité de la démocratie représentative. Depuis plusieurs décennies, mais encore plus depuis près de deux ans, notre démocratie représentative est ignorée, méprisée, voire infantilisée par un pouvoir technocratique et centralisé, par un pouvoir vertical et excessivement concentré, qui éloigne la décision des territoires, et donc des Français.
Notre démocratie représentative a également été affaiblie par des décisions qui ont fragilisé le lien entre les députés et leurs territoires : je pense tout particulièrement à l'inversion du calendrier électoral qui, avec le fait majoritaire, conduit nos concitoyens à donner automatiquement une majorité au Président. Je pense aussi, plus récemment, à la fin du cumul des mandats. Combiné au « dégagisme » et à la forte volonté de renouvellement exprimée par les Français lors des dernières élections, cela a eu pour effet de faire entrer dans notre assemblée des députés parfois trop déconnectés des réalités de nos concitoyens.
Le 09/04/2019 à 15:36, Laïc1 a dit :
"L'article 3 de la Constitution dispose : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. »
Elle est où la voie du référendum ?
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