Intervention de Christian Charrière-Bournazel

Réunion du jeudi 21 mars 2019 à 11h35
Commission d'enquête sur la lutte contre les groupuscules d'extrême droite en france

Christian Charrière-Bournazel, avocat, ancien bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris :

Les délais de prescription sont prévus par la loi du 29 juillet 1881. Pour les diffamations et injures à caractère privé ou concernant des personnes politiques ou autres, le délai est de trois mois secs. Pour les injures et diffamations à caractère raciste ou antisémites, ce délai est d'un an. C'est très court. La prescription a été allongée à six ans en matière de délits, ce qui est plus raisonnable. Car vous n'êtes pas toujours informés tout de suite de ce qui est enfoui dans un ordinateur ou sur un site et qui ressortira parfois longtemps après. Dans ce domaine, la prescription court à partir du moment où la chose est mise en ligne. Un an, ce n'est pas possible.

Merci de me permettre par votre question de revenir sur un point que j'avais omis dans ma présentation. Dans le cadre de mon projet de remettre ces délits dans le code, en droit commun, il faut aussi considérer que la prescription ne court qu'à partir du moment où la chose a été enlevée. La prescription s'alignerait sur celle du recel : tant que la chose recelée est entre les mains du receleur, la prescription ne court pas. Tant que le fournisseur d'accès ou d'hébergement ou le site contient la chose immonde, la prescription ne courrait pas. Elle ne commencerait à courir que le jour où la chose aurait été supprimée. Dans ces conditions, nous aurions de vrais remèdes.

Il m'est arrivé de vouloir poursuivre un fournisseur d'accès et d'hébergement pour une diffamation qui n'avait été découverte par ma cliente que plus de trois mois après les faits. C'était fini. Il n'y avait plus de délit. En matière de diffamation ordinaire, il n'y a pas d'action publique indépendante de l'action civile. Dès que le délai de prescription de trois mois est dépassé, c'est fini. Il n'y a plus de délit. On ne peut plus rien faire ni au civil ni au pénal. En matière d'injure ou de diffamation antisémite, on ne peut plus rien faire une fois dépassé le délai d'un an.

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