Intervention de Olivier Véran

Réunion du mercredi 18 octobre 2017 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran, rapporteur général :

Pasteur a aussi écrit que « le hasard ne favorise que les esprits préparés ». En l'espèce, on peut considérer que dix-huit mois ont suffi à ce que les esprits soient préparés. En revanche, on peut difficilement considérer que l'on peut laisser au hasard la santé des enfants.

Le débat a eu lieu au Parlement et certains d'entre vous ont pris part aux auditions que j'ai organisées, à l'audition du Pr Alain Fischer organisée par la présidente de la commission, qui a duré plus de deux heures, et à la table ronde qui a rassemblé des scientifiques, des acteurs de la vie sociale, des représentants des usagers et des professionnels de santé, favorables à la vaccination ou qui ne l'étaient pas, soit par crainte des adjuvants aluminiques soit par opposition de principe à l'obligation vaccinale.

Il ne s'agit pas d'ajouter des vaccins ou des injections au calendrier vaccinal actuel mais de généraliser la couverture vaccinale à la totalité ou à la quasi-totalité des enfants de France. Le constat est fait que la couverture vaccinale pour certaines maladies contre lesquelles la vaccination est recommandée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) – et certainement pas par un lobby pharmaceutique – s'est amoindrie, si bien que nous voyons resurgir en France des maladies qui avaient disparu et qui n'auraient pas dû réapparaître. Il y a eu un dixième cas de rougeole aux conséquences désastreuses, a rappelé la ministre de la santé, dont je salue le courage avec lequel elle tient à faire entrer en vigueur cette mesure de santé publique. La fermeté et le sens du dialogue avec lesquels elle présente cette disposition l'honorent et honorent sa fonction. J'espère que, de la même manière, nous nous honorerons en favorisant une protection renforcée de la population, notamment des enfants, contre les risques infectieux.

Des maladies ont réapparu dans notre pays et d'autres n'ont pas disparu alors qu'elles sont éteintes ailleurs. Comment se satisfaire que l'hépatite B soit encore responsable de 2 500 morts par an en France ? C'est le seul pays d'Europe occidentale où il en est ainsi ! Nous pouvons, comme vous le souhaitez, prendre le temps de la réflexion pendant encore cinq, dix ou vingt ans, tout en comptant ceux qui tombent des suites de maladies infectieuses et ceux qui les transmettent ! Expliquons donc aux parents d'enfants qui, parce qu'ils sont atteints de troubles immunitaires, ne peuvent être vaccinés, que l'on veut plus de temps pour réfléchir ! On a beaucoup attendu et le taux de couverture vaccinale est aux alentours de 80 % pour certains vaccins ; nous voulons que ce taux remonte à 90 % ou 95%, de manière que l'ensemble de la population soit protégée, au premier chef les enfants qui n'ont pas la chance de pouvoir bénéficier de la vaccination.

C'est un héritage considérable que nous ont laissé les scientifiques, et leurs successeurs, dans leur écrasante majorité, nous soutiennent et soutiennent la démarche de la ministre : ainsi de la quasi-totalité des conférences scientifiques, des collèges d'enseignants et des académiciens qui, tous, nous encouragent. Le Pr Alain Fischer a conduit pendant dix-huit mois une conférence sociétale, parcourant le pays pour entendre des acteurs de la société civile, des scientifiques et des professionnels de santé. Au terme de cette concertation, il a remis un rapport aux conclusions sans équivoque. D'autre part, l'ancienne députée Sandrine Hurel avait remis au Gouvernement, sous la précédente législature, un rapport consacré à la politique vaccinale.

En bref, la décision n'est pas tombée d'un chapeau ; elle a été mûrement réfléchie. Voyez ce dossier, dont j'ai envoyé copie à Mme Brocard et que je tiens à votre disposition : y figurent sur 600 à 700 pages l'ensemble des pièces – documents scientifiques et prises de position – sur laquelle la mesure est fondée. Que l'on nie l'existence du débat me gêne profondément car rarement j'aurai eu dans cette Assemblée autant l'occasion de débattre, dans des cercles privés et dans des cercles publics, des enjeux de la vaccination. On peut contester l'idée qu'il faille recourir à l'obligation, mais une représentante des usagers qui a participé à la table ronde a présenté les choses ainsi qu'il suit : l'obligation n'est pas la meilleure solution en soi, nous a-t-elle dit, et il faut rétablir la confiance en la vaccination, mais vous, parlementaires, devez voter l'obligation pour protéger la santé des enfants.

Voilà quelle a été la concertation préalable à cette disposition. Il ne faudra pas craindre, ensuite, de débattre, au-delà de la vaccination obligatoire, des étapes suivantes nécessaires pour protéger les enfants. Peut-être, un jour, parviendrons-nous par exemple à débattre sereinement de la vaccination contre le papillomavirus humain pour éviter le cancer du col de l'utérus. Il ne faut pas avoir peur d'avancer ; la science ne doit pas effrayer.

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