Intervention de Matthieu Deconinck

Réunion du mardi 26 mars 2019 à 17h15
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Matthieu Deconinck, chef du bureau D2 aè la direction de la législation fiscale (DLF) :

La contribution climat énergie n'a aucune existence juridique et budgétaire, et ceci à dessein.

La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques correspond en réalité au cumul de trois taxes, la TICPE, la TICC et la TICGN. Pour chacune d'elles existent seize catégories de produits, qui répondent aux seize catégories fiscales définies par le droit de l'Union européenne. Les États membres disposent d'une liberté totale pour la fixation du tarif de chaque catégorie. En revanche, ils sont extrêmement limités dans la mise en place de tarifs différenciés au sein de chacune d'elles.

Prenons un exemple. Le gazole à usage routier est une catégorie. Le gazole à usage non routier en est une autre. Au sein de chacune de ces deux catégories existent plusieurs produits, tels que, pour le gazole à usage routier, le B100, le B95 ou d'autres carburants encore d'origine plus ou moins renouvelable. La règle de principe est que l'on ne peut pas différencier, au sein d'une catégorie, les tarifs des différents produits, sauf exception. Ce que l'on appelle la contribution climat énergie, ou tout du moins les hausses de taxe intervenues depuis 2014, correspondent aux hausses de taxe uniformes pour chacune des seize catégories.

Or, comme chaque catégorie réunit une diversité de produits aux émissions de CO2 différentes, il n'existe pas de taxe directement proportionnelle au contenu en CO2 des produits. Le tarif de chacune des grandes catégories est donc augmenté de manière régulière depuis 2014 à hauteur de l'émission de CO2 à la combustion - telle que mesurée dans les derniers règlements du système d'échange de quotas d'émission – Emission Trading Scheme (ETS) – du principal produit de la catégorie.

Dans la catégorie des gazoles à usage routier, on prend ainsi le gazole traditionnel B7 et on regarde combien il émet à la combustion. Rappelons que les émissions de CO2 à la combustion sont très différentes des émissions sur l'ensemble du cycle de vie du produit. On ne produit pas seulement du CO2 à la combustion, sinon les biocarburants n'auraient absolument aucun intérêt. La mesure de l'émission à la combustion permet de dégager un coefficient de proportionnalité, attribué à chacune des catégories dans la hausse générale des taxes actée dans le cadre d'un processus distinct.

Au gré des politiques mises en oeuvre, des dérogations à ce principe général peuvent être apportées. Ainsi, lors de la hausse de taxe votée l'année dernière, puis annulée, le gaz naturel ne faisait pas l'objet d'une mesure similaire. De même, le rattrapage gazole-essence constitue une dérogation au principe selon lequel la hausse de fiscalité doit être répartie entre les grandes catégories de produits au prorata des différents coefficients.

La composante carbone fait donc l'objet d'une démarche systématique adoptée par le législateur depuis 2014 pour répartir la hausse des tarifs entre des catégories de produits. Il peut y être dérogé selon les circonstances.

À ce dispositif vient s'ajouter la TIRIB, qui vise à créer une discrimination fiscale au sein de ces catégories pour favoriser ceux des biocarburants qui émettent le moins de dioxyde de carbone. Cette deuxième taxe a une structure tout à fait particulière, qui lui permet d'échapper à la règle de la taxation en seize catégories découlant du droit européen. La niche fiscale de la finalité spécifique a donné lieu au fameux contentieux « Messer » sur l'électricité, que vous connaissez sans doute.

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