Par exemple, la Commission européenne ne prend pas forcément en compte les annonces portant sur des économies en dépenses qui n'auraient pas encore été votées par le Parlement. Cela explique que certaines prévisions de la Commission puissent apparaître un peu plus dégradées que celles provenant d'autres sources, qui prennent en compte un certain nombre d'engagements pouvant être considérés comme pris.
Pour ce qui est du scénario de finances publiques, je ne reprendrai pas l'expression « mauvaise gestion » employée par M. de Courson et je n'ai pas vraiment de commentaires à faire sur ce point, si ce n'est que la dégradation du déficit et de la dette est la conséquence du choix politique consistant à augmenter l'effort de réduction des prélèvements obligatoires sans avoir une action supplémentaire sur la maîtrise de la dépense. Ce choix politique ayant été fait, dès que vous avez une croissance un peu moins élevée que prévu, cela se traduit par une augmentation du déficit effectif.
Cela a conduit le Gouvernement à apporter, dans le cadre du programme de stabilité 2019-2022, des corrections portant sur le déficit effectif réel en 2022, qui s'éloigne, évidemment, des objectifs affichés par le précédent programme de stabilité ainsi que des objectifs à moyen terme de la loi de programmation. Ce constat paraît assumé dans le programme de stabilité, puisque le Gouvernement privilégie les baisses d'impôts et tient compte d'une croissance qui sera moindre, ce qui a obligatoirement des conséquences.
L'inflation sous-jacente a été en moyenne de 0,8 % en 2018 et le Gouvernement estime qu'elle sera de 1,1 % en 2019, en fondant sa prévision sur l'augmentation des salaires, ainsi que du prix de certaines matières premières alimentaires. Pour notre part, nous constatons que cette légère accélération annoncée par le Gouvernement n'était toujours pas apparente en mars 2019 – l'indice du mois de mars a même été inférieur à la prévision –, ce qui nous conduit à estimer que la remontée de l'inflation sous-jacente sera peut-être plus lente que ne l'avait prévu le Gouvernement. Il est d'ailleurs à noter que les prévisions d'une accélération de l'inflation sous-jacente que la BCE et la Banque de France nous font depuis des années sont régulièrement démenties, ce qui doit nous inciter à la prudence en la matière. Cela dit, la prévision du Gouvernement reste réaliste – tout au plus demandera-t-elle de légers réajustements en cours d'année.
En ce qui concerne la consommation et l'épargne, je dirai que, pour bien appréhender la dynamique du taux d'épargne, il convient de rappeler que les ménages ont pour habitude de lisser leur consommation, c'est-à-dire que la croissance de leurs dépenses est souvent plus régulière que la progression de leur revenu disponible : en d'autres termes, une augmentation du pouvoir d'achat ne se traduit pas immédiatement par une augmentation de la consommation. Le quatrième trimestre 2018 est l'illustration de ce comportement, puisque les gains de pouvoir d'achat concentrés sur ce trimestre et sur le premier trimestre 2019 ont été absorbés en grande partie par une augmentation du taux d'épargne qui, sans battre de record, a néanmoins atteint un niveau singulièrement élevé, comme le montrent les données de l'INSEE.
Le Gouvernement prévoit pour 2019 une augmentation du pouvoir d'achat de 2 % et une augmentation de la consommation de 1,6 %, ce qui nous semble prudent, puisqu'il ne prévoit pas que l'augmentation du pouvoir d'achat se répercutera aussitôt sur la consommation, estimant que l'on assistera plutôt au maintien d'un niveau d'épargne relativement élevé. Bien évidemment, la vitesse et l'ampleur de la baisse du taux d'épargne, donc de la capacité des Français à consommer, dépendront du niveau de confiance que ceux-ci peuvent avoir dans les annonces faites et dans l'avenir.
J'en viens aux échanges extérieurs de la France qui, en 2018, ont soutenu la croissance dans une ampleur inédite depuis 2012, confirmant d'une certaine façon une dynamique qu'on avait déjà pu observer en 2017. En 2018, les exportations de produits manufacturés ont été dynamiques, ce qui s'est expliqué notamment par la forte croissance de celle des matériels de transport – on pense évidemment à Airbus – et par la livraison de contrats exceptionnels, portant notamment sur des paquebots.
Le moindre dynamisme de la demande mondiale, joint au ralentissement constaté chez nos partenaires commerciaux et à l'appréciation de l'euro, a pesé, bien sûr, sur les exportations. Cependant, à rebours de ce qui est observé dans les autres pays européens, les performances à l'exportation se sont stabilisées en 2018 après plusieurs années de baisse. Selon le scénario du Gouvernement, on devrait voir en 2019 la contribution du commerce extérieur à la croissance rester neutre, tandis que les importations accéléreraient du fait de la légère progression de la demande finale, tirée par la consommation dynamique des ménages, et que les exportations, au contraire, ralentiraient en raison d'une demande mondiale moins importante.
Pour 2020, il est prévu dans le programme de stabilité que la contribution du commerce extérieur au PIB redevienne légèrement positive – de 0,1 point –, ce qui pourrait s'expliquer par une accélération de la demande mondiale, tandis que la demande intérieure, elle, pourrait ralentir par rapport à 2019. Toujours dans le scénario du Gouvernement, les performances à l'exportation de la France seraient stables en 2019 et en 2020. Ces prévisions peuvent étonner dans la mesure où nous commencions à avoir l'habitude de performances à l'exportation dégradées, mais il convient de rappeler que la tendance à la dégradation a été enrayée à partir de 2017, sans que l'on puisse identifier avec certitude la cause de cette rupture : les livraisons de paquebots, ainsi que celles effectuées par Airbus, peuvent constituer quelques éléments de réponse, mais les choses méritent d'être précisées et confirmées.
Je crois avoir répondu à toutes les questions, monsieur le président.