Je travaille beaucoup avec mon homologue allemand, Felix Klein, et il est vrai que si leur modèle, qui consiste à lier les actes à des tendances politiques, est intéressant, il pose une question de méthodologie et donne des résultats pas toujours limpides. En attribuant systématiquement une croix gammée taggée dont on n'identifie pas l'auteur à l'extrême droite, la proportion des actes antisémites imputés à l'extrême droite atteint 90 %. Nous ne procédons pas à ce type d'analyse, dont je ne suis pas certain qu'elle nous donnerait une meilleure connaissance du phénomène. Les actes antisémites dont on ne connaît pas les auteurs, comme les lettres anonymes de menace ou les agressions, sont nombreux et ne peuvent être imputés directement à l'extrême droite ou à d'autres nébuleuses.
En revanche, nous pouvons progresser encore dans le suivi des groupuscules sur internet, et notamment au niveau européen, puisqu'ils se parlent, se coordonnent, agissent ensemble et, probalement, bénéficient de financements ou de soutiens croisés à l'approche des échéances électorales, même si je n'en ai pas la preuve.
Le SCRT décompte les actes antisémites, les actes racistes et les actes antimusulmans mais il est vrai que nous ne raffinons pas davantage le traitement des données. Toutefois, dans des affaires très sensibles, nous prêtons attention aux auteurs et au contexte.
Je serai plus prudent que Jean-Yves Camus sur l'analyse de la recrudescence des actes antisémites. Il convient de ne pas banaliser les tags antisémites qu'on a vu fleurir ces six derniers mois, accompagnés d'un vocabulaire très précis, lié à l'extrême droite, comme les « Juden » peints sur les vitrines des restaurants Bagelstein.