Intervention de Didier Lallement

Réunion du jeudi 4 avril 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, qu'il s'agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale

Didier Lallement, préfet de police :

Mesdames et messieurs les députés, je m'exprime devant vous avec une ancienneté relative puisque, comme vous l'avez rappelé, madame la présidente, je ne suis à la préfecture de police de Paris que depuis quinze jours. Je ne parlerai évidemment que de ce que je fais depuis le 21, au moins en matière d'ordre public, et pas de ce qui s'est passé avant ma prise de fonctions.

Puisque votre commission a un objet beaucoup plus large que celui de l'ordre public, je donnerai quelques éléments de contexte sur le fonctionnement budgétaire de la préfecture de police, avec un préambule sur sa spécificité.

La préfecture de police est en effet un objet particulier, sui generis, dans le paysage administratif français : ni administration centrale ni totalement service déconcentré, elle date de 1800, c'est-à-dire avant la création de la police nationale. Le préfet de police est une autorité déconcentrée mais a en même temps des compétences municipales en matière de police générale. Même si des évolutions législatives récentes avec la loi du 28 février 2017 sur, entre autres, les compétences du maire en matière de circulation et de stationnement, il n'en reste pas moins que j'exerce l'autorité de police générale de droit commun qui est dans les autres communes exercée par le maire. Cela remonte au Premier Empire et à la nécessité pour un gouvernement d'avoir dans une autorité de police auprès de lui l'ensemble des fonctions permettant de maîtriser l'ordre public dans toutes ses facettes. Cela explique la structure administrative de la préfecture de police ainsi que sa structure budgétaire.

Les compétences du préfet de police ne se limitent pas seulement à Paris : elle s'étend également aux trois départements de la petite couronne, Seine-Saint-Denis, Hauts-de-Seine et Val-de-Marne, ainsi qu'aux deux aéroports de Roissy et d'Orly. Des modifications récentes, à partir de 2009, sont intervenues en ce sens.

Je dispose d'un ensemble de services assez large puisque, au-delà des compétences de police que j'évoque, je suis également le préfet de zone d'Île-de-France, ce qui inclut la grande couronne. J'ai à ce titre les mêmes compétences que tout autre préfet de zone. Il faut toujours avoir en mémoire cette approche spécifique de la préfecture de police pour en comprendre véritablement l'organisation et le fonctionnement.

Ces activités sont à l'image de la zone d'intervention de mes compétences. La préfecture de police, c'est chaque année près de 2,3 millions d'appels « police-secours », 515 000 interventions des services de police, 450 000 interventions pour la seule brigade des sapeurs-pompiers, qui est également une spécificité puisqu'elle est militaire et financée sur un budget spécial de la ville de Paris, comme, d'ailleurs, les autres compétences de police générale du préfet de police. Nous devons chaque année assurer la sécurité de 7 500 événements organisés sur la voie publique, qui rassemblent à peu près dix millions de personnes. Par exemple, s'ouvre aujourd'hui la foire du Trône, un événement que nous devons sécuriser.

La préfecture de police, c'est environ 21 % des effectifs de la police nationale et 26 % des faits de délinquance constatés chaque année en zone de police. La préfecture délivre également 100 000 titres de séjour. Nous avons instruit l'année dernière 9 500 demandes de naturalisation. C'est également la police des transports. C'est ainsi une administration qui doit faire face à des défis lourds et à des sollicitations qui ne sont pas uniquement celles de l'ordre public, j'y insiste particulièrement. Il est bien naturel que l'ordre public focalise les interrogations, voire, dans un certain nombre de cas, les inquiétudes, mais ce n'est pas la seule facette de notre activité.

La préfecture de police se compose de cinq directions dites actives, pour reprendre la terminologie policière de « services actifs de la police » : la police judiciaire, 2 200 fonctionnaires, la direction du renseignement, 1 800 fonctionnaires, la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), 20 000 effectifs, qu'on peut comparer, en termes d'activité, aux directions départementales de la sécurité publique (DDSP) en province, la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC), dont le directeur est ici présent, 5 500 effectifs, qui, comme son nom l'indique, vise à intervenir en matière d'ordre public dès lors qu'on sort de l'activité de police traditionnelle qu'exerce la DSPAP, enfin la direction opérationnelle des services techniques et logistiques, qui assure les supports.

Nous avons également deux directions plus administratives, la police générale, 950 personnes, et la direction des transports et de la protection des populations, 600 personnes, ainsi que des organisations plus anciennes, l'Institut médico-légal bien connu et l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, son laboratoire central, ou encore sa brigade de sapeurs-pompiers que j'évoquais à l'instant : 8 000 militaires qui interviennent sur Paris et la petite couronne.

Tout cela forme un ensemble assez important puisque la préfecture de police regroupe 43 000 agents. C'est ce qui explique les montants budgétaires afférents au bon fonctionnement de ce dispositif.

Deux budgets distincts financent la préfecture de police : le budget de l'État, pour les actions relatives à la sécurité et à l'ordre public, et le budget spécial, qui fait partie du budget de la ville de Paris mais qui n'est pas alimenté seulement par cette dernière puisqu'il l'est également par l'État et d'autres contributeurs. Ce budget spécial finance la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et les directions administratives générales que j'ai citées. Au total, les ressources de la préfecture de police s'élèvent à 4 milliards d'euros, dont quelque 3 milliards financés par l'État et 630 millions au titre du budget spécial, pour lequel la ville de Paris contribue à hauteur de 230 millions et l'État à hauteur de 130 millions, la différence étant comblée par les contributions d'autres collectivités locales – conseils généraux de la petite couronne, intercommunalités. C'est ce qui fait la particularité de ce budget spécial.

Au titre de mes compétences État, donc pour la partie d'un peu plus de 3 milliards, je suis, comme tous les préfets de zone, le responsable du budget opérationnel de programme (RBOP) à la fois du programme 176 « Police nationale » et du programme 152 « Gendarmerie nationale ». C'est là un mode de fonctionnement qu'on retrouve sur l'ensemble des zones de défense de France.

Voilà très rapidement, mesdames et messieurs les députés, les spécificités de la préfecture de police dans son fonctionnement, ses compétences et son mode de financement.

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