Intervention de Brune Poirson

Réunion du jeudi 11 avril 2019 à 9h00
Mission d'information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate

Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

Merci pour ces précisions. Je sais à quel point vous faites votre travail avec rigueur au sein de cette mission absolument essentielle, qui guide notre travail dans le cadre du plan de sortie du glyphosate et des produits phytosanitaires en général.

Monsieur Bony, loin de nous l'idée de ne récompenser que ceux qui seraient déjà les plus vertueux. Il s'agit au contraire de la recherche d'un équilibre faisant en sorte que plus on est vertueux et plus on est récompensé, et plus il est difficile d'être vertueux plus on est accompagné. Tel est l'objectif pour élever le niveau général et aller vers plus de vertu collective. C'est comme cela que nous construisons nos éléments de politique publique. J'ai eu l'occasion de revenir sur différents éléments concernant les financements ainsi que sur notre approche des négociations autour de la PAC.

S'agissant de l'interdiction de production en France des produits phytopharmaceutiques interdits en Europe, sur laquelle un amendement au projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE) est revenu, c'est une décision que j'ai publiquement regrettée. Mais j'ai dit aussi que c'était une décision qui à certains égards pouvait se comprendre. Je comprends le choix des députés qui ont souhaité défendre l'emploi, qui est un des éléments clés du programme du Président de la République, pour lequel nous avons tous fait campagne. C'est aussi un message que nous ont envoyé les « gilets jaunes », qui veulent un travail qui paye bien et qui ait du sens. J'ai donc dit que c'était une décision qui pouvait s'expliquer mais que je la regrettais, et je maintiens ce que j'ai dit.

Je crois surtout que ce type de décision ne doit pas masquer l'action quotidienne que nous menons pour réduire l'usage des produits phytopharmaceutiques en France. L'objet de notre discussion ici est de travailler ensemble à ce que nous soyons bien sûr la voie pour sortir du glyphosate d'ici à trois ans. Hier encore s'est tenu un comité « Écophyto » dans lequel nous nous sommes posé les questions qui fâchent, à savoir : pourquoi nous utilisons encore en France autant de produits phytopharmaceutiques et comment réduire considérablement l'utilisation de ces produits. Je rappelle que la France est le seul pays à avoir adopté une position aussi ambitieuse. En particulier, pour revenir à l'interdiction des produits phytopharmaceutiques produits en Europe mais qui y sont interdits, nous sommes les seuls à avoir adopté une position aussi ambitieuse. Ce que nous voulons à présent, c'est nous assurer que la production interdite à terme en France ne va pas déménager dans d'autres pays ; ce n'est pas l'objectif.

Il y a eu un décalage de 2022 à 2025 dans le projet de loi PACTE. Nous allons en sortir et l'administration de mon ministère travaille en lien étroit avec les pays africains signataires de la convention de Bamako pour les sensibiliser aux outils juridiques dont ils disposent pour proscrire l'importation sur leurs territoires de produits interdits en Europe. C'est une approche globale, au niveau international, au niveau européen, au niveau français. Même si je regrette la décision prise par voie d'amendement, cela ne doit pas masquer les efforts que nous déployons en matière de lutte contre la surutilisation de produits phytosanitaires.

Madame Toutut-Picard, nous partageons votre constat sur les difficultés pour que les financements atteignent les agriculteurs. C'est pourquoi nous avons donné l'instruction aux préfets de renforcer le déploiement et l'accès aux aides. L'objectif à présent est de travailler encore plus étroitement avec les préfets pour qu'ils continuent de mobiliser sur le terrain. Cela signifie qu'ils doivent aller au-delà des acteurs incontournables et classiques et identifier tous les agriculteurs qui pourraient avoir besoin d'aide. Cela fait partie de la feuille de route des préfets.

C'est la même logique qui nous a conduits à développer un centre de ressources et un site internet. L'objectif est que l'information soit accessible à chacun sans discrimination d'aucune sorte. C'est pourquoi nous voulons une start-up d'État pour mieux toucher tous les agriculteurs.

Je sais, Madame la députée, que vous êtes au service de tous les agriculteurs, y compris des plus petites exploitations, et que vous saurez faire remonter aux préfets et au ministère les difficultés que certains pourraient rencontrer dans votre circonscription. Je vous remercie de votre mobilisation sans faille depuis le début sur cette question.

En ce qui concerne la problématique des grands équilibres économiques, c'est en effet une crainte qui remonte de la part de beaucoup d'agriculteurs. C'est pour cette raison qu'il faut continuer de nous battre en Europe. Ce n'est pas parce que nous avons obtenu un vote sur le glyphosate qu'il ne faut pas poursuivre ce combat au niveau européen, sur le glyphosate comme sur l'ensemble des produits phytosanitaires. Dans le cadre de la PAC, notre objectif est de mettre le niveau d'exigence en Europe en phase avec les objectifs de la France, de façon que notre pays ne soit pas pénalisé mais ait au contraire un avantage compétitif. Je reste convaincue, et c'est la vision du Gouvernement, que l'agriculture française sera d'autant plus compétitive à terme – même si c'est difficile actuellement car nous sommes dans une période de transition – qu'elle sera plus respectueuse de l'environnement ; et plus elle réalisera sa transition rapidement, plus elle sera compétitive à terme car les citoyens français et européens veulent des produits de qualité et une agriculture respectueuse de l'environnement.

Nous voulons aussi édicter, dans le cadre de la PAC, une écoconditionnalité la plus élevée possible au niveau européen et applicable à tous les pays européens. C'est là-dessus que nous nous battons, et nous ne lâchons rien. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, Monsieur Didier Guillaume, dit d'ailleurs qu'il est le ministre de la transition, et je crois qu'il s'efforce de le mettre en application aussi bien dans ses interventions publiques que dans la réalité des actes. Il est accompagné en cela par le ministère de la santé et le ministère de la transition écologique et solidaire. C'est une action coordonnée que nous conduisons aussi sous la pression des députés, et je vous remercie à nouveau d'être présents aujourd'hui et de contrôler l'action que nous menons.

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