Va-t-on réussir à obtenir les 3 TWh supplémentaires attendus ? Vous avez compris, alors qu'on part de moins 3 TWh, que cela va être extrêmement compliqué, vu tous les freins au développement des petites centrales qu'on a identifiés. Je me permets d'insister sur les statistiques : quand on entend, d'un côté, que l'hydroélectricité « pullule » et « prolifère », alors que nous pensons qu'elle complètement freinée, il y a vraiment un problème d'objectivation des données. Il serait tout de même bon que chacun sache quelle est exactement la réalité du développement.
Ensuite, je voudrais reprendre la question des appels d'offres sous un angle un petit peu différent. D'une part, il y a déjà, dans l'appel d'offres, un pré-cadrage environnemental de la part de l'État et des services de l'environnement, de sorte que les candidats déposent un dossier qui inclut ce pré-cadrage environnemental et une notation faite par les services de l'État. D'autre part, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) évalue la qualité du dossier, sur la base des différents critères, avant de décider qui est lauréat. Ainsi, le dossier a déjà été parfaitement vu du point de vue de l'environnement. Par la suite, le dossier suit un déroulé classique : il arrive à l'instruction, c'est-à-dire qu'il y a tout de même une enquête publique, laissant toute possibilité aux acteurs de s'intéresser à ces projets, de donner leur avis et de prendre connaissance du dossier. Cela ne se développe donc pas dans le dos tout le monde ; la démarche est parfaitement transparente, au contraire.
Quant à l'intérêt de l'hydroélectricité dans la transition énergétique, un phénomène devient prégnant, à savoir que les citoyens eux-mêmes prennent en compte ce sujet-là. Ils veulent eux-mêmes produire leur électricité, ou alors veulent s'approvisionner en électricité verte. Pour ma part, j'assiste à un phénomène très récent pour les centrales que j'exploite aujourd'hui, à savoir une demande de petite hydroélectricité sur le marché, parce qu'il y a une véritable demande des citoyens, aujourd'hui, pour avoir de l'énergie verte produite à côté de chez eux. Cela fait un mois et demi que je reçois une demande par semaine de d'acteurs ou de fournisseurs divers, qui veulent de la petite hydroélectricité traçable avec ses garanties d'origine, dont ils savent qu'elle est produite sur telle centrale et à tel endroit. Voilà un phénomène assez nouveau : le fait que les citoyens eux-mêmes demandent aujourd'hui ce type d'énergie. Je pense que l'on va voir en partie le même phénomène avec les moulins : une volonté des acteurs d'être autonomes – outre l'aspect patrimonial, bien entendu, qui est indiscutable et qu'on salue tous. Toutes les nouvelles notions telles que l'énergie répartie ou l'autoconsommation, prévues par les directives européennes, mais déjà incluses dans notre réglementation, sont des sujets sur lesquels hydroélectricité a aussi son mot à dire.
L'hydroélectricité dans la transition énergétique ne s'apprécie pas simplement dans une dimension pondérale. Ce n'est pas simplement de la quantité. Son apport passe aussi par la manière dont l'hydroélectricité stabilise les courbes de charges d'énergies qui sont un petit peu plus variables qu'elle dans la journée. L'eau ne s'arrête pas de couler d'un instant à l'autre comme cela peut être le cas, pour d'autres équipements, si un nuage passe devant le soleil. Au fil de l'eau, l'hydroélectricité permet de lisser les courbes de charges et permet aux gestionnaires du réseau de distribution de repousser des investissements qu'il devrait faire plus rapidement, vu le développement important d'autres énergies renouvelables.
Ainsi, l'hydroélectricité permet une transition énergétique de bonne qualité, plus facile que dans d'autres pays européens. Car on aura toujours besoin de toutes les formes d'hydroélectricité pour stabiliser le réseau, que ce soit en effet aux heures de pointe ou s'agissant de l'énergie en base. Le plan de tension de la petite hydroélectricité participe parfaitement aux réglages de la tension sur le réseau. C'est un fait qui est absolument indiscutable. Il ne faut donc absolument pas oublier l'ensemble des services rendus par l'ensemble des formes d'hydroélectricité. Toutes sont nécessaires à la transition énergétique.