Madame la rapporteure, vous avez dit que la motion de rejet préalable vous gênait, mais je vous retourne le compliment : moi aussi, je suis gênée, voire embêtée. Monsieur le secrétaire d'État, vous dites que les agents de la fonction publique attendent ce texte ; je dois donc mal comprendre l'actualité. Le service des urgences de l'hôpital de Bordeaux est le trente-deuxième à se mettre en grève : est-ce parce que les personnels attendent ce texte avec trop d'impatience ? Les enseignants du mouvement des stylos rouges se sont-ils mis en grève pour accélérer l'adoption de ce texte ? Tous les autres fonctionnaires qui se sont mis en grève sont-ils impatients de voir arriver ce projet de loi ? Je ne le pense pas. On croirait presque que vous nous prenez pour des imbéciles, parce que lorsqu'on discute du quotidien avec ces agents de la fonction publique, on comprend que ce n'est vraiment pas ce qu'ils attendent. En général, les fonctionnaires travaillent pour l'État, pour les autres ; ils attendent de pouvoir rendre un vrai service public aux autres, et certainement pas un service public amoindri, comme vous le proposez avec ce texte.
Quand je rencontre les fonctionnaires de la fonction publique hospitalière, un peu partout en grève – j'ai souvent évoqué ici mes collègues soignants, mais il faudrait mentionner également les agents des services techniques – , ils attendent des moyens supplémentaires, des moyens humains et financiers pour en finir avec la maltraitance institutionnelle.
Quand j'entends les agents territoriaux – les personnels des crèches vont se mettre en grève parce qu'on va désormais demander à une personne de s'occuper de dix nourrissons – , bizarrement, ils ne me disent pas attendre ce texte avec impatience ; ils nous rappellent qu'on leur demande toujours plus avec toujours moins et que leur travail devient tout simplement impossible.
Quant aux agents de la fonction publique d'État, on pense aux fonctionnaires de police, épuisés après tous ces week-ends… Vous allez répondre que c'est la faute des gilets jaunes, sauf que si les policiers étaient en nombre suffisant, ils organiseraient des roulements grâce auxquels ils pourraient se reposer.
Je suis donc moi aussi gênée, et c'est pourquoi nous voterons en faveur de la motion de rejet préalable défendue par notre collègue Marleix.