Cet amendement du Gouvernement nous surprend à un double titre. Premièrement, nous ne voulons pas d'une formation spécialisée. Au contraire, nous avons unanimement considéré qu'il fallait un collège unique pour des raisons que beaucoup d'entre nous ont exprimées et sur lesquelles je ne reviendrai pas. Deuxièmement, je comprends que le Gouvernement cède à la tentation de nommer des personnalités et craigne de laisser une pleine indépendance à la Haute Autorité. Comme le disait ma collègue Marietta Karamanli, lorsque nous avons créé la HATVP, en 2013, nous l'avons vraiment voulue indépendante. En 2016, nous avons voté une loi fondatrice sur la déontologie des fonctionnaires, qui fait date et qui est reconnue comme un texte précurseur – je tiens à le rappeler. Et lorsque, la même année, nous avons travaillé sur la loi Sapin 2, nous nous sommes interrogés sur la coexistence des collèges de déontologie et de la HATVP. Mais c'était encore trop tôt : il fallait attendre trois ans, laps de temps nécessaire pour que l'autorité démontre sa capacité à régler les questions difficiles qui lui étaient soumises. C'est à présent chose faite, et cela nous permet d'envisager les choses sereinement. Même si nous appartenons à l'opposition, il me semble que nous sommes aussi des bâtisseurs et que nous entendons, avec l'ensemble des groupes de l'Assemblée, construire un édifice qui constituera l'aboutissement de ce que nous avons mis en place en 2013 et en 2016.
Je n'ai donc l'impression de trahir personne et suis légitime, avec mon groupe, à défendre une HATVP constituée d'un collège unique et tête de réseau en matière de déontologie. En effet, cette dernière repose sur des principes, lesquels ne doivent pas être posés par l'administration, mais par une autorité indépendante.
Certes, deux membres sur treize nommés par le Gouvernement ne sont pas de nature à bouleverser la Haute Autorité, mais d'autres amendements tentent d'écorner son indépendance. Nous ne parlons pas de fonctionnaires qui viendraient corrompre la HATVP, mais nous sommes là dans ce que l'on appelle l'impartialité objective et subjective. La nature de la nomination fait partie de l'intégrité.
La HATVP a à connaître de la déontologie des fonctionnaires, si bien que leur employeur doit rester à l'extérieur. Il doit, de son côté, appliquer la déontologie définie par la HATVP, afin de déployer les bonnes pratiques et veiller à ce que les agents, contractuels ou fonctionnaires, mettent en oeuvre les principes dégagés par la Haute Autorité. Les représentants du Gouvernement n'y ont donc pas leur place. Aucun membre du CSA n'est d'ailleurs nommé par décret. C'est certes le cas de certaines personnalités siégeant au collège de la CNIL, mais la Commission nationale de l'informatique et des libertés est la plus ancienne de toutes les autorités administratives indépendantes ; en outre, elle ne traite pas d'un sujet sur lequel il faut afficher une indépendance.
En dépit des avancées et du travail plutôt consensuel que la majorité et l'opposition réalisent sur cette question, nous sommes réticents à l'égard de cet amendement, monsieur le secrétaire d'État.