Merci pour votre intervention, monsieur Noblecourt.
Je voudrais d'abord revenir sur la place prépondérante qu'il faudrait accorder au soutien à la parentalité, selon vous. Plusieurs des personnes que nous avons déjà entendues nous ont dit, a contrario, qu'il faudrait plutôt se centrer sur le besoin de l'enfant et sur sa stabilité. La conservation de la relation parentale viendrait ensuite : il faudrait la maintenir quand c'est possible, évidemment, mais pas à tout prix comme vous l'avez indiqué.
Par ailleurs, nous avons reçu un certain nombre d'enfants qui nous ont bien expliqué que cette volonté de garder le lien parental à tout prix avait été pour eux synonyme de ruptures de parcours – lorsque les parents déménageaient, par exemple, il fallait qu'ils déménagent eux aussi.
J'aimerais donc être bien sûre d'avoir compris votre propos : pour vous, est-ce bien la place de l'enfant qui prime ? J'entends, évidemment, qu'il faut aussi aider les parents mais, pour moi, il est plus important de s'assurer que les droits des enfants sont respectés. C'est d'ailleurs ce que nous a dit la Défenseure des enfants la semaine dernière.
Comme vous l'avez dit, nous avons volontairement limité le champ de notre mission, en raison du travail de Brigitte Bourguignon. Je tiens quand même à rebondir sur vos propos. Il est vrai que vous avez travaillé avec des enfants qui sont passés par l'aide sociale à l'enfance, mais ce matin encore, dans Libération, Mme Fouzy Mathey Kikadidi indiquait sa frustration au regard du socle minimaliste qui est proposé. Je la rejoins. J'entends ce que vous indiquez concernant l'insertion, notamment, mais il faudra m'expliquer comment un jeune qui sort à 18 ans de l'ASE peut poursuivre ses études en ayant seulement une bourse et l'aide personnalisée au logement (APL). À mon avis, il va quand même falloir un peu plus d'aide financière, sinon on est sûr de l'échec.
J'aimerais savoir si des sanctions sont prévues en cas de non-respect de la contractualisation par les départements.
Je dois aussi vous dire que je suis un peu gênée. En effet, nous sommes dans un pays de droits ; le fait que vous vous opposiez à ce que l'on aide les enfants de plus de 18 ans à avoir des droits m'interpelle donc. Vous dites que 2 000 à 4 000 euros, c'est beaucoup. Je pense pour ma part que les jeunes en question n'ont pas seulement besoin d'un éducateur avec lequel ils parlent au téléphone : ils doivent manger et avoir un certain équilibre. Quant au fait de les lancer tout de suite dans les dispositifs d'insertion, je ne considère pas que ce soit adapté car ils n'ont pas forcément des problèmes d'insertion : c'est simplement leur « parent » – à savoir le département – qui n'a pas toujours fait son travail jusqu'au bout. Or je ne vois pas ce que votre stratégie va changer pour ces jeunes.
Vous dites qu'il faut commencer doucement, être constructif, ne pas contrarier les départements, mais quand on voit les résultats du travail commun et constructif mené depuis des années, quand on observe les résultats de la politique de l'enfance, je ne suis pas sûre que le socle minimaliste envisagé permette de changer quelque chose. Actuellement, 70 % des enfants sortent de l'ASE sans avoir de diplôme : en auront-ils un grâce au dispositif ? Un sans-domicile fixe sur quatre est un ancien enfant placé : cela va-t-il changer ?
J'aimerais donc que vous nous répondiez de manière un peu plus approfondie sur ces aspects. Je milite pour ma part en faveur d'une démarche préventive. Même si cela coûte cher, n'est-il pas plus intéressant de consacrer de l'argent à ces jeunes quand ils ont entre 18 et 21 ans plutôt que de les avoir tout le reste de leur vie dans les dispositifs d'aide sociale ?