Intervention de Sylvia Pinel

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

La réforme du Règlement de l'Assemblée nationale est une nécessité, nous en convenons ; la crise que nous traversons le rappelle d'ailleurs de façon criante. Nos concitoyens ne se retrouvent plus dans les lois que nous adoptons, qui leur paraissent souvent éloignées de leur réalité quotidienne et peu claires. De plus, l'image que notre assemblée renvoie à nos concitoyens est en décalage avec la réalité de notre engagement au service de l'intérêt général : un hémicycle quasi désert lors des questions orales sans débat, des débats extrêmement longs, un déséquilibre entre les interventions de la majorité et celles des minorités et des oppositions, ou encore des députés non inscrits qui peinent à peser dans les débats.

Tout cela pose la question de l'efficacité de notre démocratie et de la pérennité d'un modèle qui apparaît largement inadapté. Il est donc essentiel que nous renforcions la qualité de notre travail, que nos débats s'appuient sur la volonté d'améliorer les textes de loi et non sur une logique visant à « faire du chiffre » pour monter dans les classements de certains sites internet. Il faut redonner du poids à la démocratie représentative en la rénovant : c'est tout l'enjeu, de notre point de vue, de la réforme du Règlement de notre assemblée. Je me réjouis que les réunions du groupe de travail créé par le président de l'Assemblée, qui rassemblait les différents groupes politiques, aient débouché sur un texte que le groupe Libertés et Territoires considère comme équilibré. Je veux ici saluer la méthode retenue. Ce texte fait avancer les droits des groupes d'opposition et minoritaires et donne donc du sens à la démocratie représentative, tout en associant davantage – et mieux – nos concitoyens à la fabrique de la loi. Il va donc, selon nous, dans la bonne direction. Toutefois, certaines de ses dispositions méritent d'être supprimées, précisées ou rectifiées. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé une quinzaine d'amendements, dans un souci d'amélioration de notre Règlement et dans un état d'esprit constructif.

Parmi les dispositions à supprimer, il y a celle qui est relative à la limitation du nombre de suspensions de séance. Les suspensions de séance justifiées ont pour objectif non pas de faire de l'obstruction, mais au contraire de permettre l'examen des textes dans de meilleures conditions. Elles peuvent constituer des respirations dans nos débats, lesquels sont parfois houleux. Elles sont également un moyen de se concerter pour parvenir ensemble à une solution plus consensuelle.

Parmi les dispositions à préciser, nous pensons nécessaire d'encadrer le nouveau dispositif des contributions écrites, à l'image de ce qui a été mis en place pour les questions écrites ou de ce qui existe au Parlement européen.

Parmi les dispositions à rectifier et qui sont pour nous des points durs, rencontrant notre franche hostilité, il y a celle qui est relative à l'harmonisation du temps de parole dans les discussions générales. Si nous nous réjouissons que tous les groupes parlementaires disposent du même temps de parole, celui-ci ne doit pas pour autant être ramené à un orateur pour cinq minutes. Certains textes nécessitent un temps plus long au regard de leur importance ou de leur volume. Qui plus est, il me semble curieux qu'on refuse le pluralisme, l'expression d'une opinion différenciée, pourtant nécessaires au débat parlementaire : c'est justement cela qui permet d'enrichir et de nourrir la réflexion collective.

C'est dans cet état d'esprit que nous proposerons un certain nombre d'amendements. Nous souhaitons, monsieur le rapporteur, que nos débats en commission nous permettent d'aller plus loin et de faire mieux pour renforcer l'efficacité de nos travaux.

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