Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du mardi 21 mai 2019 à 9h30
Questions orales sans débat — Financement des ateliers sociolinguistiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Ma question, qui s'adressait à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, porte sur les ateliers sociolinguistiques.

Depuis le début de mon mandat, je suis interpellée par de nombreuses associations sur le resserrement par le ministère de l'intérieur du financement des ateliers sociolinguistiques – les ASL – aux seuls étrangers primo-arrivants. Si nous voulions interroger Mme la ministre de la cohésion des territoires, c'est parce qu'il nous semble problématique de faire dépendre ce financement du seul ministère de l'intérieur, alors que les ateliers sociolinguistiques contribuent, de notre point de vue, à l'insertion des personnes étrangères souhaitant apprendre le français ou améliorer leur connaissance du français, donc à la cohésion des territoires. Le choix de resserrer ce financement, qui répond à une logique purement comptable, a au moins deux conséquences majeures et néfastes.

Le premier effet néfaste concerne les personnes désireuses d'apprendre. En effet, cette décision réduit fortement l'accès aux ateliers sociolinguistiques des personnes résidant depuis longtemps sur le territoire, puisqu'ils sont désormais réservés aux primo-arrivants. Un centre social de ma circonscription, qui organise beaucoup d'ateliers de ce type, estime ainsi que seuls 12 % de leur public y sont éligibles. Ainsi, bien que la demande soit extrêmement forte, l'accès est restreint du fait des nouveaux critères édictés en 2017.

Le deuxième effet néfaste concerne les associations proposant des cours de français. Toutes les argumentations techniques ne pourront pas masquer la réalité : les associations ont moins de moyens pour mettre en oeuvre ces ateliers. Alors qu'elles courent déjà après des bouts de chandelles pour réussir à proposer ces activités d'intérêt général, elles se retrouvent obligées de refuser des personnes qui auraient pourtant besoin de ces formations. Elles ont d'ailleurs tiré la sonnette d'alarme à plusieurs reprises, avec le mouvement Le français pour tous, en organisant des rassemblements. Je tiens à saluer l'action sur le terrain, au quotidien, de ces associations et de leurs membres, bénévoles dans leur grande majorité, qui assurent le lien indispensable pour l'apprentissage de la langue française, enjeu pour la cohésion sociale et territoriale. Nous estimons qu'il est inconcevable de restreindre l'accès à la langue pour les personnes arrivées il y a plusieurs années, souvent des femmes, et ayant décidé d'améliorer leur connaissance de la langue pour s'insérer plus facilement dans le tissu social et économique. En février 2018, le rapport Taché avait d'ailleurs préconisé de permettre l'accès de toutes et tous à la langue, sans critère administratif, je le rappelle.

Les ateliers sociolinguistiques permettent chaque année à des milliers de personnes d'améliorer leur pratique de la langue, dans le cadre du projet qu'elles déterminent elles-mêmes. Le portage associatif des cours de français permet, au-delà des compétences linguistiques, de travailler sur la citoyenneté et l'engagement collectif, dans une logique d'insertion locale.

En restreignant l'accès à la langue française et en éparpillant les budgets alloués aux associations, votre gouvernement fait le choix, une fois de plus, d'opposer les publics, dans la lignée des politiques menées depuis 2017. Nous souhaitons donc savoir quelle réponse vous êtes prêts à apporter à ces associations, qui fournissent un service essentiel pour la cohésion sociale, pour leur permettre de face à leurs difficultés budgétaires.

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