J'ai mis un instant à rejoindre la tribune, monsieur le président, car j'étais distraite par l'arrivée de la rédactrice du Quai d'Orsay pour la Suisse, que j'ai eu la chance de rencontrer il y a quelques jours, qui travaille au quotidien avec un chien d'aveugle.
Les accords de coopération transfrontalière que nous examinons illustrent l'importance des zones transfrontalières dans la construction du projet européen. Ces espaces sont des lieux d'échanges et de vies quotidiennes partagées entre des citoyens qui n'ont pas la même nationalité : ils sont à l'image du projet européen qui vise à construire une communauté de vie collective et apaisée autour de projets concrets. Nous débattons de l'amorce d'une coopération entre des services publics essentiels à la vie quotidienne que sont les services de santé.
Les accords-cadres de coopération sanitaire transfrontalière signés entre la France et la Suisse, le 27 septembre 2016, et entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg, le 21 novembre 2016 résultent de négociations engagées en 2014 afin de développer les synergies en matière d'offre de soins et de lever les difficultés, notamment administratives, qui obèrent la coopération entre établissements de santé.
En favorisant la mobilité des patients et des professionnels de santé dans les régions frontalières du Luxembourg et de la Suisse, les coopérations développées en matière de santé visent à apporter un bénéfice concret et direct aux citoyens : il s'agit de leur permettre de profiter de soins de qualité au plus près de leur lieu de résidence, tant dans un contexte de secours d'urgence – l'intérêt de cette coopération est, dans ce cas, particulièrement clair – , que de soins programmés ou de pathologies chroniques.
L'objectif de ces accords-cadres est ainsi d'assurer un meilleur accès à des soins de qualité pour les bassins de vie autour de la frontière, en garantissant une continuité des soins et le recours le plus rapide aux secours d'urgence, tout en favorisant la mutualisation des connaissances, des pratiques, et des moyens humains et matériels.
Ces accords-cadres, limités aux régions transfrontalières, entendent également donner un cadre à la conclusion de conventions locales de coopération sanitaire entre acteurs de santé français, d'un côté, et luxembourgeois ou suisses, de l'autre, en fonction des déficits et besoins constatés. De très longues discussions ont déjà eu lieu dans l'hémicycle sur la présence médicale ; ces textes nous apportent en la matière des réponses très claires et concrètes en rendant possible le partage des moyens médicaux de part et d'autre d'une frontière. Si un pays manque de telle spécialité médicale, les habitants de la zone frontalière pourront avoir accès aux spécialistes du pays voisin. En effet, les conventions locales pourront organiser non seulement l'intervention transfrontalière des secours d'urgence, en facilitant la mutualisation des moyens, mais aussi la coopération hospitalière pour certaines spécialités médicales, ce qui permettra une offre de soins de qualité.
La question transfrontalière est au coeur des activités d'une partie des équipes de la direction de l'Union européenne du Quai d'Orsay qui dispose d'un ambassadeur pour les questions transfrontalières. Au-delà des coopérations telle que celle dont nous débattons aujourd'hui, le traité d'Aix-la-Chapelle, dont nous avons déjà longuement parlé, a la particularité de prévoir la mise en oeuvre de projets très concrets, industriels ou citoyens par exemple, qui permettent de faciliter la vie de ceux qui vivent aujourd'hui de part et d'autre d'une ligne devenue, au quotidien, presque imaginaire ou artificielle, même si elle garde son importance politique puisque nous conservons nos frontières et que nos nations demeurent – notre Europe est, avant tout, une Europe des États qui mettent des moyens en commun. J'espère que nos débats sur ce projet européen et concret seront fructueux.