Les relations avec l'ASE ont été souvent très tendues parce que l'avocat était complètement méconnu, c'était une espèce d'OVNI, au point que si les éducateurs PJJ viennent toujours nous saluer et discuter avec nous, c'est rarement le cas des éducateurs ASE. Cela peut paraître anodin, mais une telle situation témoigne d'une certaine crispation. À force d'intervenir progressivement dans les dossiers, de les appeler pour obtenir des informations, et parce que des formations communes sont organisées dans les barreaux, on arrive progressivement à une amélioration des relations, mais cela reste parfois encore difficile, notamment pour avoir connaissance des rapports, qui sont souvent rédigés tardivement et qui arrivent tardivement dans les juridictions. Nous avons le droit d'en avoir une copie, mais dans la réalité les avocats, voire le juge, les reçoivent souvent le jour de l'audience ou encore le lendemain.
Je dirai un mot de la désignation de l'avocat selon que les enfants sont discernants ou non discernants. D'aucuns me demanderont quel est l'intérêt pour un enfant encore très jeune d'être assisté d'un avocat. Le conseil départemental a tendance à dire que le département est le garant de l'intérêt de l'enfant, le juge aura également cette position.
J'ai à l'esprit le cas d'un enfant dont le dossier est très récemment passé devant la cour d'appel. Je préconisais, le parquet également – c'est la décision qui avait été prise par le juge – le maintien dans une famille d'accueil d'urgence où il devait rester plus d'un an. L'enfant s'y épanouissait après avoir été extrêmement abîmé par une situation sur laquelle je ne m'étendrai pas. Il commençait à se stabiliser, à aller un peu mieux, il était scolarisé. Or on voulait le changer de famille d'accueil et l'envoyer fort loin, au détriment de sa situation générale, au motif que la famille était une famille d'urgence.
Le juge des enfants a considéré qu'il devait rester dans cette famille d'accueil, le conseil départemental a interjeté appel et l'avocat de l'enfant a pu intervenir. L'enfant était considéré comme non discernant mais il s'exprimait malgré tout avec ses mots. J'ai pu porter devant le juge la situation et l'intérêt qui me semblait être celui de l'enfant point de vue qui n'était pas celui défendu par le conseil départemental. Par conséquent, il me semble que l'avocat peut jouer un rôle intéressant, y compris pour des enfants parfois très jeunes, ce qui, en l'occurrence, était le cas de cet enfant qui avait trois ans.