Intervention de Pierrine Robin

Réunion du jeudi 9 mai 2019 à 14h00
Mission d'information sur l'aide sociale à l'enfance

Pierrine Robin :

Il est très compliqué de porter une appréciation sur ce que sera la vie future de ces jeunes. Cela d'autant plus que les systèmes allemand et français de protection de l'enfance ne concernent pas le même nombre et le même type d'enfants.

Par ailleurs, depuis plusieurs années, l'Allemagne connaît un démantèlement de l'accompagnement à l'âge adulte. Les jeunes sont effets renvoyés au droit commun, ce qui est à l'origine de beaucoup de problèmes d'insertion au moment de la transition vers l'âge adulte, car ils sont adressés à des structures comparables à Pôle Emploi, et ne bénéficient plus de droits particuliers.

S'agissant des violences entre enfants dans les institutions, les entretiens que nous avons conduits au cours de notre recherche sur la transition à l'âge adulte ainsi qu'au cours de celle portant sur l'accueil ont montré qu'il y a beaucoup de violences entre enfants, mais aussi entre enfants et éducateurs. À l'occasion de la présentation de résultats globaux de recherche, l'évocation de ces situations est toujours délicate, alors même qu'elles prennent beaucoup de place.

Au cours de ma recherche par les pairs sur la transition à l'âge adulte, j'ai été très frappée par l'importance des collectifs d'enfants au sein des processus de changement de famille d'accueil. Dans beaucoup de cas, le changement de famille ou de dispositif d'accueil est provoqué par la venue d'un nouvel enfant présentant des particularités comme un handicap ou une couleur de peau. Cet enfant prend alors une place au sein de la famille, particulièrement lorsqu'il est adoptable, ce qui crée des liens différents et entraîne parfois le départ de celui qui était déjà là.

Beaucoup de changements de lieu d'accueil sont ainsi évoqués comme étant liés à l'arrivée d'un nouvel enfant et aux relations entre enfants. De même, des sorties de familles de naissance constatées étaient, elles aussi, liées à des conflits entre enfants pouvant notamment ne pas être issus du même père biologique ou social, ou à des conflits portant sur la reconnaissance au sein de la famille.

Dans la recherche sur les pairs, un seul groupe – le troisième –, celui des enfants aux liens suspendus, qui arrivent de façon intermédiaire dans les dispositifs, estime avoir pu reconstruire des liens avec les parents au moment de la sortie des dispositifs. En revanche, au sein des deux premiers groupes étudiés, les liens avec les parents sont peu présents.

Les enfants du premier groupe évoquent la difficulté à poursuivre des relations avec les parents alors qu'une séparation longue a eu lieu et que les parents présentent parfois des maladies psychiques et mentales, ce qui rend hypothétique la création de lien du fait de la présence-absence des intéressés. Par ailleurs, lorsque les enfants ont connu une forte mobilité sociale, ce qui n'est pas le cas des parents, il est difficile de continuer à construire des liens et des relations sociales dans de telles situations.

S'agissant du groupe des enfants arrivant tardivement dans le système, leur histoire familiale est telle qu'il n'y a déjà plus de liens possibles, car ils sont allés au bout de ce qu'il pouvait se produire au sein de leur famille de naissance.

En définitive, les seuls jeunes auxquels la prise en charge institutionnelle a permis de reconstruire des liens avec leur famille sont ceux de la catégorie intermédiaire, arrivés dans le dispositif à l'âge de 11 ans.

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