Monsieur Le Maire, je vous remercie pour votre intervention, que j'ai trouvée intéressante, même si notre désaccord est radical. Reste qu'entre Tocqueville et Marx, il y a eu des compromis au cours de l'histoire. Certains ont été imposés au capitalisme, notamment après le Conseil national de la Résistance, qui l'ont obligé à accepter des règles, à rentrer dans les clous. Il s'agissait que sa logique propre – accumuler le profit – ne se fasse pas au détriment de l'intérêt général de la société. Pour aller vite, on a créé une économie avec marché.
Vous nous proposez de revenir aux années quatre-vingt – à Thatcher, à Reagan – en considérant que l'accumulation des intérêts particuliers dans le libre-échange, dans le marché, fera finalement le bonheur de tous.
Laissons de côté l'issue de la première mondialisation capitaliste, avant 1914, qui a tout de même déclenché deux guerres mondiales et la crise de 1929, pour examiner ce qui se passe aujourd'hui. Votre histoire est une vis sans fin, parce que le capitalisme ne connaît aucune morale, ni bonne ni mauvaise. Sa seule logique est l'accumulation des profits. Dès lors que c'est son seul critère, on peut toujours espérer que le capital s'investira dans tel placement, mais il ira là où la rentabilité est la plus élevée.
Plus récemment, entre 2007 et 2016, la France a pratiquement détenu le record d'Europe en matière d'accroissement des inégalités. Pendant cette période, les inégalités de revenus ont augmenté de plus de 9 %. C'est encore ce que vous nous proposez. Vous voulez continuer à mettre sans fin de l'argent devant le totem, mus par la croyance mystique que l'investissement s'orientera tout d'un coup de manière positive ; mais cela ne se passe jamais comme ça.