Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 13h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

En effet, j'ai présenté ce matin en Conseil des ministres le projet de loi de règlement qui sera soumis à l'approbation de l'Assemblée et du Sénat dans les prochaines semaines. Avant de me présenter cet après-midi devant la haute assemblée, j'ai plaisir à vous retrouver pour évoquer ces résultats définitifs de l'État qui, avec ces rapports annuels de performances que nous vous avons transmis le plus en amont possible, serviront de base à la deuxième édition – vous l'avez dit, monsieur le président – du printemps de l'évaluation, dont j'ai pu prendre connaissance du programme, extrêmement ambitieux. Vous avez bien voulu souligner le fait que nous avons avancé notre calendrier pour permettre aux parlementaires de travailler le plus en amont possible. Je tiens là une promesse faite devant votre commission l'année dernière. Je crois que c'est une bonne chose effectivement que d'avoir ces quinze jours d'avance pour que chacun, singulièrement le rapporteur général et ses services, puisse travailler dans de bonnes conditions.

La mise à disposition de la base de données « Chorus » permettra d'accompagner le renforcement de votre rôle d'évaluation des politiques publiques, tout spécifiquement dans sa dimension budgétaire et financière ; je m'y étais engagé. De la même manière, j'ai souhaité que soit mise à la disposition du grand public, en open data, pour la première fois un grand nombre de données détaillées de comptabilité générale. Cet effort de transparence s'ajoute ainsi à notre effort de sincérité de ces deux dernières années, aussi bien du point de vue de la budgétisation initiale que de notre endettement.

D'autres améliorations sont encore possibles à l'avenir. Je crois notamment qu'il serait opportun que la loi de règlement puisse également tenir compte des résultats de nos comptes sociaux. Je sais qu'il s'agit là d'une proposition que Didier Migaud à laquelle vous êtes naturellement sensible, monsieur le président – le ministre des comptes publics que je suis l'est aussi.

Même partiels, c'est-à-dire ne concernant que l'État, ces résultats concrets démontrent la crédibilité de la stratégie du Gouvernement et de la majorité parlementaire pour redresser nos comptes publics. En 2018, le déficit des administrations publiques s'élève ainsi à 2,5 % du produit intérieur brut (PIB), alors qu'en loi de finances l'objectif était de 2,8 % ; c'est la première fois depuis dix ans que notre pays parvient à contenir son déficit public sous le seuil de 3 % du PIB. Autre motif de satisfaction et de fierté : un déficit de 2,5 % en 2018, qui intègre celui du système ferroviaire – la Cour des Comptes l'a évoqué ce matin. C'est la preuve que les engagements du Gouvernement ont été tenus, et même au-delà.

Si les engagements ont été tenus, c'est d'abord grâce aux chantiers de transformation de l'action publique qui nous ont permis de mieux maîtriser la dépense publique. En 2018, pour la première fois depuis des décennies, celle-ci a décru en volume. Le ratio des dépenses publiques hors crédits d'impôt rapportées au PIB est ainsi passé de 55 % à 54,4 %. Cela rend d'autant plus crédible l'objectif d'une baisse de 3 points de ce ratio d'ici à la fin du quinquennat, que se sont fixés le Président de la République et la majorité parlementaire.

S'agissant précisément du budget général de l'État, vous me permettrez d'ajouter que nous sommes parvenus à respecter nos objectifs en dépit de mauvaises nouvelles sur lesquelles le Gouvernement n'a pas de prise. Je pense ici à la charge de la dette ainsi qu'au prélèvement au profit de l'Union européenne qui, par le passé, permettaient à nos gouvernements – y compris le nôtre en 2017, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités – de tenir peu ou prou leurs objectifs grâce à de bonnes nouvelles sur ces deux postes de dépenses. L'an passé, malgré une révision à la hausse en cours d'année de la charge de la dette comme de notre contribution au budget européen, le Gouvernement a strictement tenu l'objectif de dépenses qu'il s'était fixé en loi de finances initiale sur les dépenses totales de l'État, soit 425,4 milliards d'euros. Ce résultat n'a pu être obtenu que grâce aux efforts déployés par le Gouvernement, singulièrement par mon cabinet et mes services, sur la dépense dite « pilotable ». De fait, le Gouvernement fait mieux encore que les prévisions formulées à l'occasion du projet de loi de finances rectificative soumis à votre Assemblée au mois de novembre dernier puisque la dépense est inférieure non pas de 600 millions d'euros à la cible fixée en loi de finances initiale mais bien de 1,4 milliard d'euros. Vos questions, mesdames et messieurs les députés, me permettront sans doute de détailler cette moindre consommation des crédits.

J'ajoute que cette maîtrise de la dépense publique ne se limite pas à la dépense de l'État, mais également à la sphère sociale, puisque l'objectif national de dépenses d'assurance maladie a été respecté pour la neuvième année consécutive, ce qui a permis le redéploiement de 300 millions d'euros en faveur de l'hôpital – cela a désendetté les hôpitaux publics. De la même manière, la contractualisation financière avec les plus grandes collectivités, dont beaucoup, ici, prétendaient qu'elle n'était pas constitutionnelle ni ne serait respectée, ce qui donnerait à la Commission européenne matière à reproches, a fonctionné, et même très bien, puisque les dépenses de fonctionnement de celles-ci ont diminué de 0,2 %, bien en deçà de l'objectif fixé par le pacte de Cahors et sans aucune baisse des dotations aux collectivités locales – cela change des méthodes des dernières années. Le Gouvernement aura d'ailleurs l'occasion de dresser le bilan de l'application des dispositifs de maîtrise des dépenses locales pour l'année 2018 avant le débat d'orientation des finances publiques tandis qu'un second bilan développera bien les résultats obtenus par catégorie de collectivités avant l'examen du projet de loi de finances pour l'année 2020.

Si nos engagements ont été tenus, c'est aussi grâce une budgétisation prudente, sincère et plus respectueuse de l'autorisation parlementaire que par le passé. L'année 2018 a ainsi fait l'objet d'une gestion budgétaire moins heurtée que les précédentes, avec un faible taux de mise en réserve des crédits – 3 % contre 8 % les années précédentes, 4 milliards d'euros au lieu de 10 milliards d'euros les années précédentes – et l'absence de décret d'avance en fin d'année. Je crois, monsieur le président de la commission des finances, que, depuis votre première élection à l'Assemblée nationale, vous n'avez pas connu une année budgétaire sans décret d'avance – cela inclut les années où vous étiez membre du Gouvernement... C'est bien la première fois que cela arrive : promesse a été tenue – et est toujours tenue à cette date de l'année 2019 – de ne pas présenter de décret d'avance. Je rappelle que je n'ai procédé au dégel d'aucun crédit, à l'exception de ceux de la Cour des comptes. Cela montre que nous nous en tenons à notre démarche de sincérisation et de responsabilité budgétaires.

Pourquoi pas de décrets d'avance ? Parce que, désormais, aidés par les rapports de la Cour des comptes, les rapports des parlementaires et les évaluations de nos propres services, nous mettons les crédits nécessaires en face des dépenses que nous savons certaines. Nous ne sous-budgétisons pas et nous demandons ce qui est nécessaire, à l'euro près – si tant est que ce soit possible pour des budgets si importants –, au fonctionnement du service public.

Ainsi, pour la première fois depuis l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances, l'intégralité des ouvertures et des annulations sur le budget général a été décidée par le Parlement et uniquement par le Parlement, que ce soit dans le cadre du projet de loi de finances initiale ou dans celui du projet de loi de finances rectificative. De la même manière, je le répète, aucun dégel de crédit n'a été rendu nécessaire au cours de ce premier semestre.

J'ajoute, pour répondre à une interrogation que je sais bien légitime de votre commission et de votre président, avec qui j'ai évoqué l'erreur d'imputation des droits de mutations aux collectivités locales, que le plan d'action mis en oeuvre pour éviter que celle-ci ne se reproduise a permis de réduire, au 31 décembre 2018, le solde du « compte de tiers » en matière de droits de mutation au niveau constaté à la fin de l'année 2016, soit son niveau résiduel. La direction générale des finances publiques (DGFiP) a par ailleurs, à ma demande – à la suite, notamment, de l'interpellation de M. le président de la commission des finances –, fait évoluer son système d'information afin de disposer, à la fin de chaque semestre, d'un suivi quotidien du compte de tiers, qui est à la disposition de M. le président de la commission des finances, et de simplifier la liquidation des droits de mutation. Cette erreur ne pourra donc pas se reproduire.

J'en viens à présent aux recettes de l'État, dont vous conviendrez aussi qu'elles sont conformes à nos prévisions. Elles sont même supérieures de 8,8 milliards d'euros à ce que nous avions prévu en loi de finances, et ce malgré les grèves de la SNCF et le mouvement dit des « gilets jaunes ». J'y vois là le signe de la solidité de notre économie, puisque ce dynamisme s'explique pour moitié par l'impôt sur les sociétés et pour moitié par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Je me tiens à votre disposition, mesdames et messieurs les députés, pour détailler cela recette par recette.

Enfin – et logiquement, compte tenu des bons résultats obtenus tant en dépenses qu'en recettes –, le déficit budgétaire de l'État s'établit à 76 milliards d'euros, en amélioration de 10 milliards d'euros par rapport à celui prévu par la loi de finances rectificative présentée au mois novembre dernier. Ce résultat doit notamment être mis en regard des efforts budgétaires majeurs auxquels le Gouvernement et la majorité parlementaire ont consenti. Je pense bien entendu à l'augmentation substantielle des crédits de la mission Défense, pour 1,7 milliard d'euros par an, conformément à la loi de programmation militaire, mais également aux fortes consommations de crédits liées à la transition écologique, notamment le chèque énergie et la prime à la conversion.

Concrètement, pour la première fois depuis plus de dix ans, nous avons réussi à la fois à baisser les prélèvements obligatoires, de 0,2 point de PIB, soit 4 milliards d'euros, à baisser les dépenses publiques, de 0,6 point de PIB, soit 12 milliards d'euros, à baisser le déficit public, de 0,3 point, soit 6 milliards d'euros, et à stabiliser notre endettement à 98,4 % du PIB. Cela signifie que le cercle vertueux consistant à baisser les dépenses pour réduire les impôts et les taxes qui pèsent sur les Français est enclenché, qu'il a fonctionné l'année dernière et qu'il doit fonctionner cette année et – je le dis notamment au rapporteur général – l'année prochaine, dans la construction de notre loi de finances pour l'année 2020. Vous me permettrez également de remarquer que la situation patrimoniale de l'État s'améliore nettement ; je sais que M. le rapporteur général s'intéresse à ces questions. Le résultat patrimonial atteint même son meilleur niveau depuis 2008 : – 51,9 milliards d'euros contre – 61,1 milliards en 2007, en raison notamment de l'augmentation de la valeur de l'actif immobilisé de l'État ainsi que de l'apurement de dettes contractées au cours des exercices précédents.

Ainsi, si je puis me permettre, monsieur le président, ces résultats sont en tous points contraires à ceux que vous annonciez à l'occasion de mon audition devant votre commission le 20 février dernier. Vous indiquiez en effet que les dépenses publiques « augmentent », que le déficit « stagne » et que la charge de la dette serait « en augmentation ». Les dépenses publiques en 2018 – la loi de règlement et la Cour des comptes l'évoquent – ont baissé, le déficit également et la dette est stabilisée ; la charge de la dette a même baissé. Certains se rappellent peut-être la discussion que j'avais eue avec M. Jacob dans l'hémicycle, à une heure assez tardive. Ils sont la preuve vivante que l'assainissement de nos comptes publics est une priorité du Gouvernement comme de la majorité, et je sais que c'est aussi votre priorité, monsieur le président. Il est sûr que ces premiers résultats sont très encourageants, mais le quinquennat n'est pas terminé et il nous faut continuer.

Les résultats obtenus en 2018 sont le fruit du sérieux budgétaire et d'une politique économique qui donne des résultats en matière de croissance et d'emplois, fondée sur la baisse des impôts, pour les consommateurs comme pour les entreprises. Nous devons capitaliser sur ceux-ci pour financer les baisses supplémentaires d'impôts annoncées par le Président de la République – notamment 5 milliards d'euros d'impôt sur le revenu –, dont les Français ont besoin, sans pour autant alourdir la charge de notre endettement, qui n'est autre qu'un impôt différé ; c'est notre préoccupation commune avec le ministre de l'économie et des finances. Ce cap, cette trajectoire sont l'expression d'une volonté que ce débat nous donne l'occasion de réaffirmer devant vous aujourd'hui. Nous allons constater les résultats de 2018 pour mieux préparer l'été budgétaire et la discussion, à l'automne, du projet de loi de finances pour 2020. Il est sûr que la baisse de la dépense publique est un effort quotidien ; je m'y emploie quotidiennement.

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