Intervention de Éric Woerth

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 13h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth, président :

Merci beaucoup, monsieur le ministre, mais permettez-moi une réaction « à chaud ». Je confirme ce que j'avais dit : les déficits augmentent, les dépenses augmentent et la dette de l'État augmente.

En 2018, le déficit de l'État se creuse de 8,3 milliards d'euros ; son montant est supérieur de 12 % à ce qu'il était l'année précédente. Certes, objectivement, c'est mieux que ce que vous aviez prévu – vous aviez prévu à peu près deux fois plus –, mais c'est quand même moins bien que l'exécution précédente. C'est d'ailleurs assez conforme avec la trajectoire présentée dans le programme de stabilité, qui ne prévoit pas d'effort particulier concernant l'État ; l'effort porte sur les comptes des administrations de sécurité sociale et les collectivités locales, et compense l'augmentation du déficit de de l'État.

S'il y a une bonne nouvelle par rapport aux prévisions, elle est due à un « effet base » en 2017, à l'augmentation des recettes fiscales en 2017, aux droits de mutation – nous avions bien noté que ce qui avait causé une erreur avait été corrigé, dont acte, bravo à l'administration de l'avoir fait et à vous-même qui avez permis que ce soit fait rapidement – et à une progression spontanée plus rapide des recettes fiscales. Je note d'ailleurs une forme de sous-estimation, depuis deux ans, de l'élasticité de la recette à la croissance. À quoi est-ce dû ? Cela tient-il à la méthode de calcul ? Nous constatons une surréaction des recettes fiscales à la croissance. Tant mieux du point de vue des recettes mais il y va aussi des prévisions et de leur sincérité, à laquelle je vous sais attaché. Quant à la dette de l'État, elle augmente parce qu'il faut bien financer ce qui doit l'être.

Quant aux recettes fiscales, elles sont à peu près stables par rapport à 2017. D'un côté, nous constatons une progression spontanée des recettes. De l'autre, le Gouvernement, au fil du temps, a fait voter des baisses de fiscalité.

La dépense augmente de 2,6 milliards d'euros en 2018, essentiellement à cause des problèmes de personnel. La masse salariale représente 2 milliards d'euros, sur un total – compte d'affectation spéciale (CAS) Pensions compris – de 130 milliards d'euros de dépenses de personnel. J'ai cru comprendre que le Président de la République abandonnait l'objectif d'une réduction de 120 000 du nombre de fonctionnaires. L'article 10 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit tout de même une réduction de 50 000 de ce nombre pour le périmètre de l'État. Le Gouvernement le respectera-t-il ? La masse salariale est l'un des paramètres-clefs pour la maîtrise des dépenses publiques. Certes, celles-ci sont mieux maîtrisées que par le passé mais le problème est qu'il nous faut changer de rythme et aller beaucoup plus vite.

En réalité, la France est le mauvais élève de l'Europe, et, en France, l'État est plus mauvais élève que les collectivités territoriales et que la sécurité sociale – même si on peut s'interroger sur la sécurité sociale en 2019. L'État, ce sont 33 % de la dépense publique et 120 % du déficit. Il y a là quelque chose à faire, car c'est la clef de la résolution de cette question lancinante de nos finances publiques. Les recettes couvrent neuf mois de dépenses de l'État. Il faut agir autrement.

La Cour des comptes considère que la démarche de maîtrise des dépenses fiscales est en déshérence. Partagez-vous cette idée, monsieur le ministre ? Depuis le rapport rendu par l'Inspection générale des finances en 2011, peu de choses ont changé. Le sujet est cependant revenu sur le devant de l'actualité à la suite du grand débat national. Le Gouvernement a-t-il l'intention de renouer avec cette démarche ?

J'ai le sentiment que le Gouvernement « surfe » sur la dette, ce qui est assez dangereux. Les vagues peuvent rapidement emporter le surfeur. Vous semblez considérer que la charge de la dette est vouée à diminuer tranquillement grâce aux taux d'intérêt, mais il n'en est pas vraiment ainsi.

Selon que l'on est dans la majorité ou dans l'opposition, on peut trouver le verre à moitié plein ou à moitié vide, mais il est tout de même des faits qui ne plaident pas en faveur des trajectoires et du projet de loi de règlement que vous présentez.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.