Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 13h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Monsieur le président, j'espère pouvoir répondre à toutes les questions qui m'ont été posées. Si ce n'est pas le cas, j'apporterai des compléments par écrit.

Monsieur le rapporteur général, je vous remercie de vos encouragements. Nous les copartageons.

Le montant global des recettes liées aux successions et donations s'élève à 16,2 milliards d'euros. L'erreur d'imputation – autrement dit, les sommes perdus dans les tuyaux de la DGFiP – représente, quant à elle, 1,4 milliard d'euros. Il reste 200 millions d'euros sur le compte, qui correspondent, si j'ose dire, au frictionnel de fin d'année.

Nous intégrerons pour la prochaine fois les informations que vous nous demandez dans le tableau de synthèse afin que vous puissiez exercer au mieux votre contrôle.

S'agissant des pistes d'amélioration possibles dans la gestion des crédits de l'État, j'en vois plusieurs. Permettez-moi toutefois d'insister sur les difficultés que rencontre en ce moment le ministre des comptes publics sur les dépenses du titre 2 de certains ministères, plus particulièrement celles de l'éducation nationale et de l'intérieur qui sont chroniquement en augmentation malgré un effort important de « sincérisation ». Depuis notre arrivée, nous avons dû mettre 2 milliards de plus pour le ministère de l'éducation nationale et 600 millions de plus pour le ministère de l'intérieur et nous avons encore des discussions avec les ministres concernés. Cela montre qu'il existe des difficultés manifestes de suivi de ces dépenses. Nous avons pris des mesures en conséquence et avons décidé notamment de changer les directeurs en charge de ces sujets. L'Assemblée nationale pourrait s'intéresser utilement aux mauvais calculs de ces masses salariales qui démontrent un défaut d'organisation des ministères, d'autant que ces dérives sont ensuite financées sur le budget général parce qu'il faut bien trouver de l'argent pour payer les professeurs ou les policiers. Reste la solution de jouer sur les concours, qui est sans doute la façon la moins intelligente de piloter une masse salariale. Ces dépenses du titre 2 sont l'enjeu le plus important pour le ministre des comptes publics dans son travail de sincérisation, même s'il y a aussi le financement des opérations extérieures.

Des nombreux sujets évoqués par Mme Peyrol, je retiendrai plus particulièrement la rebudgétisation des fonds sans personnalité juridique. Vous connaissez mon avis sur les niches fiscales tant des particuliers que des entreprises et je vais être tout aussi clair au sujet des affectations : leur multiplication est une mauvaise chose tout comme la multiplication des agences, qui introduit de la complexité dans le suivi des finances publiques. Je constate toutefois qu'en la matière, il y a beaucoup de croyants et peu de pratiquants puisque chaque nouvel impôt appelle un débat sur son affectation. Ces dernières semaines, nous avons eu des discussions sur l'écologie qui me paraissent contradictoires avec ce que vous prônez. Vous êtes parfois les premiers à demander des affectations parce que l'impôt a une dimension manifestement pédagogique. Toutefois, si l'on affecte ce qui relève de l'écologie à l'écologie, de la culture à la culture, du sport au sport, il n'y aura plus d'argent pour faire face aux dépenses de l'éducation nationale, de l'armée ou de l'intérieur. Je ne crois pas que l'écologie gagnerait à cette logique des affectations.

Certains demandent une compensation pour le CAS Radars du fait qu'il y a eu moins d'amendes à cause des dégradations de radars. La logique de l'affectation consisteraitelle à réclamer la liberté quand il y a de d'argent et à demander une compensation de l'État quand il n'y en a plus ? De manière générale, je suis très défavorable aux affectations, même si l'on peut comprendre qu'il y ait ici ou là une ou deux exceptions. J'aimerais que le Parlement puisse nous aider, quel que soit le bord politique des députés.

S'agissant du FII, je lirai avec intérêt le rapport de la Cour des comptes. Je soulignerai toutefois qu'il a une spécificité par rapport aux autres fonds : placé auprès du Trésor, il est intégré dans les comptes publics et donc dans le calcul du déficit et de la dette, ce qui est une vertu – mais je ne sais pas si la Cour des comptes l'a prise en compte.

Je ne vais toutefois pas me contredire : je suis opposé à toute logique qui irait à l'encontre des principes d'unité et d'universalité du budget, ne serait-ce que parce que, mesdames, messieurs les députés, vous devez pouvoir le contrôler. La loi de programmation des finances publiques prévoit d'ailleurs la fin d'une partie des affectations et je vous encourage, madame Peyrol, à conforter ce processus en contraignant le Gouvernement à les limiter.

Madame Louwagie, je sais qu'une mission d'information de votre assemblée a été mise en place pour évaluer la répercussion du mouvement des « gilets jaunes » sur l'économie française. D'après les informations dont je dispose, je peux vous dire que nous estimons son incidence à 0,2 point de PIB, soit 4 milliards d'euros. Le chômage partiel de 70 000 personnes a engendré 38 millions d'euros de coût pour l'assurance chômage et les frais pour les assurances sont évalués à plus de 200 millions d'euros. En outre, on peut imaginer que nos recettes auraient été plus importantes s'il n'y avait pas eu ce mouvement à la fin de l'année dernière.

M. Bourlanges s'est interrogé sur l'avenir de la politique de l'offre. Il a comparé Édouard Philippe à Raymond Barre – je pense que c'était d'un point de vue intellectuel et non pas physique... – et il s'est demandé si nous ne devenions pas keynésiens.

Le Président de la République a annoncé des mesures à hauteur de 17 milliards d'euros. Cela représente en dépenses supplémentaires pour le budget un peu plus de 2 milliards au titre de l'extension de la prime d'activité et 1,4 milliard au titre de la réindexation des retraites de moins de 2 000 euros. Tout le reste relève de la baisse d'impôt ou de la non-imposition. S'il y a une relance par la demande, c'est donc une relance par la baisse d'impôt, ce qui n'est pas tout à fait une relance keynésienne.

Nous avons fait le choix de baisses d'impôt drastiques, en continuité avec le programme du Président de la République. Lors des deux premières années du quinquennat, elles ont davantage concerné les entreprises, à l'exception de la réforme de la taxe d'habitation. Les annonces récentes concernent davantage les particuliers : renonciation à la taxe carbone, défiscalisation des heures supplémentaires, prime « Macron », baisse de l'impôt sur le revenu. Les politiques keynésiennes mises en place principalement par des gouvernements de gauche ont surtout reposé sur une augmentation de la dépense publique – augmentation de prestations, hausse du SMIC. Je ne crois pas du tout que notre politique tourne le dos à l'offre. Bien au contraire puisque nous ne sommes revenus ni sur la suppression de l'ISF, ni sur la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU), ni sur la baisse de l'impôt sur les sociétés, au grand dam d'Éric Coquerel.

Je ne reviendrai que brièvement sur la question des niches. La moitié des 14 milliards d'euros qu'elles coûtent pour les particuliers redevables de l'impôt sur le revenu bénéficient au dernier décile, soit les Français les plus riches ou les moins pauvres. Elles ne sont donc pas justes du point de vue de la redistribution fiscale telle que nous la concevons.

Les niches fiscales pour les entreprises ne se réduisent pas au CIR. Le taux réduit de TVA pour la restauration est une niche fiscale, par exemple.

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