Pourtant, pardonnez-moi mais le texte n'est pas à la hauteur des attentes de certains. Il faudra du reste nous expliquer ce qui s'est passé entre les Assises et aujourd'hui, car ce texte aurait pu comporter bien plus que cinquante articles – même si ce n'est déjà pas mal – , au regard de la nature, de la force et de l'ampleur des contributions enregistrées à l'époque. Il y a sans doute eu quelques arbitrages, notamment financiers, qui ont un peu douché l'enthousiasme des Assises de la mobilité. Beaucoup de choses se sont passées entre les Assises et aujourd'hui, notamment la publication des conclusions du Conseil d'orientation des infrastructures. Permettez-moi, à cet égard, de formuler quelques remarques.
D'abord, s'agissant de la méthode, on a beaucoup critiqué – et j'ai entendu de tels propos dans la bouche des rapporteurs – tout ce qui s'était passé pendant les trente, les quarante voire les cinquante dernières années. En la matière, il faut être sérieux. D'ailleurs, le rapporteur du texte au Sénat, Didier Mandelli, rappelle à juste titre, dans son rapport, l'histoire de la programmation en matière de transports, du schéma national des infrastructures de transport au Conseil d'orientation des infrastructures, en passant par la commission mobilité 21.
On a salué la méthode employée par Philippe Duron. Je voudrais rappeler que le Philippe Duron d'aujourd'hui est le même que celui d'hier : on lui avait confié un travail formidable, qu'il a mené avec beaucoup d'expérience, de conviction, et son attachement particulier à la concertation, en associant non seulement tous les territoires mais aussi les différents acteurs pouvant proposer des inflexions. Comme l'a dit Mme la ministre, le schéma national des infrastructures de transport prévoyait un nombre de projets d'infrastructures qui dépassait les capacités de financement. Le rôle de la commission mobilité 21, présidée par Philippe Duron, était de réduire la voilure et de réfléchir aux moyens de mieux financer les projets, en essayant de les adapter aux territoires.
Madame la ministre, vous m'avez interpellé en commission, me rendant pratiquement seul responsable du manque de financements de certaines infrastructures programmées par la commission mobilité 21. En toute modestie, je vous rappelle que je n'ai ni participé au gouvernement précédent ni même occupé des fonctions importantes dans l'administration centrale. Vous savez comme moi que ce qui est commun au schéma national des infrastructures de transport, à la commission mobilité 21 et – sans doute le verra-t-on demain – au Conseil d'orientation des infrastructures, c'est la fréquence des arbitrages ou ce que j'appelle « l'effet Bercy » : on se fait plaisir en identifiant des infrastructures qu'on se glorifie de pouvoir financer, mais il y a souvent des évaluations de crédits et la « patrouille de Bercy » contrarie les objectifs du plan. Je tiens à insister sur ce point, car certains peuvent se dire que ce n'était pas bien, en définitive, de faire des TGV et des lignes à grande vitesse. Pourtant, ces projets ont servi des territoires, et je connais peu de gens parmi vous qui se plaignent d'avoir, dans leur circonscription, des infrastructures de bon niveau, prévues il y a plusieurs années.
Il reste que le message que vous portez depuis plusieurs mois est juste : il faut s'intéresser à l'existant, ce que permet le travail du Conseil d'orientation des infrastructures, mais que permettait aussi, avouez-le, celui de la commission mobilité 21.
S'agissant des infrastructures de transport, qu'elles soient ferroviaires ou routières, il faut garder à l'esprit une vérité : on ne réalise pas une infrastructure en cinq ans. Souvent, vous l'avez vécu comme d'autres avant vous, on inaugure des infrastructures décidées par d'autres auparavant. Voyez-vous, il n'y a que les cathédrales qu'on rebâtit en cinq ans !