Je ne vous cache pas que le sentiment de notre groupe, à l'issue de cette discussion, est un sentiment de déception et de gâchis. La réforme qui avait été initiée nous paraissait souhaitable, nous la voulions et y avions contribué. La méthode employée, la vôtre, semblait augurer d'une volonté de discussion, et je dois dire qu'au cours des groupes de travail réunissant les présidents de groupe, vous avez écouté, entendu, évolué.
Au terme de ce processus, une réunion devait être conclusive, réunir le consensus le plus large possible. Elle n'y est pas parvenue. Une autre n'a jamais eu lieu.
Le résultat, c'est que nous avons commencé à examiner un texte dont nous avions la naïveté de penser qu'il pouvait évoluer, qu'il pouvait changer à la faveur de la discussion dans l'hémicycle. Puisqu'il ne s'agissait pas de majorité et d'opposition, puisqu'il ne s'agissait pas du Gouvernement mais, en réalité, de notre règle de vie commune, de notre capacité d'expression et de la compréhension de nos concitoyens, nous pensions qu'il pouvait parfaitement être débattu ici, sereinement.
Tel n'a hélas plus été le cas dès l'article 8, la semaine dernière. Cela a été pour nous une déception. Oui, nous partageons l'idée que certains temps de discussion en séance ne sont pas nécessaires, et que les artifices de procédure font inutilement perdre le fil d'une discussion et la diluent, alors qu'elle doit être plus politique et plus concentrée.
Nous partagions l'idée que, comme le veut la réforme du règlement, l'on pouvait progresser en n'ayant qu'un orateur par groupe, dès lors qu'il disposerait de suffisamment de temps ; qu'une seule intervention par article pouvait être possible si l'on permettait à chacun et chacune d'entre nous de livrer son opinion par écrit pour le Journal officiel, afin que nos électeurs en sachent quelque chose ; que les motions de renvoi en commission, les amendements identiques ou les motions référendaires, dont le temps sera raccourci, étaient des artifices de procédure qui n'étaient pas indispensables, tout comme les suspensions de séance.
Oui, tout cela est plutôt positif pour notre Assemblée. Nous avons contribué, monsieur le président, à ces avancées, et nous avons cherché jusqu'au bout, avec le rapporteur, des solutions de consensus.
Il y a des avancées, comme l'organisation nouvelle – du moins l'espère-t-on, puisqu'elle n'est pas suffisamment codifiée – des questions d'actualité au Gouvernement, où l'opposition aurait plus de temps et disposerait également d'un droit de réplique au Gouvernement ; la possibilité donnée à un groupe d'opposition demandant une commission d'enquête de choisir un rapport ; ou encore la séparation des explications de votes et des votes solennels, de manière à s'épargner enfin le ridicule de voter un texte comme le projet de loi de réforme de la justice un vendredi dans la nuit, à quatre heures du matin !
Il fallait permettre à tous les députés de s'exprimer, et revaloriser le travaux du Parlement. Oui, le fait qu'il y ait un corapport sur l'application des lois est un progrès. Oui, les contributions écrites, je le disais, offriront à chaque député la liberté de bien marquer sa position, et nos concitoyens auront le droit de pétition.
Il y a des aménagements techniques, les horaires réformés, la possibilité donnée aux présidents de groupe de participer au Bureau, l'obligation de mettre un texte à la disposition des députés dix jours avant son examen en séance. Et puis il y a la cosmétique – la première vice-présidence de l'Assemblée nationale, ou la première vice-présidence du Comité d'évaluation.
Nous avons achoppé sur l'article 8, sans que le reste de la discussion puisse avoir lieu. Après avoir cherché un consensus trois heures durant, dans la nuit, et, Philippe Gosselin le disait, alors que le but était très proche, nous avons échoué. Pourquoi ? Parce que nous demandions qu'un groupe ait, de droit, dix minutes de temps de parole pour l'ensemble d'un projet de loi – des projets de loi complexes, comme les projets de loi ELAN, EGALIM, comme la réforme de la justice ou bien d'autres.
Sans doute sommes-nous moins doués que d'autres, mais je prétends qu'en cinq minutes, on ne peut présenter une pensée complète et complexe sur un texte de loi d'une telle nature.