La relation commerciale entre l'industrie et le monde de la distribution est de plus en plus étirée, à la fois vers le haut et vers le bas, si je puis dire. Vers le haut, parce que ces centrales internationales seront sans doute de plus en plus sophistiquées et que la grande distribution ira probablement vers d'autres territoires de négociation que les seules remises et ristournes. Vers le bas, parce qu'on assiste à une « redescente » des lieux de négociation, alors que la centralisation avait prétendu tout ramasser en un seul point. La relation commerciale sera donc extrêmement difficile à suivre ne serait-ce que pour l'industriel, qui aura de plus en plus de mal à consolider financièrement et même comptablement ce qu'il donne à une enseigne.
J'ignore quelle amélioration peut être proposée au plan réglementaire. En tout cas, l'industriel va devoir se doter d'un certain nombre d'outils, à commencer par l'information, qui devrait lui être transmise par le monde de la distribution. De fait, actuellement, l'industrie manque d'informations, notamment sur les data, pour savoir qui vend quoi et pourquoi. Les super-centrales que vous avez mentionnées, monsieur le président, sont des lieux de négociation ou plutôt de consolidation des exigences financières, en matière de remises et ristournes. La notion de contrepartie n'est pas évoquée ; elle est plutôt renvoyée au niveau de chaque enseigne. Les entreprises, notamment les PME – qui, encore une fois, sont en première ligne dans cette évolution de la distribution –, doivent avoir un droit à l'accès sur leurs clients. C'est trop compliqué, trop coûteux, pour elles.
Par ailleurs, cela peut paraître candide, mais, normalement, un contrat a un contenu. La simple lecture d'un contrat comportant la reconnaissance ou non d'un véritable service proposé par l'industriel serait un grand pas. Certes, il existe actuellement des conditions générales de vente. Mais, d'une part, elles sont encore largement sous-utilisées par le monde de la production, qui fait montre de frilosité vis-à-vis d'un monde de la distribution dont les comportements sont assez unilatéraux et, d'autre part, le cadre réglementaire n'oblige pas, sauf erreur de ma part, l'industriel à énoncer ce qu'il attend en matière de services à la revente – concrètement, la coopération commerciale ne fait pas partie des conditions générales de vente. Celles-ci deviennent ainsi un instrument trop limité : elles n'englobent pas la totalité de la relation commerciale, si bien que l'ensemble des attendus du fournisseur n'y figurent pas. Or, comme celui-ci est frileux et n'ose pas rétablir le principe du droit contractuel, c'est-à-dire exprimer ces besoins au distributeur, cela ne fonctionne pas.