Sur la forme, je souscris et relaie la colère de notre collègue Dominique Potier, qui nous conforte dans notre conviction que lorsqu'on autorise des ordonnances, on dessaisit le Parlement et on permet au Gouvernement de contredire le législateur, notamment sur la question des produits phytopharmaceutiques ou sur celle de la spécificité des coopératives. Ce n'est évidemment pas acceptable.
Sur le fond, le procureur le plus sévère sur l'application de la loi « Egalim » n'est autre que le ministre de l'agriculture lui-même : le 2 mai dernier, M. Didier Guillaume déclarait devant les éleveurs que payer le lait à moins de 350 euros les mille litres n'était pas sérieux. Il appelait à changer de système. Ce réquisitoire a le mérite de la clarté : s'il faut changer le système, un an après l'entrée en vigueur de la loi « Egalim », c'est que cette dernière n'a pas produit les effets escomptés. Nous avions tenté d'appeler à muscler la loi, car le monde des relations commerciales n'est pas un monde de « bisounours ». Vous avez refusé, sans doute par idéologie libérale.
Le fait est que, pour les producteurs, le compte n'y est pas. La crème de la loi « Egalim » a très vite tourné, après les premiers communiqués triomphants parus à la suite des frémissements des prix du lait. L'indicateur de l'interprofession laitière était fixé à 396 euros les mille litres, soit 39,60 euros le litre, montant supposé garantir que les prix de production soient couverts : nous en sommes loin aujourd'hui. La majorité des contrats signés par les industriels le sont autour de 370 euros. Nous allons dans le mur et, dans ma circonscription, les éleveurs ne s'en sortent pas. On peut s'alarmer des retournements de prairie mais, sans intervention de l'État pour corriger la trajectoire, cela ne s'arrêtera pas.
Le commissaire européen à l'agriculture a fait des propositions afin d'identifier la répartition de la valeur entre agriculteurs, transformateurs et distributeurs, appelant même à plus de transparence. C'est que vous avez refusé, alors même que l'Europe libérale le préconise désormais.
Enfin, après les déclarations du secrétaire d'État Jean-Baptiste Lemoyne, qui indique, au lendemain des élections européennes, que la négociation du traité du Mercosur est de retour à l'ordre du jour, je souhaite demander si on ne devrait pas mettre le sujet du remaniement ministériel à l'ordre du jour du rapport d'application de la loi « Egalim ».