Je souhaite répondre à Mme Deprez-Audebert. Le modèle économique d'une coopérative qui reposerait sur le bénéfice qu'elle va faire sur la vente de produits phytosanitaires est un dévoiement complet de l'esprit coopératif. Une coopérative a pour objectif de valoriser les produits de ses adhérents, pas de leur vendre des produits phytosanitaires. Je suis en désaccord complet avec cette position-là. Expliquer que les coopératives vont disparaître si elles ne peuvent plus vendre de produits phytosanitaires revient à avouer que les coopératives sont complètement éloignées du principe pour lequel elles ont été créées. Je pense que cet état de fait sera marginal, d'autant plus que nous laissons largement le temps aux coopératives de s'adapter à la séparation de la vente et du conseil. Sur les seuils de revente à perte, je suis content que M. Di Filippo reprenne les arguments de M. Michel-Edouard Leclerc. Les prix ont augmenté de 0,7 % et pas de 10 %, comme il l'a annoncé dans tous les médias. Les chiffres exacts ont été publiés par l'Institut de la consommation. En revanche, il y a effectivement un « trou dans la raquette » par rapport à la redescente de la valeur tout au long de la chaîne. La hausse du seuil de revente à perte a été faite pour dégager des marges de manoeuvre. Maintenant, il faut que la contractualisation fondée sur les indicateurs de coûts de production se mette en place. D'ailleurs, l'état des indicateurs de coûts de production est placé en pages 24 et 25 du rapport. M. Marilossian, il manque effectivement la contractualisation sur la base de ces indicateurs et le fait que ces indicateurs doivent redescendre dans les contrats jusqu'à la grande distribution. C'est effectivement quelque chose qui n'a pas été ou très peu mis en place pour l'instant. Les indicateurs de coûts de production dans la filière bovine-viande n'ont, par exemple, été validés qu'au 31 janvier 2019 seulement. Dans la filière lait, ils ont été notifiés à la Commission européenne mais ne sont pas encore entrés dans les faits avec un prix du lait à 396 euros, comme certains l'ont dit ici. Des choses se passent quand même. J'ai consulté un certain nombre de coopératives et d'associations de producteurs qui sont aujourd'hui en train de contractualiser avec des formules de calcul sur la base des indicateurs de coûts de production. J'ai entendu parler de 80 % de prise en compte de ces indicateurs pour certains labels, avec 20 % de prix de marché. C'est du concret. Ça arrive, ça vient. Ce n'est pas assez rapide car des filières sont en crise, mais ça arrive. Je regrette que cela ait pris autant de temps. Des discussions interprofessionnelles ont mis beaucoup de temps à se mettre en place.
Je souhaite répondre à l'intervention de Monsieur Ruffin. Je n'ai jamais entendu M. Serge Papin parler de prix minimum ou d'administration des prix dans ses interventions. Il a été animateur d'un atelier et a fait un certain nombre de propositions, dont certaines ont été retenues comme le seuil de revente à perte et l'encadrement des promotions. Le porc n'est pas vraiment le bon exemple, puisque son prix est en train de flamber et d'être porté par les exportations vers la Chine. C'est une des rares filières en viande qui se porte bien, avec des prix payés aux producteurs qui ne cessent d'augmenter depuis quelques semaines. Mais il y a effectivement un problème d'inadéquation car la grande distribution n'arrive pas à monter les prix aussi vite que les prix du marché. Il y a donc des enjeux de renégociation des prix dans la grande distribution.
Je voulais préciser qu'un certain nombre de contrôles seront aussi mis en place par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur les pratiques de la grande distribution par rapport aux questions évoquées par M. Marilossian. J'entends certaines interventions qui nous expliquent qu'il faudrait finalement ne rien changer à la façon dont agit la grande distribution. Celle-ci a détruit 1 milliard d'euros de valeur dans la filière agro-alimentaire depuis des années. Cela s'amplifie d'année en année. Toutes les industries agro-alimentaires, que ce soient les PME ou les grands groupes, nous expliquent qu'il n'y a qu'en France que les négociations commerciales se passent aussi mal, avec de telles déflations systématiques. J'ai quelques propositions mais je les ferai dans le cadre de la commission d'enquête en cours, qui aboutira probablement à des propositions d'évolutions législatives ou réglementaires complémentaires pour mieux encadrer ces pratiques déloyales. Une directive européenne a été publiée entre-temps sur les pratiques déloyales de la grande distribution. Il va falloir transposer cette directive au niveau français car certains éléments sont intéressants et vont dans le bon sens. Concernant les négociations avec le Mercosur, je ne suis pas le porte-parole du Gouvernement. Je ne vais donc pas arbitrer entre ce que certains ministres ont pu dire. J'ai eu des discussions directes avec MM. Jean-Baptiste Lemoyne et Didier Guillaume, ainsi qu'avec le ministre des affaires étrangères. M. Lemoyne n'a fait que rappeler le discours du Président de la République qui avait indiqué que l'accord avec le Mercosur ne pouvait être signé en l'état car certaines lignes rouges, qui ont été fixées par la France, étaient dépassées, en particulier au sujet des spécificités de la viande bovine.
S'agissant de la betterave sucrière, je sais que le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est pleinement mobilisé sur ce sujet préoccupant. Il va falloir trouver des solutions rapides et fortes. La sortie des quotas a été une catastrophe et a été très mal anticipée, de la même manière que pour le lait. Je suis d'accord avec Monsieur Leclerc.