Je reviens sur les trains de nuit, qui permettent de remédier au désenclavement, notamment pour les territoires montagneux. Dans ma région, si leur suppression devait se poursuivre, l'impact sera très négatif. Certaines de vos annonces, madame la ministre, suscitent toutefois de l'espérance.
Ensuite, je crois comprendre que la ligne nouvelle Montpellier-Béziers-Perpignan est programmée, malheureusement, à la fin de la période, donc dans une dizaine d'années. Pourtant, elle est attendue depuis plus de trente ans. L'Espagne a fait sa part du travail, et elle est désormais suspendue à la réalisation de ce dernier tronçon qui doit permettre de relier l'Europe du Nord à l'Europe du Sud. Cette ligne est le seul moyen de désengorger la ligne actuelle et d'augmenter le nombre de trains du quotidien qui sont aujourd'hui complètement saturés. En outre, pour lutter contre la pollution, il convient de développer le fret ferroviaire – il est prévu que la LGV soit mixte, c'est-à-dire accueillant à la fois du fret et des passagers. Sur ce sujet, nous avons besoin aujourd'hui d'un engagement de l'État et d'une accélération du calendrier.
Enfin, je souhaite évoquer la décision de l'État de céder des parts de routes nationales contiguës aux autoroutes. Je relève, en premier lieu, une certaine opacité. Cette mesure, introduite par voie d'amendement, s'inspire d'un rapport paru pendant la crise des gilets jaunes, dont on sait qu'elle est aussi une crise d'acceptabilité des décisions publiques. Elle a été présentée – non par le Gouvernement, mais par les députés qui l'ont soutenue – comme une mesure technique alors qu'il s'agit d'une décision budgétaire et politique, qui est loin d'être anodine.
En deuxième lieu, je souligne une contradiction : la mise en concurrence serait inévitable – ce que je conteste parfois – pour la SNCF ou les barrages hydroélectriques, et voilà que la cession de routes nationales en serait dispensée et pourrait se faire de gré à gré. Je m'interroge, car je me souviens qu'il y a quelques années, l'Association des sociétés françaises d'autoroutes – AFSA – faisait du lobbying en faveur de l'extension du modèle des concessions autoroutières à l'ensemble des routes nationales. Je ne voudrais pas que cette mesure soit une première étape vers une extension des concessions – au lieu du retour des autoroutes dans le giron public que j'appelle de mes voeux – , au motif que l'État n'aurait plus les moyens d'entretenir le réseau routier national. Où s'arrêtera-t-on ? Aujourd'hui, ce sont les portions les plus proches des autoroutes qui sont concernées au nom du bons sens. Mais, demain, d'autres tronçons seront connexes de ceux qui auront été cédés.
Si l'État est désargenté, c'est aussi parce qu'il a fait de très mauvaises affaires avec ces concessions autoroutières. Je le dis d'autant plus calmement que la droite est en partie responsable de cette erreur. Alors que les concessions avaient été valorisées à 14,8 milliards d'euros, les sociétés concessionnaires ont distribué 27,4 milliards d'euros de dividendes en dix ans. L'État a donc fait une très mauvaise affaire. C'est en partie à cause de cette erreur que nous sommes aujourd'hui dans l'incapacité de financer les transports.
Comme disait Milton Friedman : « there ain't no such thing as a free lunch ! », autrement dit, rien n'est gratuit. Dès lors que les routes nationales seront concédées, les sociétés gestionnaires instaureront un péage. Pour revenir à la crise des gilets jaunes, je ne pense pas qu'une augmentation des péages soit la meilleure manière de réconcilier les Français avec la politique.
Je tenais à vous alerter, car la place de l'État est mise en question. Je considère que l'État doit gérer les routes nationales. Vous ne pouvez pas accepter une augmentation des péages afin de mettre sous le tapis les problèmes budgétaires de l'État. Il est urgent de voter une loi de séparation des églises autoroutières et de l'État.