Bien sûr. D'ailleurs la France a voté contre le mandat de négociation avec les États-Unis, car ce pays ne respecte pas les accords de Paris sur le climat. Nous avons d'ores et déjà annoncé que nous ne ratifierions pas un accord de libre-échange avec le Mercosur s'il mettait en cause les standards agricoles français, c'est aussi simple que cela. Mais on ne peut pas se dire contre les accords commerciaux : nous sommes contents de vendre de plus en plus de boeuf et de porc aux Chinois, et de vendre des produits transformés sur le marché mondial.
Je ne reviens pas sur la question du foncier ; vous serez saisis d'une proposition du Gouvernement dans les jours qui viennent.
Vous avez décidé d'aller en justice sur la question des certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques ; nous verrons ce qu'il adviendra. Le Gouvernement a choisi de ne pas ajouter d'argent au détriment des agriculteurs.
Monsieur Dufrègne, vous ne pouvez pas dire que rien n'a été entrepris s'agissant des relations avec la grande distribution. Vous avez tous participé aux États généraux de l'alimentation ; tout le monde a trouvé que c'était une grande réussite. Ce n'est d'ailleurs pas cette partie de la loi ÉGALIM qui a été critiquée lors des débats à l'Assemblée nationale, mais plutôt la seconde : tout le monde était d'accord pour une meilleure répartition de la valeur, pour l'inversion des mécanismes de construction du prix, pour un meilleur équilibre commercial. Maintenant, battons-nous ensemble et faisons pression.
Reste un sujet très compliqué, que nous devons étudier de manière très poussée. On craignait, en portant le seuil de revente à perte à 10 %, de déclencher une inflation exorbitante sur les produits d'appel ; cela n'a pas été le cas, l'inflation est restée assez faible. Mais il faut avoir conscience qu'une hausse des prix pour le producteur peut entraîner une hausse des prix pour le consommateur, et l'assumer, sans chercher à jouer les uns contre les autres. Je refuse pour ma part de prendre le consommateur en otage face au paysan.
Le dispositif TO-DE, que plusieurs d'entre vous ont évoqué, est lié au problème de dumping social et fiscal des autres pays de l'Union. Comme l'a dit M. Brun, c'est tout de même dingue que les maraîchers allemands parviennent à fournir en France des produits moins chers que les maraîchers français, tout simplement parce qu'ils utilisent des travailleurs détachés de Pologne et d'ailleurs ! Même s'il ne durera pas autant que les impôts, le dispositif TO-DE est prévu pour durer un moment, il faut une harmonisation sociale dans les autres pays européens. J'ai expliqué à mon homologue espagnol qu'il n'était pas possible de continuer de la sorte. La France s'impose des mesures vertueuses pour éliminer le glyphosate et les pesticides, nous appliquons un salaire minimum et le dispositif TO-DE, pendant que d'autres font entrer en France des produits traités aux pesticides en employant de la main-d'oeuvre beaucoup moins chère. Tant qu'il n'y aura pas d'harmonisation sociale et fiscale au niveau de l'Union européenne, on ne s'en sortira pas et nous aurons besoin du TO-DE. Je me suis exprimé là-dessus dès ma nomination au Gouvernement, l'Assemblée est allée au-delà du compromis que j'avais proposé, je l'accepte. Dans le PLF 2020, je vais proposer le maintien du TO-DE, mais pour les années suivantes, je ne serai peut-être plus là et vous non plus... On verra. En tout cas, il ne sera pas pérennisé de manière définitive.
Monsieur de Courson, vous avez raison au sujet des dépenses fiscales, et cela me fournit un bon argument pour les réunions d'arbitrages budgétaires qui se tiennent en ce moment. Je disais qu'il importait peu que les sommes soient rattachées à notre budget, mais je vais creuser la piste que vous évoquez, qui me semble intéressante. Le gazole pour les bateaux de pêche, ce n'est pas au ministère de l'agriculture, et pourtant, c'est nous qui gérons la pêche...
S'agissant de l'éco-énergie sur le matériel agricole, je regrette que la France ne dispose pas de filière d'agroéquipement ; j'en ai parlé à Bruno Le Maire. Je me suis rendu au SIMA, le salon mondial des fournisseurs de l'agriculture et de l'élevage, et je pense que nous avons un boulevard devant nous. Cela renvoie à ce que disait Dominique Potier : ces nouveaux matériels permettent de réduire de 70 ou 80 % l'utilisation des produits phytosanitaires.