Le 20 février dernier, patronat et syndicats ne sont pas parvenus à un accord sur la convention d'assurance chômage. Cet échec a ouvert la voie à la reprise en main du dossier par le Gouvernement. C'est donc l'exécutif qui définira, par décret, l'avenir de l'assurance chômage.
Le 26 février, Mme la ministre du travail a annoncé se saisir de l'occasion. Je cite ses propos : « Tout notre projet, c'est d'aller vers un marché du travail plus souple et plus ouvert ».
Cette déclaration démontre que l'échec de la négociation a été orchestré par une technocratie dominante, au moyen d'une lettre de cadrage : la nature des économies exigées au détriment des seuls allocataires ne pouvait être acceptée par les syndicats ; la pénalisation des contrats courts ne pouvait l'être par le patronat. Les partenaires sociaux sont tenus pour responsables de l'échec, et le code du travail les dessaisit du dossier au profit de l'exécutif. Bien joué !
Mme Pénicaud a pris, entre Noël et le Nouvel An, les décrets d'application de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, dont l'intitulé – en novlangue gouvernementale – est une parfaite antiphrase. Pôle emploi y devient juge et partie : l'agence peut désormais décider seule des sanctions appliquées aux demandeurs d'emploi, comme la suppression des allocations ; elle propose l'emploi, définit le caractère raisonnable de celui-ci et applique la sanction en cas de refus. Ce modèle de droit porte un nom : l'arbitraire.
Fidèle à sa logique ordo-libérale, la ministre du travail transforme le travail en emploi, l'emploi en job, le chômeur en coupable de sa situation, le service public de l'emploi en outil répressif. L'intention était dans la loi, sa mise en oeuvre dans le décret. Nous lui demandons de faire preuve de transparence en exposant ses projets à la représentation nationale et au peuple.
Le flou entretenu par la majorité présidentielle concerne également les professionnels du spectacle. Bien que ces derniers soient parvenus à signer unanimement un accord sur les annexes VIII et X de la convention, ils souhaiteraient connaître les tenants et les aboutissants de l'ensemble du texte. Ne leur faites pas l'affront d'attendre que la ministre ait préparé en toute discrétion des décrets qui sortiront pendant les vacances d'été, lorsque le festival d'Avignon ne sera plus un enjeu politique !
Ne croyez-vous pas, raisonnablement, qu'il faudrait revenir à la table des négociations plutôt que laisser à l'exécutif le pouvoir de décision concernant la prochaine convention ?