Comme l'indique l'exposé des motifs de la proposition de résolution, la masse salariale de l'État a augmenté de plus de 10 milliards d'euros depuis 2009 et de 5,4 % depuis le début du quinquennat. Les « nombreuses avancées réalisées en deux ans », dont vous vous glorifiez dans l'exposé des motifs, sont en réalité inexistantes.
La fonction publique française est réputée, à juste titre, pour être l'une des meilleures au monde. Il faut le saluer. Le recrutement des fonctionnaires, basé sur des concours exigeants, est garant de la méritocratie et doit nous préserver de l'entregent, du copinage et des emplois de complaisance répandus dans certaines collectivités. Les fonctionnaires font preuve d'un dévouement et d'un sens du service public remarquables, alors que leurs conditions de travail et leurs revenus ne cessent de se dégrader – il faut le dire devant cette assemblée.
Depuis dix ans, nous assistons à la poursuite d'une politique d'affaiblissement de la puissance publique au nom d'une logique purement idéologique, qui est celle du président Macron : il s'agit d'accélérer l'avènement de la « start-up nation ». La dérégulation imposée par la Commission de Bruxelles s'applique désormais à la puissance publique, sommée d'abandonner toutes ses missions au marché, niant par là même toute valeur à l'intérêt général auquel les fonctionnaires sont pourtant si attachés. Comme disait Paul Valéry, « si l'État est fort, il nous écrase ; s'il est faible, nous périssons ». Depuis deux ans, le Gouvernement poursuit les politiques d'affaiblissement de l'État entamées sous la présidence de Nicolas Sarkozy et poursuivies pendant le quinquennat de François Hollande.
Votre proposition de résolution se présente sous des atours habiles de sincérisation des comptes publics, d'amélioration de la transparence budgétaire et de meilleure information des parlementaires en matière budgétaire. En réalité, elle n'est qu'un outil au service de la promesse de campagne du président Macron : supprimer 120 000 postes de fonctionnaires d'ici 2022.
Vous avez été confrontés à la colère des Français, qui sont descendus dans la rue pour crier leur refus de voir disparaître les services publics dans des pans entiers de nos territoires. Alors que la France se classe au deuxième rang des pays de l'OCDE en termes de pression fiscale, nos concitoyens ont le sentiment légitime que, lorsque les services publics ne disparaissent pas, leur fonctionnement est rendu particulièrement chaotique par le manque de moyens alloués.
Depuis deux ans, le rétablissement du jour de carence et le gel du point d'indice ont encore accentué la fragilisation des fonctionnaires, qui voient leurs conditions de travail se détériorer continuellement.
Bien sûr, chacun s'accorde sur la nécessité de faire des économies. Les fonctionnaires et les Français en général ont conscience que la fonction publique doit évoluer. Il ne s'agit pas de donner des coups de rabot sur la masse salariale de l'État sans discernement, mais de supprimer l'ensemble des dépenses publiques non nécessaires et de combattre les fraudes diverses.
La première priorité doit être de lutter contre la fraude sociale. Selon le magistrat Charles Prats, quelque 1,8 million de numéros de sécurité sociale seraient basés sur des documents frauduleux, alimentant une escroquerie s'élevant à 14 milliards d'euros, soit le triple du déficit de la sécurité sociale en 2017. Des comptes de sécurité sociale frauduleux permettent à certains individus de prétendre aux aides sociales à une grande échelle. Cette fraude massive perdure, en l'absence de véritable volonté politique. Il serait pourtant possible d'instaurer le principe d'un arrêt des versements dès qu'une pièce frauduleuse est découverte dans un dossier de sécurité sociale, ou encore d'instaurer une carte vitale biométrique fusionnée avec le titre d'identité. Voilà ce que nous proposons.
Il serait également possible de réaliser d'importantes économies sur le budget de l'État en réduisant drastiquement l'aide médicale d'État – AME – réservée aux clandestins. Celle-ci a progressé de 5,1 % en 2019 et s'élèvera cette année à plus de 930 millions d'euros, prélevés sur le budget de l'État. Rappelons que l'AME est financée par les impôts des contribuables français, qui doivent faire face à des restes à charge de plus en plus importants.
Une autre piste à envisager pour économiser de l'argent public serait de mettre fin à la superposition onéreuse des collectivités territoriales, qui ont des compétences peu claires et qui se chevauchent bien souvent. Il conviendrait de mettre fin aux recrutements hasardeux dans ces mêmes collectivités, ainsi que de supprimer les opérateurs d'État inefficaces, au nombre de 1 200, qui coûtent 80 milliards d'euros par an.
C'est la réorganisation d'un service public ambitieux, la définition de moyens et d'objectifs, ainsi que la consolidation de l'édifice social construit par les Français qui doivent nous préoccuper, et non la destruction que vous entreprenez avec la régularité d'un automate.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cette proposition de résolution.