Intervention de Pierre Cordier

Séance en hémicycle du mardi 18 juin 2019 à 21h30
Sur-exécutions et sous-exécutions des lois de finances — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Cordier :

La loi de finances étant construite sur des hypothèses macroéconomiques et financières, la gestion budgétaire peut faire face à des imprévus au cours de son exécution. En effet, divers aléas peuvent survenir comme des catastrophes naturelles, des interventions militaires, des crises sanitaires, des indemnisations de victimes, des besoins nouveaux, des imprévus. La direction du budget doit par conséquent anticiper, tout au long de l'année, ce que seront les dépenses en fin d'exercice. Si nécessaire, elle propose des mesures correctrices lorsque la prévision tend à s'écarter de la loi de finances initiale et du respect de la norme de dépenses.

Au moment du dépôt du projet de loi de finances, le Gouvernement s'engage à maîtriser les dépenses dans le cadre de normes de dépenses. Ces normes sont un outil de pilotage simple qui permet au Gouvernement de rendre compte, de manière transparente, de sa maîtrise des dépenses devant le Parlement. Lors de nos débats sur les lois de finances initiales, en séance et en commission élargie, nous alertons régulièrement le Gouvernement sur la sincérité budgétaire. Ce principe implique l'exhaustivité, la cohérence et l'exactitude des informations financières fournies par l'État pour bâtir le budget de la nation.

Cette sincérité budgétaire a été formalisée par l'article 32 de la LOLF, qui dispose que « les lois de finances présentent de façon sincère l'ensemble des ressources et des charges de l'État. Leur sincérité s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler. » La sincérité, entendue comme l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de l'équilibre, ne peut donc pas se mesurer ni s'apprécier de manière objective. C'est pourquoi le Conseil constitutionnel n'a jamais censuré aucune loi de finances sur ce critère.

Pour autant, Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, n'a pas hésité à pointer du doigt, dans son audit sur les finances publiques publié en juin 2017, l'insincérité du budget pour cette même année. Gilles Carrez et Éric Woerth étaient pourtant intervenus à de nombreuses reprises pour alerter le Gouvernement et l'opinion publique sur la dérive dangereuse des comptes publics et l'insincérité de ce budget. Ce budget, rappelons-le, avait été préparé par un jeune ministre de l'économie, futur Président de la République.

Cet audit de la Cour des comptes a estimé qu'en 2016, le Gouvernement a volontairement sous-budgétisé près de 4 milliards d'euros de dépenses : le coût des opérations extérieures pour 800 millions ; le plan de formation des 500 000 chômeurs pour 800 millions ; les contrats aidés pour 600 millions ; la recapitalisation d'Areva à hauteur de 2,5 milliards d'euros, que le Gouvernement n'avait pas jugé bon d'inclure dans le calcul du déficit ; et, enfin, des dépenses de retraites pour 500 millions d'euros. La Cour des comptes a également relevé 2 milliards d'euros de moindres recettes. Indépendamment de cet exemple, on constate chaque année que des dépenses sont sous-budgétisées, en particulier les opérations extérieures de nos armées. Pour 2019, cette sous-évaluation est estimée à 600 millions d'euros, et je ne parle même pas du service national universel, qui n'est toujours pas financé.

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