Quel plaisir et même quel honneur de parler de Mayotte dans notre hémicycle ! Mayotte est un territoire profondément français. Française depuis 1841, Mayotte n'a cessé, depuis, de manifester son attachement à la France, qui s'est confirmé lors de la consultation d'autodétermination de 1974, puis en 2011, avec l'adoption du statut de département.
Pourtant, peut-être plus que tout autre territoire français, Mayotte souffre.
L'île a des besoins spécifiques particulièrement importants, comme l'a rappelé le rapporteur : Mayotte est dans une situation critique. Divers rapports, notamment celui d'une inspection générale de l'État, constatent que Mayotte souffre d'un retard d'équipement et d'une lenteur indubitable d'application des droits sociaux.
Les infrastructures de transport des biens et des personnes sont saturées, en mer comme sur terre ; les équipements aéroportuaires demeurent encore sous-dimensionnés, sans parler de la fracture numérique, qui handicape à la fois les acteurs économiques et les habitants de Mayotte.
La situation démographique et économique y est également particulièrement difficile. Mayotte connaît le record de pauvreté – 84 % de la population vit sous le seuil de pauvreté – et le record de surcoût du panier moyen des produits de consommation courante par rapport à la moyenne nationale – imaginez qu'il s'élève à 73 % ! Il faut ajouter que 55 % de la population a moins de vingt ans.
De plus, le problème de l'immigration, accablant, bien connu par le rapporteur, exacerbe ces difficultés. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : la moitié de la population de l'île est étrangère et, pour une grande part, en situation irrégulière.
Cependant, ce territoire dispose d'une grande richesse environnementale, qu'il faut préserver et protéger, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre des outre-mer. Pensez, mes chers collègues, que le lagon de Mayotte, le plus grand de l'océan Indien, avec ses 1 100 kilomètres carrés, représente 25 % de la biodiversité récifale mondiale ! Or, à cause d'une croissance démographique de 4 % et d'une urbanisation anarchique, l'écosystème mahorais est en péril et risque de disparaître si nous n'agissons pas rapidement.
Les efforts de nos concitoyens de Mayotte et des collectivités locales en faveur d'une croissance économique autonome sont considérables. Ils souhaitent que leur territoire soit enfin doté d'équipements structurants de base, indispensables au développement durable de l'emploi. Les Mahorais aspirent à prendre part au rayonnement économique et culturel de la France et de l'Europe en faisant du cent unième département un pôle d'accès aux marchés en pleine expansion de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe.
Je dirai un mot, madame la ministre, sur les chiffres qui ont été esquissés en commission et que vous avez précisés.
Nous reconnaissons volontiers les efforts consentis par l'État et les moyens mis sur la table pour accompagner le développement des outre-mer. Mais nous ne pouvons pas accepter qu'une confusion s'installe sur la réalité de l'effort supplémentaire de l'État dans le cadre de la signature du contrat de convergence pour Mayotte : 1,1 milliard d'euros, cela sonne bien à l'oreille ; toutefois, en fin de compte, entre les mesures annoncées précédemment, notamment dans le plan de 2018, et les lignes nouvelles, dont le nombre et le volume sont très faibles, cela s'apparente plus à un recyclage des promesses d'hier qu'à un effort complémentaire. Surtout, le plan ne prévoit aucune programmation financière des grandes infrastructures de désenclavement et de rayonnement régional préconisées par le rapporteur, ni aucun relèvement des dotations aux collectivités, qui sont pourtant très inférieures à la moyenne par habitant. C'est tout simplement insuffisant.
La situation que j'ai décrite appelle une action bien plus vaste et ambitieuse. Un réel effort supplémentaire est indispensable pour établir un socle assurant le rattrapage qui permettra d'enclencher le développement durable que nous appelons de nos voeux.
Tel est l'objectif de cette proposition de loi. Je salue le travail exceptionnel et la détermination sans faille de notre rapporteur, au service de son territoire et de son développement au sein de la République. Mansour Kamardine est profondément républicain, il est un véritable ambassadeur de son territoire et il fait honneur à la France.
La proposition de loi de notre groupe est simple : elle programme, sur dix ans, le rattrapage des infrastructures de base, l'établissement de l'égalité des droits sociaux et la préservation de l'environnement de l'île, pour un montant global de près d'1 milliard d'euros sur dix ans. Cette programmation est nécessaire pour apporter de la visibilité et surtout assurer des engagements financiers structurants.
Premièrement, la proposition de loi suggère une mise à niveau des infrastructures de transport de mobilité et d'interconnexion, notamment la construction d'une piste convergente à l'aéroport de Dzaoudzi-Pamandzi et d'un troisième quai de débarquement dans le port en eau profonde de Longoni, ainsi que le développement des routes nationales. Alors que nous venons de débattre des mobilités pendant près de quinze jours, ce texte est au rendez-vous de la mobilité pour les Mahorais.
Il soutient également l'établissement, dans les plus brefs délais, d'une couverture numérique de l'ensemble du territoire, dont bénéficieraient l'ensemble de ses acteurs économiques et de ses habitants. Il y a deux jours, dans cet hémicycle, nous évoquions la réduction de la fracture numérique en métropole ; il ne faut pas oublier Mayotte.
Deuxièmement, notre proposition de loi vise à rendre effective l'égalité sociale. Il conviendrait d'imposer l'application stricte du code de la sécurité sociale, et ainsi de rendre effectif pour chaque citoyen le droit de bénéficier des prestations sociales. Je pense ici notamment au RSA – le revenu de solidarité active – ou aux pensions de retraite, qui ne sont toujours pas reversées comme elles le devraient.
Le texte instaure également un minimum contributif aligné sur le régime de droit commun pour les personnes pouvant justifier de 160 trimestres d'activité professionnelle. Il prévoit en outre un calcul des pensions de retraite sur la base du plafond de sécurité sociale métropolitain.
Enfin, à l'heure de l'urgence climatique et de la défense de la biodiversité, nous proposons une trajectoire bas carbone, fondée sur la production d'énergie solaire photovoltaïque et de gaz par méthanisation, ainsi qu'un soutien à la préservation des espaces naturels et agricoles, afin de supprimer, à terme, les polluants et autres substances chimiques. La biodiversité mahoraise est un atout pour assurer l'avenir de l'île.
La famille politique que je représente est profondément attachée, comme d'autres ici, aux outre-mer et à leur développement. Cette proposition de loi en est un témoignage clair. Nous portons une responsabilité à l'égard de ces territoires et nous devons les accompagner sur le chemin d'un développement économique et social viable et autonome. Nous souhaitons vous faire partager cet attachement et vous donner l'opportunité, en adoptant ce soir la présente proposition de loi, de défendre ensemble, d'une même voix, l'un de ces territoires qui contribuent tant à notre rayonnement économique et culturel mondial ! Le groupe Les Républicains soutiendra bien entendu le rapporteur dans son combat. Vive Mayotte ! Vive la France !