Intervention de Josiane Corneloup

Séance en hémicycle du jeudi 20 juin 2019 à 21h30
Accueil familial des personnes âgées et handicapées — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJosiane Corneloup, rapporteure de la commission des affaires sociales :

L'un des freins majeurs est, bien sûr, la précarité du statut d'accueillant familial dans le cadre du contrat de gré à gré.

La loi prévoit aujourd'hui la coexistence de deux statuts permettant d'exercer le métier d'accueillant familial.

Le statut historique, issu de la loi de 1989, prend la forme d'un contrat de gré à gré entre l'accueillant et l'accueilli. Il concerne près de 98 % des quelque 10 000 accueillants familiaux. Avec le contrat de gré à gré, les accueillants familiaux ne bénéficient pas du statut de salarié, ni donc de toute la protection qui lui est associée. Lorsque nous les avons auditionnés, les accueillants familiaux nous ont dit qu'ils se sentaient comme des travailleurs de second rang.

Le contrat de gré à gré présente deux problèmes majeurs. Tout d'abord, les accueillants familiaux ne sont pas couverts par le droit à l'assurance chômage. Cela signifie que, si la personne accueillie décède ou est hospitalisée pour une longue durée, l'accueillant perd, du jour au lendemain, toute rémunération s'il ne retrouve pas immédiatement une autre personne à accueillir. Il ne bénéficie alors ni du droit au chômage ni d'un accompagnement personnalisé.

Le second problème est l'obligation pesant sur l'accueillant familial d'assurer la continuité de l'accueil. Nombre d'accueillants familiaux se trouvent dans l'impossibilité de se faire remplacer pour prendre leurs congés, alors même qu'ils ont droit à trente jours de congés par an. J'ai rencontré des accueillants familiaux qui n'avaient pris ni repos hebdomadaire ni congés depuis six ans. On voit bien que cette obligation les expose à un risque majeur d'usure professionnelle.

La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite loi DALO, a introduit le second statut, celui de salarié, pour les accueillants familiaux, ceux-ci pouvant être employés par des personnes morales de droit public ou de droit privé autorisées par le département. Ils peuvent ainsi bénéficier de l'ensemble des droits sociaux rattachés au salariat.

Toutefois, l'accueil familial salarié demeure extrêmement marginal et confidentiel, car il peine à se développer, alors que cette possibilité existe depuis 2007. On considère aujourd'hui qu'il ne concerne que 2 % des accueillants familiaux. Ce chiffre peut étonner au regard du niveau de protection qu'offre le statut de salarié.

Les organismes que j'ai auditionnés ont relevé deux freins au développement de l'accueil familial salarié : d'une part, la réticence des départements, qui exercent la compétence sociale, à autoriser une personne morale à utiliser le salariat ; d'autre part, le faible intérêt des établissements sociaux et médico-sociaux à développer cette forme d'accueil. À cet égard, nous pouvons nous interroger sur l'une des préconisations du rapport Libault, qui consisterait à restreindre le salariat aux seuls établissements sociaux et médico-sociaux.

Je suis convaincue que l'avenir de l'accueil familial repose sur la consolidation du statut d'accueillant familial par le biais de la systématisation du salariat, celui-ci étant déjà prévu par le code de l'action sociale et des familles.

Les avantages pour les accueillants familiaux sont nombreux : la détention d'un véritable contrat de travail donnant accès à l'ensemble de la protection sociale qui lui est associée, notamment l'ouverture des droits à l'allocation chômage ; un droit à congé effectif, puisque les modalités de remplacement de l'accueillant sont à la charge de l'employeur, de même que la charge administrative. Par ailleurs, alors que le contrat de gré à gré implique une relation binaire dans laquelle l'accueilli paie l'accueillant, le salariat repose sur un modèle triangulaire, liant la personne morale, l'accueillant et l'accueilli. Cela tend à démonétiser la relation entre l'accueillant et l'accueilli, ce qui permet à l'accueillant de se recentrer sur son coeur de métier, à savoir l'accueil et l'accompagnement.

Aussi, la proposition de loi vise à systématiser, sur l'ensemble du territoire, le salariat des accueillants familiaux. L'agrément serait toujours délivré par le président du conseil départemental. L'obligation de salariat a suscité quelques inquiétudes lors du débat en commission des affaires sociales. Certains d'entre vous se sont interrogés sur le devenir des 10 000 accueillants familiaux employés actuellement dans le cadre d'un contrat de gré à gré. Je veux les rassurer : ces accueillants familiaux pourront rester dans ce même cadre, puisque les deux statuts continueront à figurer dans le code de l'action sociale et des familles.

Certains d'entre vous ont proposé d'étudier un contrat de gré à gré aménagé, ouvrant droit à l'allocation chômage.

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