Depuis la nuit des temps, l'Alsace est un carrefour au coeur de l'Europe. Strasbourg ne doit-il pas son nom à la conjonction de Strasse pour « route » et de Burg pour « place forte » ou « ville » ? Strasbourg est la ville à la croisée des chemins européens.
De routes, il est évidemment question dans cet article. Car, s'il est normal que les routes de la rive gauche française du Rhin soient largement empruntées par les camions qui circulent du nord au sud de l'Europe, tout comme celles d'outre-Rhin, il est anormal que le territoire alsacien subisse depuis des années le préjudice d'une asymétrie fiscale.
Comme l'a rappelé M. Hetzel, l'Allemagne applique en effet, depuis le 1er janvier 2005 – quinze ans, déjà – une taxe sur les routes fédérales allemandes appelée LKW Maut ou taxe poids lourds. Pour un trajet entre Karlsruhe au nord et Basel au sud, cette taxe représente un surcoût de 40 euros pour un semi-remorque de 18 tonnes. Rien d'étonnant, donc, à ce que le trafic se reporte sur les autoroutes alsaciennes, non concédées et gratuites, avec des conséquences dramatiques : embouteillages du nord au sud, en particulier aux abords des grandes villes et à la frontière suisse ; impact économique des bouchons ; dégradation accélérée des routes sans compensation financière ; et, plus important sans doute, pollution de l'air, avec les problèmes graves de santé qui en résultent. Je pense en particulier aux habitants de Strasbourg, qui vivent à proximité immédiate de l'autoroute A35, en permanence saturée, qui traverse la ville à deux kilomètres, à vol d'oiseau, de sa cathédrale.
Je salue donc le transfert de la compétence de gestion de ces routes à la collectivité européenne d'Alsace, d'autant plus que, comme le soulignait la déclaration de Matignon du 29 octobre dernier, la future collectivité possède « d'évidence la taille critique et la technicité pour intégrer les routes nationales dans le réseau départemental qui en compte plusieurs milliers, au titre de sa compétence voirie ».
Je salue également la possibilité donnée à l'eurométropole de Strasbourg de demander, et elle le souhaite, la cession des portions de routes sur son territoire, nommément l'autoroute A35, dans la perspective de sa requalification en boulevard urbain, projet indispensable à l'amélioration nécessaire de la qualité de l'air et des mobilités, en synergie avec d'autres projets structurants comme le contournement ouest de Strasbourg ou le développement des transports en commun.
Vous l'aurez compris, chers collègues, cette loi marquera la fin, je l'espère, de l'impuissance emblématique des pouvoirs publics, toutes majorités confondues, à apporter une réponse concrète à un problème qui empoisonne la vie de nos concitoyens. À la future collectivité de se montrer à la hauteur dans l'utilisation de ces nouveaux moyens !