Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du vendredi 28 juin 2019 à 9h30
Énergie et climat — Article 3 septies

François de Rugy, ministre d'état, ministre de la transition écologique et solidaire :

Le sous-amendement no 904 de M. Orphelin vise à supprimer la mention d'un coût de travaux « manifestement disproportionné par rapport à la valeur du bien ». Je crois que cette formule est issue de l'examen de la réalité. Dans le logement, il y a tellement de situations ! Certaines maisons, assez grandes, peuvent nécessiter des travaux de rénovation assez coûteux alors qu'elles n'ont pas par une très grande valeur sur le marché. Nous le savons, cela existe. Je crois que nous avons tous des exemples en tête, sur tel ou tel territoire, de maisons estimées à 70 000 ou 80 000 euros pour lesquelles il faudrait engager 40 000 euros de travaux pour arriver à une rénovation énergétique correcte. Je ne parle ici que d'une rénovation énergétique correcte, il n'est même pas question de passer d'une classe F ou G à une classe A ou B !

Je me souviens avoir assisté à une présentation concrète effectuée par la Fédération SOLIHA, qui accompagne de nombreux ménages dans leurs travaux de rénovation énergétique pour le compte de l'ANAH : une maison située en Haute-Saône présentait une valeur de vente ou d'achat inférieure au montant des travaux ! Or si un propriétaire privé peut faire le choix d'acquérir un bien immobilier très bon marché, mais nécessitant des travaux importants, afin d'en faire un logement agréable à vivre et peu coûteux en chauffage pour un coût global honnête, d'autres peuvent en revanche se dire qu'ils n'arriveront jamais à s'en sortir et qu'ils rentreront à peine dans leurs frais s'ils revendent leur bien. Il faut y penser.

Un coût de travaux « manifestement disproportionné » représente environ 20 à 25 % du prix de vente. Pour reprendre mon exemple précédent, si une maison d'une valeur de 80 000 euros nécessitait plus de 20 000 euros de travaux, la question de l'exemption de l'obligation pourrait se poser. Mais une maison semblable, de la même taille, etc. , pourrait valoir 200 000 euros dans une autre région – et je ne prends pas là un exemple totalement disproportionné. Avec 20 000 euros de travaux pour une valeur estimée à 200 000 euros, cela redevient un calcul économique raisonnable.

Je rappelle que le rapport établi conjointement par le CGEDD – Commissariat général au développement durable – , qui dépend de mon ministère, et l'Inspection générale des finances, a démontré que le coût des travaux nécessaires pour passer des classes F et G à la classe E s'élevait à environ 150 euros par mètre carré.

En moyenne, si l'on reprend l'ensemble de ces éléments, la mesure sera efficace car elle portera sur des proportions inférieures à celles s'appliquant aux cas particuliers dont j'ai parlé. Mais ces cas existent. Voilà pourquoi il faut savoir s'adapter.

De la même façon, personne ne l'a soulevé ici, mais je peux vous dire qu'à l'extérieur de cet hémicycle, certaines personnes m'ont envoyé des messages pour s'enquérir du sort des maisons anciennes pouvant avoir des dimensions patrimoniales ou architecturales particulières. Nous connaissons tous ces questions. Je me souviens de gens qui avaient lancé des polémiques à une époque : « Vous allez obliger l'isolation par l'extérieur sur des maisons à colombages ! ». Évidemment, les spécifications architecturales et techniques sont aussi prises en compte. C'est normal. Mais l'objectif général est bien de lutter contre les passoires énergétiques.

Je propose donc d'adopter l'amendement, et demande le retrait ou le rejet des sous-amendements.

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